Des petites plantes qui poussent dans un par terre de pièces d'or. Une main en prend soin.
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Dans le récent guide pour l’investissement ESG : Bien réussir en faisant du bien, publié par PWL Capital, Raymond Kerzérho, Peter Guay et Marc Brodeur-Béliveau proposent une grille d’analyse pour catégoriser et choisir les fonds négociés en Bourse (FNB) les plus appropriés dans le domaine de l’investissement responsable.

«Les vents sont favorables aux fonds ESG [axés sur les pratiques environnementales, sociales et de gouvernance]», juge Raymond Kerzérho, directeur de la recherche chez PWL Capital, à Montréal. Les chiffres lui donnent raison, puisqu’au Canada seulement on compte plus de 1,5 billion de dollars (T$) d’actifs ESG, ce qui fait du pays un chef de file mondial dans le secteur.

Pour s’y retrouver dans ce secteur, les auteurs font un découpage en trois approches qui obéissent à des profils d’investisseurs adhérant plus ou moins aux valeurs ESG : passive, intégrée et active. Chemin faisant, ils expliquent les raisons et les malentendus qui ont mené à l’idée fausse que les fonds ESG fournissent des rendements inférieurs à ceux des fonds traditionnels.

ESG et rendements sont synonymes

Pour un adhérent de l’approche passive, le rendement prend le pas sur l’impératif «durable». Les responsables de ces FNB, comme BlackRock, State Street et d’autres, recourent à des évaluations de conseillers souvent indépendants pour choisir les titres des fonds. De plus, ils cherchent à «atténuer les problèmes liés aux facteurs ESG afin de réduire les risques systématiques».

En fait, l’approche passive est pratique courante «chez de plus en plus de gestionnaires de portefeuille qui visent à éviter les chocs provenant de catastrophes comme un déversement de pétrole ou la découverte qu’une entreprise fait travailler des enfants», explique Dan Hallett, vice-président et directeur chez HighView Financial Group, à Toronto.

Dans l’approche intégrée, l’investisseur accorde une valeur égale au profil ESG et au profil risque/rendement d’un fonds. Aussi, la sélection des titres est très exhaustive et obéit à des critères quantitatifs établis par des tiers. MSCI, un des plus importants parmi ces tiers, met en place une pondération de 37 facteurs ESG à partir de vastes quantités de données provenant de plus de 185 analystes de recherche, et assigne un rang aux entreprises filtrées.

«Le but est de rééquilibrer le portefeuille pour l’axer sur les sociétés présentant un score élevé», indique l’étude de PWL Capital. Dans une bonne mesure, l’objectif de l’approche intégrée n’est pas tant d’éviter les mauvais acteurs ESG que de choisir ceux qui présentent la meilleure empreinte ESG.

Dans l’approche active, «on privilégie l’incidence ESG par rapport au profil risque/rendement au sein d’un portefeuille», écrivent les auteurs. On pourrait parler ici d’investissement «activiste».

«Nous devons relier à nouveau le succès des entreprises avec le progrès social et ramener ensemble entreprises et société», explique Loren Francis, vice-présidente et directrice chez HighView Financial Group.

L’approche passive peut avoir une incidence sociale ou environnementale positive, mais «les investisseurs ne doivent pas s’attendre à en tirer une performance supérieure ou inférieure», affirme l’étude. L’approche active, tout en étant alignée directement sur des objectifs ESG (promouvoir une entreprise «propre», favoriser l’avancement des femmes, etc.), peut entraîner un rendement moindre, juge Raymond Kerzérho, qui préfère toutefois ne pas se prononcer, car, dit-il, «le secteur est tellement pointu qu’il est difficile de le documenter et de discerner la performance».

L’étude privilégie nettement la stratégie d’intégration, d’autant plus qu’une recherche de 2015 «laisse entendre qu’une meilleure classification ESG peut conduire à une performance financière supérieure», peut-on y lire. C’est le meilleur des mondes : cote ESG supérieure et meilleure performance financière.

Contrairement aux deux autres approches, la stratégie d’intégration n’exclut aucun titre. Elle accepte tous les types d’industrie (tabac, armement, etc.) à la condition que l’entreprise soit sur «le bon chemin». Les titres dont la performance ESG est médiocre sont sous-pondérés, et surpondérés ceux dont la performance est exemplaire.

Un portefeuille entièrement ESG

Gestionnaire de portefeuille, adepte des FNB et de l’investissement responsable, et conseillère en placement chez Desjardins Gestion de patrimoine, Mary Hagerman approuve la classification du secteur ESG en trois catégories et privilégie elle aussi la stratégie intégrée.

«Mon intérêt pour les FNB provient du fait que je veux le moins d’émotion possible dans le processus d’investissement, dit-elle. Là où ne règne pas un processus avec des règles strictes, on s’ouvre aux erreurs des gestionnaires. C’est pourquoi je juge aussi que la stratégie intégrée, en suivant des règles strictes, est la meilleure.»

Par contre, elle estime que l’étude de PWL demeure un travail en cours, car celle-ci ne tient pas compte, par exemple, de l’approche par facteurs de risque, une approche de pointe à laquelle adhèrent les huit FNB ESG que Desjardins a récemment lancés. Pour Mary Hagerman, l’offre de FNB se bonifie sans cesse, au point qu’elle envisage pouvoir, dès janvier 2019, offrir à ses clients un portefeuille composé à 100 % de FNB ESG.