Il y a une interminable liste de bonnes raisons pour lesquelles ne pas vendre d’actions dans les périodes de tension du marché est devenu une affaire de sagesse conventionnelle. L’émotion, et plus précisément la peur, pourraient obscurcir le jugement des gens. Et si votre client a beaucoup de temps devant lui, il devrait chercher à acheter des actions quand elles sont en baisse, et non à les vendre. Beaucoup trop d’investisseurs ont montré leur propension à réduire leur participation aux actions à la toute fin d’un marché baissier; lorsque les actions rebondissent, ils ne sont plus que des observateurs. Et les attitudes tenant du « tout ou rien » (on n’a que des actions un jour, et on n’en a aucune le lendemain), conduisent à de mauvaises performances.
Mais immanquablement, les conseils de répartition d’actifs à taille unique, notamment la mise en garde de ne rien vendre en marchés baissiers, ne conviennent pas à tous les investisseurs. En particulier, les investisseurs qui s’approchent de la retraite et ont adopté une attitude de laisser-faire vis-à-vis de leurs placements feraient peut-être bien d’utiliser la liquidation récente du marché comme une incitation soudaine à se débarrasser de certains risques inhérents à leur portefeuille. Dans leur cas, vendre des actions pourrait non seulement s’avérer bénéfique psychologiquement, mais être totalement justifié du point de vue des placements.
Les investisseurs passifs ont actuellement plus d’actions en portefeuille
Un thème commun dans la plupart des plans de répartition d’actifs (mais pas tous) est que la partie en actions du portefeuille doit baisser à mesure que l’investisseur s’approche de la date où il aura besoin de son argent. La raison en est très simple : pour les dépenses à court terme, il est plus sûr de garder l’argent dans des actifs qui ont peu de chances de se déprécier au cours de cette brève période. Cela milite en faveur de la détention de liquidités et d’obligations pour les portions du portefeuille qui pourvoiront aux besoins de dépenses de la première partie de la retraite (ou qui financeront presque tous les objectifs que l’on espère atteindre dans les 10 prochaines années, que ce soit une mise de fonds pour l’achat d’une maison ou les frais de scolarité). Les actions, quant à elles, sont beaucoup moins fiables pour faire face à des besoins de trésorerie à court terme; elles ont un potentiel à long terme plus important mais à court terme, leur potentiel de pertes est plus élevé.
Toutefois, les investisseurs qui ont préféré laisser les bons temps rouler ont vu la portion à haut risque de leur portefeuille augmenter ces sept dernières années, alors que le volet à risque moins élevé (dans la mesure où ils en ont un) a pris une importance de moins grande. Même en tenant compte de la liquidation récente, les actions mondiales ont quasiment triplé depuis qu’elles ont touché le fond en mars 2009. Les obligations n’ont pas été catastrophiques, mais elles n’ont certainement pas maintenu la cadence. Par conséquent, un portefeuille composé de 50 % d’actions et de 50 % d’obligations il y a sept ans comporterait de nos jours 70 % d’actions et 30 % d’obligations, à supposer que l’investisseur n’ait pas étoffé les actions mais ait réinvesti ses dividendes. L’investisseur participant au mouvement haussier avec plus de la moitié de ses investissements en actions ou utilisant la force du marché boursier comme incitation à étoffer ses avoirs en actions aurait une pondération en actions encore plus élevée.
La capacité de supporter le risque surpasse la tolérance au risque
Certains investisseurs proches de la retraite pourraient avancer que leur tolérance à la douleur est élevée. Ils ont déjà subi des tests de résistance et savent qu’ils peuvent s’accommoder de la volatilité dont s’accompagne parfois une pondération en actions élevée. Ils ne se sont pas affolés en 2008, et ils ont peut-être même acheté d’autres actions en situation de faiblesse.
Mais il y a une différence entre la tolérance au risque et la capacité de le supporter. La tolérance au risque est le montant que l’on peut perdre sans défaillir. La capacité de supporter le risque, quant à elle, est le montant que l’on peut perdre sans devoir changer ses plans. Au fur et à mesure que l’on s’approche de la retraite, la capacité de supporter le risque diminue, même si la tolérance au risque du retraité futur peut être demeurée celle d’un trentenaire. Si votre client n’a pas accumulé suffisamment de réserves à court terme parce qu’il s’est concentré sur la tolérance au risque plutôt que sur la capacité de le supporter, son plan de retraite n’en est que plus vulnérable à la séquence des rendements. Cela signifie que s’il a affaire à un marché boursier épouvantable pendant les premières années de saretraite et qu’il a besoin de prélever de l’argent d’un portefeuille d’actions en baisse, ses placements s’en trouveront diminués d’autant lorsque les actions auront fini par remonter. Le seul choix qui lui sera offert pour atténuer le risque lié à la séquence des rendements, à supposer que son portefeuille d’actions soit à la dérive et que votre client n’ait pas suffisamment de placements sûrs desquels retirer, sera de réduire substantiellement ses dépenses. Il va sans dire que c’est quelque chose que la plupart des jeunes retraités ne sont pas prêts à faire.
Un argument de plus en faveur d’une diminution du risque pour une portion de votre portefeuille si votre client pense prendre sa retraite dans les 10 ans qui viennent est que les évaluations, bien qu’elles ne soient pas très élevées actuellement, ne sont pas non plus particulièrement basses. Cela veut dire que les investisseurs qui vendent aujourd’hui ne le font pas à des niveaux de tension extrême, bien que le marché ait quelque peu trébuché ces derniers temps. L’action typique de l’univers couvert par Morningstar se négociait à un rabais de 11 % environ par rapport à sa juste valeur au 3 février 2016. Cela n’est pas trop décourageant, mais la plupart des bonnes affaires sont concentrées dans des segments cycliques du marché comme les matériaux de base et l’énergie. En raison du malaise économique mondial, ils pourraient rester à leur faible niveau actuel pendant quelque temps encore.
Quel niveau de sécurité est suffisant?
Cela ne veut pas dire que tout le monde devrait vendre dans la conjoncture boursière actuelle. Les jeunes investisseurs qui ont beaucoup de temps devant eux devraient être réceptifs aux réprimandes des experts les enjoignant de ne rien vendre. Et les gens qui sont à la retraite ou s’en approchent devraient vraiment se cramponner eux aussi à certaines actions. Après tout, les rendements que procurent les liquidités et les obligations ont peu de chances de tenir le rythme de l’inflation au fil du temps. Pour préserver le pouvoir d’achat d’un portefeuille, même les retraités plus âgés ont besoin du potentiel de croissance dont les actions peuvent s’accompagner.
Les investisseurs en quête de points de repère pour trouver les bonnes répartitions d’actifs pourraient se tourner vers une bonne série de fonds à échéancier pour leur montrer le chemin. Toutefois, il convient de noter que ces étalons de mesure ne tiennent pas compte du besoin de liquidité d’un investisseur. En se utilisant les prévisions de flux de trésorerie nécessaires, l’approche segmentée de la gestion des portefeuilles de retraite peut aider les investisseurs à déterminer la combinaison d’actions, d’obligations et d’argent liquide qui convienne au délai dont ils disposent.