De plus, si les obligations et la devise canadiennes se sont avérées d’excellents placements au cours des dix dernières années, il serait étonnant que cela soit le cas pendant les dix prochaines années, selon lui. Le dollar canadien est une des devises qui s’est le plus fortement appréciée au cours des dernières années.

Cette appréciation a fait du Canada un endroit cher pour brasser des affaires et le secteur immobilier est surévalué. Il juge donc que le moment est idéal pour cristalliser ses gains en obligations canadiennes et pour redéployer le capital à l’extérieur.

Ainsi, le fonds a substitué des obligations mexicaines à ses obligations canadiennes. Jack P. McIntyre souscrit à la thèse d’un retour de la production manufacturière en Amérique du Nord, et le Mexique est en meilleure position que le Canada : sa devise faible et ses bas coûts de main-d’oeuvre et d’énergie le placent devant le Canada.

Le rendement d’une obligation gouvernementale mexicaine de 10 ans oscillait récemment autour de 5,4 %, par rapport à 1,95 % pour une obligation gouvernementale canadienne. «Les obligations mexicaines sont attrayantes, car nous pensons que leur rendement baissera et que leur prix augmentera, alors que la qualité du crédit du Mexique s’améliore. En même temps, le peso mexicain devrait s’apprécier», prévoit-il.

Il note que la qualité du crédit de pays autres que ceux du G7 s’améliore à mesure que les pays dits émergents se développent ; par ailleurs, contrairement à la crise asiatique des devises de 1997-1998, la crise financière de 2008 émanait des pays développés.

Cela s’est traduit par une compression des écarts de crédit entre la dette des pays émergents et celle des pays développés, au point où la distinction entre pays développés et pays émergents s’estompe.

Le fonds investit aussi dans des devises qui devraient s’apprécier, sans nécessairement acheter des obligations libellées dans cette devise. C’est le cas de la roupie indienne : l’Inde va attirer des capitaux étrangers en raison des investissements massifs en infrastructure qu’elle s’apprête à réaliser. À l’inverse, il couvre sa position dans le dollar australien, jugé surévalué, mais détient des obligations de ce pays.

Les titres gouvernementaux comptent pour 91 % du fonds, les 9 % restants étant des obligations de sociétés américaines de première qualité. En tout, 46 % du fonds est investi dans des titres américains, 17 % en titres européens et 12 % en Asie.

Trois défis

Les taux d’intérêt devraient osciller dans des fourchettes relativement étroites au cours du premier semestre de 2013 dans les pays du G7, selon Jean Charbonneau, gestionnaire principal du Fonds mondial d’obligations gouvernementales AGF.

Ainsi, le rendement des obligations du Trésor américain et des obligations fédérales canadiennes de 10 ans devrait osciller entre 1,5 % et 2 %. Les obligations fédérales allemandes de même échéance, dont le rendement récent est d’environ 1,3 %, devraient aussi continuer d’être perçues comme un placement refuge, l’Europe périphérique continuant d’être en récession.

«Trois problèmes préoccupent les marchés obligataires, et ils dépendent de décisions politiques qui sont jusqu’à un certain point imprévisibles : la résolution du précipice fiscal aux États-Unis et son effet sur la croissance américaine, la crise de la zone euro et le changement politique à la tête de la Chine. Dans le premier cas, une forme de résolution est inévitable pour préserver la reprise qui semble se matérialiser, entraînant notamment une croissance de l’emploi. Pour ce qui est de l’Europe, l’assurance qu’a donnée Mario Draghi, président de la Banque centrale européenne (BCE), de faire tout ce qui est en son pouvoir pour préserver la zone euro, a eu un effet positif sur les marchés et sur les décisions politiques prises, bien qu’il y ait encore beaucoup à faire. Enfin, les marchés sont dans l’expectative des décisions des nouveaux dirigeants en ce qui a trait aux mesures qui visent à accélérer la croissance de l’économie chinoise au-delà de 7 % par an. En 2009, des investissements massifs en infrastructure avaient été effectués. On s’attend cette fois à ce que ce soit sur le plan de la consommation et de l’économie intérieures de même que du système bancaire, que des mesures de stimulation soient prises», résume Jean Charbonneau.

En toile de fond, les banques centrales ont assuré qu’elles continueraient de maintenir une politique monétaire très laxiste, et de nouvelles mesures d’assouplissement quantitatif de la Réserve fédérale américaine (Fed) sont possibles. Il n’y aura aucun changement de politique monétaire en 2013. Des baisses de taux en Europe et au Japon sont probables, selon lui.

De sorte que si les éléments se mettent en place, on pourrait assister à une reprise boursière sur des hausses de bénéfices au deuxième semestre. Cependant, la croissance des pays du G7 restera sous leur potentiel, car le désendettement en cours depuis 2009 se poursuivra pendant encore quelques années. On pourrait néanmoins subir une baisse du prix des obligations gouvernementales au deuxième semestre, alors que les investisseurs sortiront de ces refuges.

«Rien de majeur, mais étant donné les bas taux d’intérêt, une légère hausse vers 2 % pourrait suffire à produire un rendement total négatif. Cela dit, nous sommes actuellement dans une phase de très faible volatilité pour les obligations», rappelle Jean Charbonneau.

Cela l’a amené à ajouter des titres d’Irlande et d’Italie, où les rendements sont plus élevés qu’aux États-Unis et en Allemagne.

Il a aussi augmenté à 14 % sa pondération en titres de pays émergents, pondération qui peut atteindre 20 %. Le fonds ne peut investir que dans des titres garantis par des gouvernements.

Les taux d’intérêt sont à des niveaux trop bas, particulièrement ceux des obligations gouvernementales ; dans bien des pays, le taux des obligations de 10 ans ne couvre même pas l’inflation. Situation anormale qui reflète les craintes d’une crise financière significative, particulièrement en Europe.

Les banques centrales continuent d’acheter des actifs pour maintenir les taux bas, constate François Bourdon, gestionnaire du fonds négocié en Bourse Horizons Actif de revenu avantageux.

Selon lui, la donne devrait changer et les taux devraient amorcer une hausse en 2013, alors que l’économie, particulièrement aux États-Unis, continuera à s’améliorer. Le taux des obligations du Trésor américain de 10 ans devrait passer de 1,6 % à 2 %, voire 2,2 %. Le taux des titres allemands équivalents passerait de 1,25 % à 1,75 %, voire 2 %.

«Dans ce contexte, notre stratégie en 2013 sera de maintenir la durée du portefeuille inférieure à quatre ans, tout en recevant un rendement courant supérieur à 4 %. La logique qui soustend cette approche est que si les taux augmentaient de 1 %, notre revenu de 4 % compenserait la perte de 4 % de la valeur de nos obligations», calcule-t-il.

Ce contexte de hausse de taux rend aussi les obligations des pays émergents attrayantes : «L’inflation ne reprendra pas trop rapidement et les taux d’intérêt plus élevés les favorisent. Mais le facteur le plus important est que tous les pays du G10 veulent une devise plus faible ; les devises de pays émergents comme le Mexique, la Turquie, les Philippines et la Malaisie devraient s’apprécier, car elles sont excessivement sous-évaluées par rapport à celles du G10, en raison de la crise de 1997-1998», pense François Bourdon, qui cible une pondération de 20 % dans les obligations de pays émergents en 2013.

Dans cette logique, François Bourdon évite les obligations japonaises, alors qu’il s’attend à une dévaluation du yen ; il se détourne de même des obligations européennes.

En fait, outre les titres de pays émergents, le portefeuille est constitué essentiellement d’obligations de sociétés canadiennes et d’obligations américaines à haut rendement.

«Pendant les cinq à dix prochaines années, l’Amérique du Nord sera gagnante, et ce, pour trois raisons : d’abord, les États-Unis sont devenus très concurrentiels en raison de la forte dépréciation du dollar américain au cours des dix dernières années. Ensuite, les très bas coûts de l’énergie, surtout du gaz naturel, offrent un très net avantage concurrentiel. Enfin, le chômage très élevé empêche toute augmentation des salaires. Le Mexique est devenu très concurrentiel et devrait profiter du rapatriement d’une partie de la production manufacturière d’Asie. Les devises canadienne, américaine et mexicaine devraient bien se comporter et nous pondérons le portefeuille en conséquence», explique François Bourdon.

Il rappelle que les sociétés américaines de moyenne capitalisation sont celles qui profitent le plus du rebond manufacturier en cours aux États-Unis, et qu’elles sont les plus grandes émettrices d’obligations à haut rendement.

«La chasse au rendement courant élevé a certes poussé les évaluations à des niveaux élevés. Mais elle devrait se poursuivre tant que les banques centrales demeureront excessivement accommodantes et ces titres devraient au moins continuer de payer leur coupon», anticipe-t-il.