On l’observe d’un océan à l’autre : les ventes nettes de fonds communs de placement ont plus que doublé en janvier par rapport à janvier 2012, rapporte l’Institut des fonds d’investissement du Canada (IFIC). Un autre pl. fin. constate «un retour significatif vers les fonds équilibrés et même les fonds d’actions» au sein de sa clientèle.

Certains attribuent ce retour d’appétit du risque à des pronostics boursiers plus cléments ici et là dans le monde, notamment au sud de la frontière. D’autres y voient l’expression d’une certaine lassitude au terme d’une décennie de rendements anémiques.

Par ailleurs, il semble que le message qui invite les détenteurs de REER à se discipliner pour épargner trouve de plus en plus d’écho. Les adeptes des contributions REER hebdomadaires, mensuelles ou bimensuelles se font plus nombreux.

Les programmes de déductions REER automatiques qu’offrent un nombre croissant d’employeurs expliqueraient entre autres cet engouement.

Il n’empêche toutefois que, selon un récent sondage, près des deux tiers (63 %) des Québécois ont encore cotisé cette année à la dernière minute, c’est-à-dire au cours des deux dernières semaines de février.

45, 55 ou 70 % ?

Lors de vos rencontres avec vos clients, vous avez été nombreux à utiliser la règle des 70 % comme objectif de remplacement de revenus à la retraite. Depuis des lustres, il est d’usage de recourir à ce qu’on appelle couramment «la règle du pouce» dans l’établissement des projections.

D’où vient donc ce chiffre magique ? Il date de… 1870, l’année où le premier régime de retraite canadien obligatoire qui était destiné aux fonctionnaires fédéraux a vu le jour, indique une étude1 de la Régie des rentes du Québec (RRQ).

Calqué sur celui des régimes publics britanniques, le calcul de la rente correspondait à 2 % du salaire des trois dernières années pour chaque année de service, jusqu’à concurrence de 35 ans.

Fait intéressant, ce barème de 70 % est non seulement devenu la norme pour les régimes privés qui allaient bientôt suivre, mais également le but à atteindre de nos jours pour le commun des épargnants, toutes sources de revenu de retraite confondues.

Ce pourcentage est régulièrement remis en question.

Dernier exemple en date : deux actuaires torontois l’estiment excessif, voire irréaliste, dans un récent ouvrage intitulé The Real Retirement (voir l’article «Crise de la retraite ? Vraiment ?» dans notre numéro de février).

Selon leurs calculs, l’objectif réel devrait plutôt osciller autour des 55 % pour la vaste majorité de la classe moyenne canadienne, puisque trois postes de dépenses importants disparaissent une fois la retraite entamée : l’hypothèque, les dépenses pour les enfants et les coûts liés à l’emploi.

Des professionnels québécois de l’industrie n’ont pas tardé à contester ces conclusions, citant notamment le manque d’épargne et les attentes plus élevées des futurs retraités d’aujourd’hui (voir «Pas de crise de la retraite ? Pas sûr…», paru en mi-février).

Pendant ce temps…

Au fait, qu’en est-il de la réalité dans le Québec actuel, où un baby-boomer vivra de deux à trois fois plus longtemps après l’âge de 65 ans que son ancêtre de 1870 ?

Entre 1993 et 2005, le taux de remplacement de revenu à la retraite s’est établi en moyenne à 65 %, selon la même étude de la RRQ.

A priori, on semble s’approcher des 70 % recommandés. Mais le même document nous apprend qu’«entre 30 et 40 % des individus n’ont pas un revenu satisfaisant à la retraite».

Et que pour «maintenir à la retraite un revenu en lien avec celui qui précédait la retraite», la majorité des travailleurs doivent cotiser à des régimes privés.

Une évidence, me direz-vous. Or, est-il nécessaire de rappeler que la moitié des travailleurs du Québec sont privés de tels régimes en milieu de travail ?

Qui plus est, les salariés de moins de 30 ans sont presque deux fois moins nombreux que leurs aînés (33 %, par rapport à 63 %) à avoir accès à un régime privé, en plus d’être plus susceptibles d’hériter de régimes à cotisation déterminée.

Afin d’éviter des drames personnels et collectifs, vivement la mise en place d’outils qui inciteront davantage de Québécois à épargner systématiquement en vue de leurs vieux jours.

Qu’il s’agisse du régime volontaire d’épargne retraite (RVER), dont l’établissement a été reporté, de contributions supplémentaires volontaires qu’il serait possible de verser à la RRQ ou de toute autre initiative de même nature, le temps presse.