Rappelons que l’indice MSCI Marchés émergents (ME) a affiché un rendement annuel composé de 11,5 % de décembre 2000 à décembre 2010, par rapport à – 0,43 % pour le MSCI Europe et à – 2,1 % pour le MSCI Amérique du Nord (AN).

L’indice ME a ensuite chuté de 16,1 % en 2011 et est remonté de 16 % en 2012, pour un rendement annualisé de – 1,4 %, par rapport à 7,9 % pour l’indice MSCI AN et à 3,7 % pour le MSCI Europe.

«Au cours des deux dernières années, les bénéfices ont été constamment revus à la baisse dans les ME, ce qui est plutôt rare. Il y a bien sûr des périodes de croissance plus ou moins rapide des bénéfices. Cependant, le changement de direction est survenu en mai 2012, alors que les craintes en ce qui a trait au ralentissement et au possible atterrissage brutal de l’économie chinoise se sont estompées, de même que les interrogations sur la viabilité de l’euro et sur la capacité de l’Europe à contrôler les problèmes de la dette souveraine. La remontée s’est poursuivie alors que l’incertitude de l’élection américaine a été levée et que le précipice budgétaire a pu être évité», explique Bill Adams, stratège de portefeuille pour The Boston Company Asset Management, qui gère le Fonds de marchés émergents CIBC.

De sorte que l’indice MSCI ME a repris la pole position depuis la fin d’août, bondissant de 11,3 % (en $ US) jusqu’au 28 février, par rapport à 7,5 % pour l’indice MSCI AN, sur l’anticipation d’une reprise des bénéfices en milieu de cycle.

Malgré cette poussée, les évaluations seraient encore attrayantes par rapport à leur moyenne historique à long terme, de même que par rapport aux marchés américains, européens et japonais, note Bill Adams.

Alors qu’elle se négocie à 5,5 fois les bénéfices, la Russie est le marché émergent le moins cher, mais c’est toujours le cas à cause de risques politiques qui pourraient nuire aux droits des actionnaires minoritaires.

Le marché de la Corée du Sud se négocie souvent à un léger escompte par rapport à l’ensemble des marchés émergents, mais à 8,5 fois les bénéfices, il se négocie au plus bas de sa propre fourchette d’évaluation historique. C’est la plus importante pondération du fonds, à près de 20 % : les titres financiers et de télécommunications y sont particulièrement attrayants, selon Bill Adams. À 19 % du portefeuille, les titres chinois cotés à Hong Kong occupent le deuxième rang.

Marge bénéficiaire en hausse

Les indices boursiers des marchés émergents devraient connaître une croissance de 8 à 10 % en 2013, dans un contexte où le produit intérieur brut (PIB) mondial croîtra d’au plus 3 % et celui des pays émergents, de 5 %, selon Alpha Ba, cogestionnaire du Fonds de marchés émergents AGF à Toronto.

«Avec une croissance si modeste, on ne peut s’attendre à générer une croissance des bénéfices par action (BPA) de 15 %, comme le prévoient les analystes. Au début de 2012, ceux-ci s’attendaient à une croissance du BPA de 11 à 12 %, et on estime maintenant qu’elle n’a été que de 3 %», rappelle-t-il.

Selon lui, une croissance de 5 % permettra de revoir à la hausse la marge bénéficiaire nette des entreprises, car contrairement aux marchés développés, la marge bénéficiaire nette est à un niveau historiquement bas dans les ME.

En 2012, cette marge a atteint 7,8 %, son plus bas niveau depuis son sommet de 12,7 %, atteint en 2004. Alpha Ba explique cette compression de marge par un manque de rigueur dans le contrôle des coûts de la part des dirigeants d’entreprise, qui croyaient que la croissance reviendrait immanquablement.

Il estime que cette marge nette pourrait rebondir à sa moyenne historique de 9,7 % cette année, mais il reconnaît qu’elle pourrait continuer à se comprimer : «Pour l’avenir, les entreprises des ME doivent réduire leurs coûts et leurs dépenses en immobilisations (capital expenditures), car le monde n’est plus dans une phase de croissance effrénée», affirme-t-il.

C’est pourquoi Alpha Ba juge que les actions des ME sont attrayantes : elles se négocient à un ratio cours/bénéfices anticipés (C/B) de 10,6 et à un ratio cours/valeur comptable (C/VC) de 1,6 ; en comparaison, l’indice MSCI All Country World Index affiche un ratio C/B de 12,1 et un ratio C/VC de 1,8. Le rendement de l’avoir des actionnaires (ROA) est de 13 % dans les ME, par rapport à 12 % dans les marchés développés. Cependant, le portefeuille AGF affiche un ROA moyen de 21 %.

Les actions des ME représentent 12 % du Fonds d’actions mondiales AGF, soit leur poids dans l’indice MSCI Monde. «Nous avions porté cette pondération à 25 % en l’an 2000, alors que les évaluations des ME étaient très basses», rappelle-t-il.

Le fonds est géré de manière ascendante selon l’approche de la valeur économique ajoutée (economic value added ou EVA), où les titres sont choisis en fonction du rendement du capital investi supérieur au coût de ce capital. «Nous ciblons des titres qui offrent un rendement du capital investi en termes de flux de trésorerie (cash flow return on investment) médian sur 3 ans de plus de 10 %».

Il en résulte que les titres de consommation discrétionnaire sont très attrayants puisqu’ils comptent pour 17,1 % du portefeuille, par rapport à 8 % pour l’indice MSCI ME. Même chose pour les titres de consommation de base, qui comptent pour 11 %, par rapport à 9 % dans l’indice. Mais à 21,8 %, les titres financiers sont sous-pondérés par rapport à 26,5 % pour l’indice.

Potentiel asiatique

En 2013, la Chine surprendra par les résultats en hausse des entreprises cotées en Bourse, notamment dans l’immobilier, même si les actions immobilières ont bien rapporté en 2012, prévoit James Morton, gestionnaire de la Catégorie Mackenzie Cundill Valeur marchés émergents à Singapour, dont 30 % de l’actif est investi dans le secteur immobilier.

Un des phénomènes les plus intéressants de 2013 serait la libéralisation du système d’enregistrement des résidences.

En Chine, les travailleurs migrants venus surtout des régions rurales de l’ouest n’ont pas de permis de résidence, ce qui les prive du droit de s’acheter une maison dans la ville où ils travaillent. Environ 200 millions des 700 millions d’individus que compte la population urbaine seraient dans cette situation.

«Le revenu de ce groupe a augmenté et excède 2 000 yuans par habitant par mois, ce qui leur permettrait de se payer un logement dans des villes secondaires. Des discussions qui visent à encourager ces travailleurs à migrer vers des villes où ils pourraient obtenir ce permis de résidence sont en cours. Ces mesures seraient très positives pour la situation sociale du pays, alors que ces travailleurs constituent la strate la plus mécontente de la société chinoise», croit James Morton.

Cette libéralisation serait très favorable au marché immobilier et à l’augmentation des dépenses de consommation, car selon les recherches, 70 % de ces individus ont une famille, mais moins de 10 % d’entre eux possèdent un logement.

Une autre tendance est le désir des familles chinoises d’avoir un deuxième enfant : «En tenant compte de ces facteurs, nous croyons que le marché immobilier restera orienté à la hausse au cours des deux prochaines années», juge James Morton.

L’indice Shanghai Stock Exchange Composite serait maintenant dans une nouvelle phase haussière, alors qu’il a bondi de plus de 20 % entre son creux du 3 décembre dernier et la fin de janvier cette année. Cet indice avait reculé de 71 % entre son sommet d’octobre 2007 et son creux d’octobre 2008. Il avait ensuite doublé jusqu’en juillet 2009, mais s’était de nouveau replié de 43 % pendant plus de trois ans, jusqu’en décembre dernier.

Ailleurs en Asie, la plupart des économies sont suffisamment en hausse pour continuer d’aller de l’avant en 2013, à moins d’une catastrophe dans une autre partie du monde.

Le portefeuille est très concentré en Asie et ne détient aucun titre en Amérique latine, où les évaluations sont jugées trop élevées et où la profondeur et l’étendue des marchés sont inférieures à celles des marchés d’Asie. Par contre, le fonds détient des positions en Russie.

Quant aux évaluations dans leur ensemble, James Morton souligne que les ratios C/VC et C/B sont inférieurs à leur moyenne sur 18 ans : «Cela devrait rendre le secteur particulièrement attrayant par rapport aux nombreuses catégories d’actif qui semblent maintenant excessivement chères. Notre portefeuille se négocie à une décote de 25 à 30 % par rapport à ces indices, et semble par conséquent encore plus attrayant», souligne-t-il.

Les titres des marchés émergents représentent 80 % du Fonds renaissance Mackenzie Cundill, un fonds d’actions mondiales également géré par James Morton.

8 à 10 %

Croissance prévue des indices boursiers des marchés émergents en 2013, selon Alpha Ba, cogestionnaire du Fonds de marchés émergents AGF.