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Au fil de son histoire, l’industrie des fonds négociée en Bourse (FNB) a souvent apporté des solutions aux problèmes liés aux investisseurs. Lors du panel L’innovation dans le domaine des FNB, organisé par BMO Gestion mondiale d’actifs en février, trois experts ont donné leur perspective sur les changements récents et à venir dans ce secteur.

Accès aux titres à revenu fixe

Les FNB de titres à revenu fixe constituent l’une des plus grandes innovations du secteur, selon Andres Rincon, Directeur, Stratégie de FNB et de produits dérivés sur actions, Valeurs mobilières TD. En effet, ces fonds permettent d’accéder à une variété de catégories de titres à revenus, comme les actions privilégiées, autrefois plus difficiles d’accès pour le conseiller moyen.

Par ailleurs, les FNB de titres à revenus offrent une liquidité en temps de crise dans le marché sous-jacent, comme ç’a été le cas en mars 2020 où il n’y avait pas d’acheteurs pour certaines catégories de titres à revenu fixe.

« Les FNB prennent quelque chose de difficile à négocier et le transforment en quelque chose de simple qui se négocie en une seule transaction. Au passage, ils offrent souvent une diversification instantanée et une exposition précise à une catégorie d’actifs », indique Mark Raes, directeur général et chef – Produits, BMO Gestion mondiale d’actifs.

« À mon avis, aucun humain ne devrait acheter une obligation. Ça n’a pas de sens de le faire »,  résume Patrick McEntyre, directeur général, Système électronique de négociation, Banque Nationale du Canada.

Par ailleurs, les FNB, comme le ZMBS (BMO Canadian MBS Index ETF), permettent aux investisseurs de négocier des titres difficiles d’accès, même pour les investisseurs institutionnels, comme les titres adossés à des créances hypothécaires canadiens, selon lui.

L’arrivée sur le marché des FNB d’obligations échelonnées ont également permis aux conseillers de déléguer la création de tels échelonnements pour leur client, a fait valoir Andres Rincon. « Combien de conseillers construisent des obligations échelonnées ces temps-ci? », s’interroge-t-il.

Le fait que les FNB répondent à un besoin des conseillers, de leurs clients et des investisseurs institutionnels est donc prometteur pour la croissance de ce secteur.

Meilleure couverture de change

La création par l’industrie canadienne des FNB du premier FNB offrant une couverture contre le risque de devise constitue une autre innovation importante. Actuellement, un investisseur canadien peut détenir des actions américaines par l’intermédiaire d’un FNB en dollars canadiens dans une version couverte ou une version non couverte, ou encore dans une version en dollars américains.

« Les FNB couverts contre les risques de change sont là depuis un moment. C’est une innovation récente et une autre l’est davantage : les fournisseurs qui offrent une série couverte et une série non couverte du même fonds. Ça laisse plus de choix », souligne Mark Raes.

Par exemple, les investisseurs institutionnels qui souhaitent couvrir uniquement la moitié de leur exposition contre les risques de devise peuvent se procurer simultanément un portefeuille d’actif couvert et son équivalent non couvert.

Pour ceux qui souhaitent exprimer leur perspective sur la direction du dollar canadien par rapport au dollar américain, il devient simple de le faire en passant de la version couverte d’un fonds à sa version non couverte ou vice-versa. « Ceci crée potentiellement une source d’alpha pour ceux qui ont une perspective de l’évolution d’une devise », affirme Mark Raes.

Comme l’indiquait un récent article de Finance et Investissement, la couverture contre le risque de change, qui se fait généralement de manière mensuelle, n’est pas parfaite et engendre un coût implicite non négligeable. On l’appelle l’effet résiduel de change, soit l’écart de performance engendré par le fait que la quantité de dollars américains couverts et la véritable exposition du fonds peuvent varier de façon importante entre les quatre semaines séparant les moments où un fonds rééquilibre sa couverture de devise.

En réponse à des besoins fiscaux

L’industrie des FNB a aussi innové afin de répondre à certains objectifs de clients, notamment de composé avec la fiscalité de leur placement. Prenons l’exemple du FINB BMO obligations à escompte (ZDB). Il a été conçu pour les investisseurs à la recherche d’un revenu fiscalement avantageux et qui veulent éviter les inconvénients des obligations à primes.

En effet, les obligations à primes détenues dans un compte non enregistré font que le client a un taux d’imposition élevé, car ses revenus d’intérêts sont pleinement imposés alors que sa perte en capital sur la valeur de l’obligation n’est qu’incluse à 50 % dans le revenu.

En 2013, une étude en expliquait d’ailleurs l’essence des inconvénients fiscaux.

« Avec ces FNB, vous n’avez pas ce coupon plus élevé qui est moins intéressant sur le plan fiscal », explique Mark Raes.

Les FNB de vente d’options d’achat couvertes d’actions ont leurs propres profils de risque financiers. Tout dépendant de la façon dont est mise en œuvre la stratégie de superposition d’options d’achat couvertes, le potentiel de hausse est moindre que l’exposition à l’ensemble du marché.

« Dans le cas des FNB BMO, nous vendons des options d’achat à court terme hors-jeu sur environ la moitié du portefeuille, ce qui permet une pleine participation jusqu’au prix d’exercice et une demi-participation au-dessus du prix d’exercice. Tout en restant exposée au risque de baisse si la valeur du portefeuille diminue, la baisse est potentiellement réduite, car le revenu de la prime payée par l’acheteur de l’option réduit l’effet d’une baisse potentielle de la valeur de l’actif sous-jacent », précise Mark Raes, en marge de l’événement.

Lors du panel, Mark Raes a mis de l’avant une subtilité fiscale découlant de ce type de FNB. D’abord, le revenu provenant de la prime est considéré comme du gain en capital et non du revenu d’intérêt, le premier étant généralement moins imposé que le second.

« Si le marché monte, vous pourriez constater une perte sur l’option d’achat que vous pouvez utiliser à des fins fiscales. Mais vous détenez les actions sous-jacentes qui ont pris de la valeur et vous pourriez ne pas réaliser le gain, selon la manière dont la perte sur l’option est couverte », dit-il.

Cela crée de petites réserves d’efficience fiscale en reconnaissant éventuellement plus de pertes que de gains, poursuit-il. « Les pertes potentielles sur les options éroderaient les gains en capital provenant des primes reçues, ce qui entraînerait un remboursement du capital sur les distributions versées. »

Croissance et variété sur le plan de l’ESG

L’appétit pour les FNB axés sur les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) reste relativement fort et l’innovation continuera sur ce plan.

Andres Rincon s’attend à ce qu’en 2022, l’actif sous gestion des FNB de type ESG double, comme ç’a été le cas en 2021. Il pense également que les manufacturiers continueront d’innover en créant d’autres FNB à zéro émission de CO2.

Le marché des FNB de type ESG devrait prendre de la maturité sur différents plans. Historiquement, ce marché intéressait davantage les investisseurs institutionnels, qui représentaient les trois quarts du volume de négociation de ces FNB, selon Valeurs mobilières TD. Ces investisseurs sophistiqués utilisaient les FNB comme substituts à leur exposition au marché en général, par exemple en passant d’un FNB axé sur le S&P 500 à un FNB calquant le même indice, mais dans sa version ESG.

Sur le plan de l’utilisation des FNB de type ESG par les conseillers, il y a encore un rattrapage à faire, selon les panélistes, mais les choses changent.

« On voit de plus en plus de conseillers qui adoptent l’ESG. Chez TD par exemple, il y a des conseillers qui offrent des portefeuilles modèles 100 % ESG à leurs clients, note Andres Rincon. C’est intéressant. On ne va pas voir un client en lui disant qu’on a un ou deux produits ESG ici ou là, mais plutôt une offre complète en ESG. »

Selon Mark Raes, pour favoriser la transition des conseillers vers l’ESG, les manufacturiers ont un travail d’éducation à faire. De plus, il juge que la consolidation dans ce marché se poursuivra et que les organismes de réglementation surveilleront avec davantage d’attention la nomenclature des fonds d’investissement de ce secteur.

Appétit pour le revenu

L’industrie des FNB devrait continuer de répondre au besoin des clients d’obtenir des rendements élevés de leurs fonds. Il en existe une panoplie sur le marché, dont des FNB d’obligations à rendement élevé, des FNB d’actions de dividendes élevés ou des FNB de ventes d’options d’achats couvertes sur sociétés.

Les fonds à rendement accru (enhanced yield products) représentent une innovation sur ce plan. Certains d’entre eux utilisent l’effet de levier afin de générer un rendement supérieur. La nouveauté provient du fait que l’effet de levier est à l’intérieur du fonds plutôt qu’à l’extérieur, rapporte Patrick McEntyre. Ceci comporte quelques avantages pour les conseillers.

« Dans les produits à rendement accru, avec de l’effet de levier, on a la facilité d’avoir un gestionnaire externe à qui on délègue la stratégie. Ces produits sont assortis d’un taux d’intérêt beaucoup plus intéressant que le taux auquel un investisseur pourrait obtenir de son côté. De plus, les conseillers n’ont pas à gérer les appels de marges et les éléments liés à liquidités de ces produits », résume-t-il.