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Donald Trump (2024), Photo : Gage Skidmore - sous licence Creative Commons CC0 1.0 (domaine public).

Victor Owen Schwartz a démarré son entreprise d’importation de vins et spiritueux aux États-Unis avec sa mère il y a près de 40 ans. Son entreprise VOS Selections, qu’il dirige avec sa fille, vend des boissons provenant de cinq continents ainsi que des produits américains.

Il est aujourd’hui le principal plaignant dans une affaire judiciaire qui pourrait entraver les efforts du président américain Donald Trump pour transformer le commerce mondial par le biais de droits de douane.

« J’ai été choqué du fait que ceux qui ont beaucoup plus de pouvoir et d’argent ne se soient pas mobilisés, a déclaré Victor Owen Schwartz mardi. Alors, quand j’ai eu l’occasion de parler au nom des petites entreprises américaines, je l’ai saisie. Je devais le faire. C’était un impératif moral. »

La Cour suprême des États-Unis doit entendre la semaine prochaine les arguments d’entreprises et d’États qui affirment que l’utilisation par Donald Trump d’une loi sur la sécurité nationale — l’International Emergency Economic Powers Act — pour imposer des droits de douane à presque tous les pays est illégale.

Cette loi, généralement désignée par l’acronyme IEEPA, confère au président américain le pouvoir de contrôler les transactions économiques après avoir déclaré l’état d’urgence. Elle ne mentionne pas le mot « tarif » et la Constitution américaine réserve au Congrès le pouvoir de fixer les impôts et les droits de douane.

L’audience combine deux affaires contestant les droits de douane dits « réciproques » de Donald Trump et les droits de douane liés au fentanyl instaurés contre le Canada, le Mexique et la Chine.

L’affaire a été portée devant la plus haute instance après que la Cour d’appel fédérale des États-Unis et la Cour de commerce international des États-Unis ont jugé que les droits de douane excédaient les pouvoirs conférés par l’IEEPA.

Les droits de douane du « Jour de la libération » de Donald Trump ont bouleversé l’économie mondiale. Le président avait alors déclaré l’état d’urgence en raison des déficits commerciaux persistants des États-Unis.

Le président américain a également déclaré l’état d’urgence aux frontières en lien avec le trafic de fentanyl pour imposer des droits de douane à l’échelle de l’économie canadienne. Les produits conformes à l’Accord commercial Canada-États-Unis-Mexique en sont exemptés.

La Cour à la rescousse

La semaine dernière, le président américain a suspendu les négociations commerciales avec le Canada et menacé d’une augmentation de 10 % des droits de douane après avoir été offensé par une publicité achetée par le gouvernement de l’Ontario. Cette dernière utilisait un enregistrement audio de l’ancien président Ronald Reagan qui critiquait les droits de douane.

« Cette FRAUDE avait pour seul but de nourrir l’espoir du Canada de voir la Cour suprême des États-Unis venir à son “secours” concernant les droits de douane, qu’il utilise depuis des années pour nuire aux États-Unis », a affirmé Donald Trump sur les réseaux sociaux le 25 octobre.

Le président Trump a lui-même accru la pression sur la Cour suprême en commentant à plusieurs reprises l’affaire, prévenant de terribles conséquences pour les États-Unis si son administration ne gagne pas. Il a même suggéré qu’il pourrait assister en personne à l’audience de la semaine prochaine.

Jeffrey Schwab, du Liberty Justice Center, qui représente Victor Owen Schwartz et les autres petites entreprises, a déclaré ne pas se préoccuper de savoir s’il pourrait assister à l’audience.

Me Schwab s’est dit confiant dans son argument qui stipule que l’IEEPA n’autorise pas les droits de douane. Même si c’était le cas, a-t-il ajouté, l’IEEPA est limitée aux menaces et aux urgences extraordinaires, et un déficit commercial ne compte pas.

« Le président affirme pouvoir imposer des droits de douane à n’importe quel pays, à n’importe quel prix, à tout moment et pour n’importe quelle raison. Cela signifie essentiellement qu’il soutient que l’IEEPA est un chèque en blanc », a-t-il déclaré.

Si la Cour suprême juge que l’IEEPA n’autorise pas les droits de douane, les droits de douane « réciproques » et ceux liés au fentanyl seraient jugés illégaux.

Mais la Cour pourrait rendre une décision partagée, car les droits de douane liés au fentanyl reposent sur une théorie juridique légèrement différente, a souligné Michael McConnell, professeur à la faculté de droit de Stanford.

Ancien juge à la Cour d’appel des États-Unis pour le dixième circuit, Michael McConnell a déclaré que cette affaire était historique ; « il s’agit d’une confrontation majeure entre l’exécutif et le Congrès ».

Qui paie le prix ?

La Tax Foundation a déclaré mardi que les droits de douane justifiés par l’IEEPA avaient fait augmenter le taux de droits de douane appliqué par les États-Unis de plus de 13 points de pourcentage et le taux de droits de douane effectif de plus de sept points de pourcentage.

Le groupe a ajouté que le gouvernement avait perçu plus de 88 milliards de dollars grâce aux droits de douane, des frais payés par les importateurs américains.

Scott Lincicome, vice-président de l’économie générale au Cato Institute, a soutenu que Donald Trump avait tort de croire qu’une défaite judiciaire entraînerait un préjudice économique majeur.

Il a affirmé que l’invalidation des droits de douane profiterait en réalité à l’économie américaine dans son ensemble, car elle éliminerait les taxes et l’énorme incertitude qu’ils ont engendrée.

Scott Lincicome a déclaré que l’IEEPA avait mis un « interrupteur à droits dans le bureau Ovale », empêchant les entreprises de planifier et d’investir.

Malgré les déclarations de l’administration Trump affirmant que les autres pays prennent véritablement la charge des droits de douane, Victor Owen Schwartz a affirmé que ce sont les entreprises américaines qui en payaient le prix. Son entreprise new-yorkaise est mise à mal par des droits d’importation dévastateurs, que Victor Owen Schwartz a décrits comme une « menace existentielle ».

Il a ajouté qu’il était difficile de gérer les 15 % de droits de douane qu’il paie sur les boissons alcoolisées en provenance de l’Union européenne tout en maintenant des prix raisonnables pour ses clients. Il a cessé tout achat en provenance d’Afrique du Sud, frappée de droits de douane de 30 %.