Une femme serrant la main à un homme.
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Les préjugés font partie de la nature humaine, toutefois ces derniers nuisent à votre pratique. Il est donc important que vous vous en rendiez compte rapidement pour les éliminer et mieux servir vos clients.

C’est le sujet qu’ont abordé Loredana Cappellano, Directrice, ventes de produits de gestion de patrimoine, Placements mondiaux Sun Life, et Catherine Patenaude, Vice-présidente associée, Équipe Conseil privilège à distance, Banque Nationale, lors du panel de Finance et investissement et Conseiller « Cassez les préjugés : améliorez votre façon de travailler avec vos clientes », présenté le 16 mars dernier.

Dirigées par Gouro Sall Diagne, Directrice principale de la surveillance de dépôts, Autorité des marchés financiers, les deux panélistes ont cerné les préjugés les plus courants et ont offert des conseils pratiques pour mieux s’en débarrasser.

Les préjugés perdurent

« Dans ma jeunesse, ma grand-mère disait que lorsque les femmes porteraient des pantalons, ça serait le chaos complet », voilà comment Loredana Cappellano a ouvert le panel. Si son anecdote paraît risible, ce préjugé ne date pas d’une période si lointaine. Et si aujourd’hui les femmes ont réussi à le dépasser et prouver que même si elles portent des pantalons, cela n’a pas entraîné la fin du monde, d’autres préjugés subsistent, notamment en planification financière.

L’experte de la Sun Life a ainsi cité un sondage de Merryll Lynch datant d’il y a quelques années. Selon celui-ci. Les conseillers commettent encore quatre erreurs dues aux préjugés. Ainsi, plusieurs partent encore du principe que :

  • l’homme prend les décisions financières dans une relation;
  • les femmes ont toutes de l’aversion aux risques;
  • les finances d’un couple sont toujours consolidées et que les investissements se font conjointement;
  • les femmes ont moins de connaissances que les hommes en matière de placement.

Même si l’étude montre que ces préjugés sont dépassés, plusieurs pensent encore ainsi. Et bien qu’ils ne le disent pas, cela se voit dans leur façon de s’adresser à leurs clients, leur façon de parler, ou encore sur leur visage. Ce sont autant de petites choses susceptibles de nuire à la relation, et c’est pour cela qu’il est important de s’attaquer rapidement à ces mythes.

Ces idées préconçues ne concernent pas uniquement le fait que l’on soit une femme ou un homme, a souligné Catherine Patenaude. L’emploi ou le domaine dans lequel évolue le client influence également la façon dont le conseiller va s’adresser à lui. Ainsi, beaucoup estiment encore que les clients issus du milieu artistique ne s’intéressent pas aux finances, et que tous les chefs d’entreprise aiment avant tout qu’on leur présente des chiffres. Toutefois, la connaissance et l’intérêt des clients sont vraiment propres à chacun et ne sont pas définis par leur genre, leur niveau d’études ou leur travail, souligne-t-elle.

Détourner les préjugés

« Pour détourner les préjugés, il faut apprendre à connaître les clients », assure Catherine Patenaude. Elle estime que la principale erreur commise par les conseillers est de vouloir imposer leur façon de faire.

Elle illustre son propos par la manière dont les conseillers communiquent. Selon elle, pour s’assurer de bien communiquer avec un client, il faut utiliser le moyen que ce dernier préfère et pour cela, rien de plus simple : il suffit de le lui demander. « Il faut trouver le bon moyen de communication pour que les gens prennent le temps d’écouter les conseillers », explique-t-elle.

Loredana Cappellano abonde dans son sens. Selon elle, il n’existe pas de bonne approche universelle, il faut au contraire savoir s’adapter. Au même titre que les besoins des clients ne sont pas les mêmes de l’un à l’autre. Dans le cas de ce qui distingue les hommes des femmes, par exemple, ces dernières ont généralement une espérance de vie plus longue que les hommes, et elles sont souvent moins longtemps actives sur le marché du travail, en raison notamment des congés de maternité. Le plan financier devra ainsi répondre à ces inquiétudes spécifiques à chacun.

Mais attention, les femmes ne constituent pas davantage une niche uniforme, elles représentent 50 % de la population. Et s’il est vrai que certaines femmes sont plus focalisées sur le long terme plus que les hommes, sur la santé financière et les enfants, ce n’est pas le cas pour chacune, rappelle Catherine Patenaude. « Il faut vous adapter aux clients! », martèle l’experte.

Ceci est vrai pour tout. Notamment en matière d’apprentissage. Tous les clients n’absorbent pas l’information de la même manière. L’apprentissage dépend d’une foule d’éléments. Pour s’assurer que le client va vous suivre, le mieux est de discuter de ses besoins et de ses intérêts, de « capter son attention », assure Catherine Patenaude.

« Il faut prendre des sujets qui vont droit au cœur : ses rêves et préoccupations », recommande-t-elle. En parlant de ceci, il sera plus facile de l’intéresser et de le comprendre. Il faut également rester attentif au client. Si celui-ci fronce les sourcils, c’est peut-être qu’il n’a pas tout compris. Les silences sont également très importants pour laisser le temps au client d’assimiler les informations.

« Il ne faut pas tenter de remplir les silences, car c’est inconfortable », abonde Loredana Cappellano. Être patient et à l’écoute est très important. Lorsqu’un client met du temps à répondre à une question, la meilleure solution ne consiste pas à lui suggérer des réponses, au contraire. Cela nous empêche de percevoir ce qu’il pense ou comprend réellement. L’experte de la Sun Life suggère donc de privilégier les questions ouvertes, car elles laissent davantage de place au client pour parler de lui et de sa vie.

« Afin de mieux comprendre et communiquer avec les clients, les conseillers ne devraient pas limiter le discours à la planification financière. Il faut que la relation soit plus profonde », ajoute-t-elle.

L’experte de la Banque Nationale recommande aussi de limiter la durée des rencontres. « Il faut essayer dans la mesure du possible de faire des rencontres plus courtes », afin de s’assurer que le client ait une capacité de concentration maximum.

Servir des clients plus divers

Aucune recherche spécifique ne prouve qu’une femme préfère travailler avec des femmes, rappelle Catherine Patenaude. Ainsi, peu importe votre genre, vous pourrez tirer votre épingle du jeu à condition que votre approche corresponde au client et que vous teniez compte de ses particularités.

Une autre façon d’avoir une clientèle diversifiée consiste également à avoir une équipe diversifiée en matière des compétences, d’expertises, de genre, et aussi de la culture. La diversité est importante pour une entreprise, c’est pour cela que les institutions travaillent fort pour augmenter le pourcentage de femmes dans leurs rangs, tant au niveau de leurs employés qu’au niveau de la direction. Cela permet d’ouvrir les façons de faire et de penser.

Loredana Cappellano suggère également de montrer que l’on veut s’occuper de tel ou tel segment de clientèle sur les médias sociaux. « Si vous cherchez à avoir davantage de femmes dans votre clientèle, publiez des ressources financières dédiées aux femmes ou partagez des articles qui s’adressent avant tout à elles », donne-t-elle comme exemples.

Se préparer au transfert de patrimoine

La question est largement discutée dans l’industrie, rapporte Catherine Patenaude, mais elle a également son importance auprès des clients. Ainsi, à la Banque Nationale, les conseillers questionnent souvent les clients pour connaître les questions d’intérêt dont ces derniers aimeraient parler. Parmi les réponses les plus fréquentes, la planification successorale figure en bonne position.

Catherine Patenaude estime qu’il y a là une véritable opportunité. Pourquoi ne pas proposer une rencontre familiale afin de discuter de planification successorale? Cela permet ainsi de rencontrer la prochaine génération et de tisser déjà un lien avec elle. « Bonne chance après pour la compétition pour récupérer le dossier », assure-t-elle.

« On dit toujours que si la première fois que vous rencontrez l’enfant du client, c’est aux funérailles du parent, c’est déjà trop tard, l’appuie Loredana Cappellano. Prenez le temps de connaître les enfants de vos clients pour fidéliser la famille au complet. »

Rencontrer les enfants des clients vous permet également d’en apprendre davantage sur votre client lui-même et de montrer que vous vous intéressez à sa vie. Cela renforce la relation de confiance en plus de vous offrir de belles opportunités de rencontres.

En conclusion, pour éviter les préjugés et avoir une clientèle diversifiée, soyez ouverts et attentifs au client. Oubliez les questions toutes faites et laissez vos clients s’ouvrir à vous pour mieux répondre à ses inquiétudes et à ses besoins. Lors des rencontres à plusieurs, donnez autant d’attention à chacun des participants et assurez-vous de bien entendre les besoins de tous! En bref : adaptez-vous aux clients.