L’AMF a publié, le 7 janvier 2016, un avis rappelant que « toute rémunération générée par des activités en valeurs mobilières doit obligatoirement être versée à une personne (société ou individu) inscrite en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières (LVM) ».
C’est-à-dire que toute rémunération qui est générée pour une discipline de valeur mobilière, donc l’épargne collective dans le cas qui nous occupe, ne peut être versée qu’à deux personnes, soit le courtier inscrit ou le représentant de courtier inscrit. Est-ce à dire que cet avis disqualifie dorénavant un cabinet inscrit sous la Loi sur la distribution de produits et services financiers (LDPSF) ?
Les succursales
Au Québec, la structure de nombreux courtiers indépendants comprend l’usage de succursales. Ces succursales offrent des services administratifs aux représentants et aux courtiers, mais sans être des représentants de courtiers inscrits, ni davantage des courtiers inscrits. L’avis émis par l’AMF fait-il état d’une interprétation interdisant la rémunération effectuée à ces succursales pour les services quelles rendent ?
Jusqu’ici, l’interprétation de l’AMF sur la législation et la réglementation touchant le rapport aux succursales ne soulevait aucun problème. L’avis est pour le moins ambigu sur la question et mériterait d’être précisé. Au moment de mettre en ligne le présent article, l’AMF n’avait pas répondu aux questions de Finances et Investissement sur le sujet.
Incorporation des représentants
L’enjeu qui est ciblé par l’AMF avec cet avis demeure néanmoins celui de l‘incorporation des représentants.
« Il s’agit d’un débat tout à fait valable qu’il faudrait régler une bonne fois pour toutes. Tout le monde a le droit de s’incorporer, sauf les disciplines de valeur mobilière. C’est inéquitable et ça crée une distorsion dans le marché », mentionne Maxime Gauthier, chef de la conformité et représentant en épargne collective chez Mérici Services financiers.
Daniel Bissonnette, chef de la conformité chez Planifax abonde dans le même sens. « Lorsque requis, l’incorporation est un droit, c’est-à-dire le droit de gérer ses affaires pour réduire son niveau de taxation personnel afin de permettre une meilleure utilisation de ces liquidités pour mieux servir nos clients ».
Toutes les provinces au Canada ont reconnu ce fait, rappelle Daniel Bissonette, « sauf deux retardataires, le Québec et l’Alberta », prend-il soin, d’ajouter.
Pour Maxime Gauthier, la révision de la LDPSF qui a présentement court pourrait être l’occasion d’aborder la question de l’incorporation des représentants. Il estime qu’il serait dans l’intérêt public d’aborder cette question, et d’autres, qui touchent l’industrie des services financiers au Québec dans sa globalité.
« Le législateur devrait réfléchir au fait que bien qu’il y ait deux lois habilitantes, la LVM et la LDPSF, l’industrie est tissée serrée et des maillages sont faits. Peut-être pourrait-on profiter de la révision de la LDPSF pour se demander s’il n’y a pas également des modifications à la LVM à apporter ou à tout le moins, songer à certaines harmonisations entre les deux lois ? »
Pour Maxime Gauthier, il serait intéressant que le gouvernement, les régulateurs, et l’industrie tiennent un forum afin de trouver des solutions intelligentes au bénéfice des clients, plutôt que de s’en remettre constamment à « des séries interminables de changements règlementaires ou législatifs ».
« Dans le reste du Canada, les représentants en épargne collective peuvent incorporer leur pratique. Au Québec, le frein qui existe, c’est la LVM. Est-ce que ce frein à raison d’exister, se questionne Maxime Gauthier. Au Québec, à peu près tout ce qu’il y a de professionnel a le droit de s’incorporer, sauf les disciplines sous les valeurs mobilières. Je comprends qu’il peut y avoir un enjeu de recettes fiscales pour le gouvernement, mais le gouvernement ne doit pas s’arrêter à la question de recette et de débit, il doit aussi prendre en compte la question d’équité citoyenne, y compris dans le cas des citoyens corporatifs ».