N'encadrez pas trop les honoraires, dit l'ACCVM
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Voilà le message qu’a livré Ian Russell, président et chef de la direction de l’Association canadienne du commerce des valeurs mobilières (ACCVM), dans une lettre adressée à l’industrie et aux régulateurs.

Il répond ainsi à l’avis de l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM) faisant état de l’examen des conflits d’intérêts liés à la rémunération des conseillers assujettis à l’encadrement de l’OCRCVM. Le régulateur examine actuellement la Règle 42 qui encadre ces conflits.

Dans ce document, ce régulateur soulève différents problèmes : la communication inadéquate (floue ou absente) des conflits d’intérêts liés à la rémunération au client ; la propension des firmes à communiquer les conflits sans d’abord veiller à les régler au mieux des intérêts du client ou à les éviter carrément; l’absence d’« examen » ou d’attention de la part des firmes; le manque de surveillance et de supervision adéquates des risques de conflits propres aux comptes à honoraires et aux comptes gérés à l’interne (comptes maison).

L’OCRCVM détaille des risques potentiels pour les clients, dont un biais en faveur des comptes à honoraires. Selon l’avis, la plupart des courtiers assujettis offrent le montant maximal prévu par la grille de rémunération aux représentants qui tirent des revenus des comptes à honoraires : « En plus de ce paiement maximal, bon nombre de courtiers offrent des incitatifs supplémentaires aux représentants sous forme de primes de rendement liées aux actifs à honoraires. Nous craignons que cela favorise un transfert vers les comptes à honoraires, même si ce n’est pas dans l’intérêt des clients. »

Dans plusieurs cas, les clients titulaires de comptes à honoraires payaient des honoraires supplémentaires, ou le conseiller touchait une rémunération supplémentaire, en sus des honoraires basés sur l’actif géré qui s’appliquent normalement à ces comptes. Ce coût additionnel prenait la forme d’honoraires forfaitaires, de commissions sur chaque opération ou de commissions intégrées.

Dans les cas où le courtier recourt à des processus pour exclure les actifs à rémunération intégrée du calcul des honoraires, pour éviter la double rémunération, il ressort de nombreuses inspections de l’OCRCVM que ces processus sont généralement manuels et sujets à l’erreur.

Réponse de l’ACCVM

Dans sa lettre, Ian Russell tente d’expliquer le défi pour les courtiers de bien gérer ces conflits d’intérêts : « Le fait – assez répandu – de s’en remettre à la communication pour traiter de tels conflits ne devrait pas surprendre, vu la complexité des conflits en litige et la variété des mécanismes de règlement et d’atténuation. Cette atténuation des conflits a peut-être déjà été un problème pour les firmes, étant donné le peu de lignes directrices provenant de l’industrie quant au traitement de conflits spécifiques. »

Quant à l’atténuation du conflit lié aux comptes à honoraire, Ian Russell invite les régulateurs à bien comprendre l’ensemble des services liés à ces comptes.

« Toute l’attention de l’OCRCVM se porte ici sur les activités transactionnelles des comptes à honoraires et des comptes gérés et sur la pertinence des frais s’y rapportant. Or, il se peut aussi, dans un tel contexte, que le conflit lié aux frais ait été réglé […] aux termes des obligations en matière de connaissance du client et de convenance, et aussi selon le bien-fondé, pour le client, de son compte », lit-on dans la lettre de Ian Russell.

Il souligne que plusieurs de ces comptes à honoraires offrent de la planification financière et de la déclaration fiscale. Les frais d’opérations et de compensations, reliés aux comptes de transactions à titre de fonds, entrent et sortent fréquemment de ces comptes.

La plupart des firmes surveillent à l’interne les activités transactionnelles et de transferts de fonds des comptes à honoraires, entre autres indicateurs, afin de s’assurer que les frais et services correspondent, selon Ian Russell : « Une communication détaillée des services prodigués aux comptes à honoraires et de la documentation sur la convenance des décisions s’y rapportant est la bonne pratique à adopter. »

« Ce qui est source de préoccupation, c’est que le zèle déployé dans l’analyse du volume transactionnel de comptes à honoraires ciblés puisse ouvrir la voie à de coûteuses « enquêtes exploratoires » et mener à d’inefficaces et inutiles examens de conformité », ajoute-t-il.

Ian Russell invite l’OCRCVM à la prudence et au pragmatisme lorsqu’ils évalueront la Règle 42 sur les conflits d’intérêts. Selon lui, l’OCRCVM devrait examiner la Règle 42 vis-à-vis de ses autres règles liées aux conflits afin de voir comment la réglementation et les lignes directrices pourraient être simplifiées et propose au régulateur de se poser ces questions : « La Règle 42 crée-t-elle un chevauchement d’exigences? Les firmes qui se conforment à la nouvelle règle font-elles l’expérience de complications inutiles ou de coûts excessifs? Des lignes directrices supplémentaires en matière de conformité sont-elles nécessaires? »