Les frais oubliés
bowie15/ 123 RF Banque d'images

Le RFG, précise le spécialiste, fait partie des dépenses d’exploitation inscrites dans l’état des résultats. Les FT, eux, sont inclus dans les coûts d’achat des actions et on les trouve dans le bilan.

Frais médians de 0,08 %

Les FT sont liés à deux facteurs clés, précise une étude de James Gauthier, directeur, recherche sur les fonds, chez Scotia Gestion de patrimoine (The Trading Expense Ratio and the Total Cost of Fund Ownership: 2016 Edition) : le taux de roulement des actifs d’un fonds et sa taille.

Plus le roulement est intense, et moins l’actif du fonds est élevé (de sorte qu’il y a moins d’économies d’échelle), plus les frais de transaction seront élevés.

Dans son étude portant sur près de 250 fonds provenant de 17 sociétés de fonds canadiennes, James Gauthier constate qu’en moyenne, les FT sont de 12 points de base (0,12 %) et le taux de roulement s’établit à 53 %. Cela implique que les fonds conservent leurs titres environ deux ans en moyenne, signale Dan Hallett.

Dans ce même échantillon de fonds, le RFG moyen est de 2,42 %. Cela veut dire que le coût total de détention (CTD) s’élève à 2,54 % (soit 2,42 % + 0,12 %).

Par ailleurs, la médiane des FT s’établit à 0,08 %, mais la médiane des RFG est légèrement plus élevée que la moyenne, à 2,45 %.

Frais élevés, faibles résultats

James Gauthier a cherché à établir si des FT plus bas ou plus élevés se traduisent de façon sensible par une meilleure performance.

Après tout, on pourrait croire qu’un fonds qui négocie beaucoup d’actifs justifie cette activité par des rendements plus élevés. À l’autre extrêmité du spectre, un fonds qui est peu actif pourrait lui aussi prétendre à un rendement plus élevé.

L’échantillon de l’étude découvre un biais légèrement négatif à l’endroit des fonds qui exigent des FT plus élevés.

Dans un classement des 20 fonds présentant les FT les plus élevés pour des périodes d’un, trois et cinq ans, seulement 42 % ont affiché un rendement supérieur à la médiane au cours d’une des trois périodes considérées. Et seulement quatre ont mieux performé que la médiane au cours des trois périodes.

Les FT de ces fonds allaient de 24 à 81 points de base (pb), pour un CTD variant de 2,84 % à 4 %.

Le Fonds aurifère et de minéraux précieux Sprott trône en tête de ce classement des fonds les plus coûteux. Son CTD de 4 % est composé tant du RFG (3,19 %) que du FT (0,81 %) le plus élevé des 20 fonds. Pourtant, il se classe dans le dernier quartile pour sa performance sur cinq ans.

En moyenne, ces 20 fonds ont eu un taux de roulement de 139 % au cours de l’exercice le plus récent. Celui-ci atteint même 303 % chez les plus actifs.

« On ne peut pas expliquer le parcours des fonds les moins performants uniquement par des frais de transaction importants, mais ceux-ci n’ont certainement pas aidé les choses », observe James Gauthier.

Frais bas, résultats guère meilleurs

James Gauthier a fait le même exercice pour les 20 fonds affichant les plus bas FT. Leur performance est à peine meilleure…

En effet, seulement 45 % des fonds ont affiché un rendement supérieur à la médiane au cours d’une des trois périodes considérées. Par contre, neuf ont mieux performé que la médiane au cours des trois périodes.

Dans le cas de ces fonds, les FT n’atteignent que 2 ou 3 pb, et le RFG moyen est de 2,32 %. Cela s’explique en partie par le fait que le classement comprend de nombreux fonds équilibrés et de revenus, où les frais sont généralement plus bas.

Il faut cependant prendre garde de trop généraliser : un fonds de croissance comme le Mackenzie Croissance américaine présente un CTD de 2,55 % (RFG de 2,52 % + FT de 0,03 %).

Les résultats de l’étude sont donc mitigés. Les FT ont une importance toute relative. Quand ils sont élevés, ils ne sont pas justifiés par une plus haute performance. Ils ne font qu’ajouter au CTD, sans garantir aucunement une surperformance.

À l’opposé, quand les FT sont bas, il n’en résulte pas une performance nettement meilleure, bien que l’échantillon de James Gauthier confère une légère supériorité à ces fonds.

Respecter sa philosophie

Tout bien considéré, « l’investisseur moyen n’a pas à se soucier des frais de transaction », juge William André Nadeau, vice-président et gestionnaire de portefeuille chez Tactex Gestion d’actifs.

Il est vrai reconnaît-il, « que les FT n’apparaissent nulle part ; pourtant, ils ne font que diminuer le rendement ».

Mais ce qui compte au premier chef, c’est la philosophie du gestionnaire. Si elle exige qu’il négocie beaucoup et lui procure des résultats supérieurs, tant mieux. Sinon, tant pis.

« J’aime mieux payer quelques frais de plus, mais aller chercher de 10 à 15 fois l’équivalent en gain supplémentaire, dit-il. Il faut que le gestionnaire respecte sa philosophie. C’est elle qui mène. »

Par contre, les FT ont un effet sensible pour les titres négociés sur les marchés étrangers, notamment en Europe et au Japon, précise William André Nadeau.

« On peut y payer des frais de 50 points de base et, souvent, des taxes s’ajoutent, notamment en Angleterre. Là, ma philosophie de gestion n’a pas le choix de tenir compte des frais de transaction », précise-t-il.

« Quand j’achète des titres en Europe, ce n’est certainement pas pour spéculer. Si je vends, j’ai de bonnes raisons de le faire. Mais en Amérique du Nord, les frais de transaction sont si bas qu’on ne doit pas tenir compte de ce facteur », soutient-il.