Voyons tout d’abord en quoi consiste le nouveau régime de retraite de nos voisins de l’Est.

En décembre 2010, le gouvernement du Nouveau-Brunswick a lancé un processus de réflexion en mettant sur pied un groupe de travail sur la protection des régimes de retraite.

Moins de deux ans plus tard, le groupe a préconisé un nouveau modèle, dit à risques partagés, qui a été accepté par les autorités gouvernementales.

Le point de départ de la réflexion était le suivant : les déficits sont déjà trop élevés, et les contribuables ne pourront pas assumer d’autres hausses d’impôt afin de retrouver l’équilibre.

À l’heure actuelle, le déficit du régime de la fonction publique du Nouveau-Brunswick est d’environ 1 G$. Jusqu’à tout récemment, pour chaque dollar de cotisation versé par les employés, le gouvernement de cette province contribuait 2,50 $ au régime. Une situation qualifiée, au début de mai, de «non viable pour l’avenir» par trois dirigeants syndicaux, dont la présidente du Syndicat du Nouveau-Brunswick (http://tinyurl.com/m52vf7u).

Quelles sont maintenant les solutions ?

D’emblée, le groupe de travail a écarté la possibilité de l’augmentation massive des taux de cotisations. Selon le groupe, de telles hausses, même si elles se produisaient, ne régleraient rien à long terme. Elles engendreraient des injustices intergénérationnelles, car elles ne viendraient en aide qu’aux retraités actuels. De plus, en raison de la faiblesse des taux de rendement, de leur volatilité et de l’allongement de l’espérance de vie, les employés actuels de l’État auraient probablement affaire au même type de situation au moment de leur retraite, à savoir un déficit de leur propre caisse de retraite.

Le groupe a également rejeté l’éventualité de diminutions radicales des futures prestations. Cependant, le groupe s’est réservé la possibilité de «modestes» augmentations des cotisations et de très légères baisses des prestations.

Indexation conditionnelle

Toutefois, sa recommandation centrale est la suspension de l’indexation des prestations de retraite en cas d’insuffisance de fonds. Une solution qui n’aurait rien de permanent, puisque les paiements en retard seraient effectués dès que les rendements des placements le permettraient.

C’est de là que vient le sens de l’expression «régime à risques partagés».

Prenons l’exemple des employés municipaux de la Ville de Fredericton. Leurs syndicats viennent d’adopter un régime de retraite à risques partagés. Selon les autorités municipales, les ajustements au coût de la vie seront payés à condition que la capitalisation du régime soit supérieure d’au moins 5 % à son seuil de référence. Selon les projections actuarielles, sur une période de 20 ans, ces ajustements seront payés trois fois sur quatre. Les possibilités de réduction de prestations sont de 2,5 %.

Autrement dit, ce régime ne donne pas de garanties d’augmentation en fonction du coût de la vie, mais plutôt des probabilités élevées. Il y a également une possibilité très mince (2,5 %) de réduction future des prestations. Cependant, les rentes sont mieux sécurisées à long terme.

Une solution pour le Québec ?

Est-ce une voie possible pour le Québec ? L’actuaire Richard Bourget, de Normandin Beaudry, est de cet avis. «Le statu quo n’est plus une option», dit-il.

Son collègue Serge Charbonneau, de Morneau Shepell, renchérit. «Les régimes de retraite des fonctionnaires sont insoutenables», dit-il, citant en exemple les municipalités et les universités où les régimes de retraite représenteraient jusqu’à 30 % de la masse salariale.

Tous deux voient dans cette réforme un moyen de tirer le Québec de sa torpeur en ce qui concerne l’avenir des régimes de retraite.

Selon Serge Charbonneau, l’occasion est bonne de remettre en avant une proposition du Rapport d’Amours : les régimes à prestation cible. Leurs cotisations sont prédéterminées, mais les prestations peuvent être réduites si les conditions sont mauvaises.

Or, même s’il a été appuyé par d’importants syndicats, le nouveau régime à risques partagés du Nouveau-Brunswick ne passe pas comme une lettre à la poste. Le quotidien L’Acadie Nouvelle fait état d’une «levée de boucliers» de la part des retraités du secteur public.