Concept de processeur d’intelligence artificielle. Baie de Big Data IA.
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Face à une explosion des pénalités réglementaires, les institutions financières se tournent de plus en plus vers les technologies de conformité.

Selon McKinsey, ce marché en pleine expansion devrait croître de 14 % d’ici 2028, porté par la complexification des exigences et l’essor de solutions spécialisées.

Les amendes liées à la non-conformité atteignent des sommets. Rien qu’en 2024, les banques à travers le monde ont payé 19,3 milliards de dollars en sanctions réglementaires, un record historique, selon Fintech Global. Dans ce contexte, les institutions financières intensifient leurs investissements dans la technologie réglementaire, ou RegTech, afin d’automatiser leurs processus de conformité et de réduire leurs risques opérationnels.

Née dans le sillage de la crise financière de 2008, la RegTech combine intelligence artificielle (IA), apprentissage automatique, informatique nuagique et biométrie pour aider les banques à répondre à des réglementations toujours plus nombreuses et exigeantes.

Alors que le terme s’est imposé dès 2016, le secteur mondial compte aujourd’hui près de 1 000 entreprises, des start-up spécialisées aux grands fournisseurs de services informatiques.

Quatre grandes catégories d’applications

McKinsey distingue quatre grands champs d’application de la RegTech :

  • La gestion des risques financiers et du capital. Les outils d’actif-passif (ALM) permettent aux banques d’équilibrer liquidités, dépôts et financements tout en se conformant à Bâle III. Certaines institutions européennes recourent déjà à des solutions de planification dynamique pour anticiper l’impact de hausses de taux ou de crises de liquidité.
  • La gouvernance, le risque et la conformité (GRC). Dans un environnement où une banque multinationale peut être soumise à plusieurs centaines de textes réglementaires, la RegTech permet de cartographier automatiquement les obligations et de les mettre en correspondance avec les politiques internes. Une banque américaine a ainsi automatisé la quasi-totalité de son processus de conformité et atteint un taux de conformité supérieur à 95 %.
  • La cybersécurité. Plus de 150 000 entreprises européennes devront bientôt se conformer à la directive NIS2 (Network and Information Security 2) qui vise à renforcer la cybersécurité au sein de l’Union européenne. Elle impose notamment des exigences plus strictes en matière de gestion des risques et de notification des incidents. Pa anticipation, certaines institutions déploient des solutions RegTech capables de comparer leurs systèmes actuels aux nouvelles normes et d’identifier les écarts à corriger.
  • La lutte contre la criminalité financière. Les solutions combinant IA et règles transactionnelles permettent de mieux détecter le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Par exemple, une grande banque latino-américaine a amélioré son taux de détection des fraudes à plus de 90 % grâce à la biométrie comportementale, tout en réduisant de 66 % ses faux positifs.

Des cas concrets

Les exemples d’adoption se multiplient :

  • En Europe, plusieurs institutions déploient des RegTech spécialisées pour répondre aux obligations liées aux rapports ESG (environnement, social et gouvernance), afin de suivre et vérifier les données de durabilité exigées par la réglementation européenne sur la finance durable.
  • Aux États-Unis, les solutions de surveillance automatisée des transactions sont devenues centrales pour répondre aux exigences de la loi sur le secret bancaire. Une banque a ainsi réduit drastiquement sa dépendance à des cabinets juridiques externes en intégrant un logiciel de mappage réglementaire.
  • En Amérique latine, la prévention de la fraude en temps réel, grâce à l’analyse comportementale, a permis d’accroître la confiance des clients tout en réduisant les pertes financières.
  • En Asie, certaines fintechs bancaires adoptent des solutions RegTech modulaires afin de répondre à des réglementations locales très variables d’un pays à l’autre, tout en contrôlant leurs coûts.

Des perspectives de croissance soutenues

Selon McKinsey, la demande en RegTech continuera d’être alimentée par :

  • des réglementations plus strictes et fragmentées,
  • la volonté des institutions d’éviter des sanctions coûteuses,
  • et l’accélération de la numérisation et du recours à l’infonuagique.

Si l’Amérique du Nord et l’Europe concentrent aujourd’hui l’essentiel du marché (avec 81 des 100 premières entreprises qui y ont leur siège social), le Moyen-Orient et l’Afrique devraient connaître une croissance plus rapide grâce à un taux de pénétration encore faible.

Enjeux pour les investisseurs et les institutions

Pour les investisseurs en capital-investissement, le secteur présente un double visage : des cycles de vente longs, mais des revenus récurrents et fidélisants. McKinsey souligne toutefois la nécessité d’évaluer finement la logique réglementaire sous-jacente à chaque solution, car des évolutions géopolitiques pourraient en réduire la pertinence.

Quant aux institutions financières, elles doivent veiller à la qualité de leurs données et envisager des combinaisons de solutions spécialisées plutôt qu’un modèle unique « tout-en-un ».