Külli Tamm, une conférencière de Swiss Re, reconnaît que le manque d’intérêt dans l’assurance en soins de longue durée est un phénomène mondial, avec une pénétration moyenne de 2 %.
Selon elle, il faudrait changer le nom de ce type d’assurance, trouver une formulation plus positive, par exemple «assurance pour maintenir son style de vie» ou «assurance pour garantir l’indépendance».
Et il y a d’autres approches. En Corée du Sud, au lieu d’offrir une police d’assurance pour une série de 25 maladies graves, les assureurs proposent une police d’assurance plus simple pour le cancer. «Ces produits coûtent beaucoup moins cher et ils sont très populaires.»
Une autre approche est celle des produits hybrides, entre autres des combinaisons de polices d’assurance de soins de longue durée, d’assurance vie, d’assurance maladies graves ou d’un régime d’épargne-retraite et une assurance maladies graves, remarque-t-elle : «Les consommateurs tirent un plus grand avantage de ces hybrides par rapport aux produits traditionnels de soins de longue durée dans le cas où ces soins ne sont pas nécessaires : on peut toujours toucher des prestations grâce à la composante de l’assurance vie ou de l’épargne-retraite».
Grâce aux polices hybrides, le client obtient un bénéfice tangible, et pour sa part, l’assureur a plus de facilité à fixer le prix d’un produit qui compte plus d’une couverture. De plus, le client n’a pas l’impression qu’il paie les primes pendant toutes ces années sans bénéfice.
Avantage aux conseillers âgés
Külli Tamm note qu’en règle générale, les conseillers plus âgés réussissent mieux à vendre ces produits que leurs collègues plus jeunes.
«Les gens ne sont pas à l’aise par rapport à leur fin de vie, explique-t-elle. C’est un peu plus facile pour ces conseillers de faire une connexion.»
Un conseiller plus mûr peut avoir traversé une situation où ses parents avaient besoin de soins, selon Külli Tamm, et il a l’expérience qui lui permettra de surmonter les trois facteurs de résistance à l’achat de ses produits d’assurance : le manque de sensibilisation à la problématique de fin de vie, le coût de l’assurance et les idées reçues.
«Les gens sous-estiment les risques et surestiment la capacité de payer de l’État. Le produit est très coûteux, et ils ont tendance à remettre le problème à plus tard». Or, un conseiller averti, même plus jeune, peut surmonter de telles difficultés et apprendre à conclure ce genre de ventes.
Changer le marketing
Guy Couture est d’accord : il faut modifier l’approche et le nom de ce produit.
Déjà Manuvie et d’autres compagnies offrent l’assurance de soins de longue durée en combinaison avec l’assurance maladies graves. Après une période prédéterminée, 20 ans par exemple, et en l’absence d’une maladie grave, l’assurance maladies graves est transformée en assurance de soins de longue durée.
Il admet, sondage à l’appui, que l’assurance de soins de longue durée ou l’assurance maladies graves n’apparaissent même pas sur l’écran radar des clients. Ce sondage, qui remonte à 2007, est toujours d’actualité, et a mis en lumière «la confusion et l’ignorance» qui régnaient chez les 1 008 répondants de 35 à 75 ans dont le revenu annuel par ménage était supérieur à 50 000 $.
Par exemple, la moitié présumait à tort que l’assurance collective couvrait les soins de longue durée.
Martin Boyer, professeur en finance et assurance à HEC Montréal, évalue qu’au cours des 35 prochaines années, la facture des soins de longue durée au Canada s’élèvera à 1 200 G$. Il soutient que les Canadiens croient en «la générosité des gouvernements et de leurs fonds de retraite,» au lieu de miser sur l’assurance pour leurs soins à long terme. Pourtant, on évalue que les programmes gouvernementaux ne prévoient couvrir qu’environ la moitié du coût réel de ces dépenses, soit 600 G$.
L’augmentation de l’offre de soins de longue durée à domicile est une bonne solution, croit Külli Tamm, même si cette approche nécessite des investissements en équipements adaptés pour aider à la mobilité, aux soins d’hygiène et aux autres tâches. Les soins à domicile sont «peut-être plus efficaces et peuvent même améliorer la qualité de vie.»
Cependant, comme l’a noté Pierre-Carl Michaud, professeur d’économie à l’École des sciences de la gestion de l’UQAM, au cours du symposium, même avec plus de soins à domicile, à la fin de notre vie, nous risquons de passer entre 3,52 ans et 4,56 ans dans une institution, au coût d’environ 3 000 $ par mois.