L'Europe vue de très haut.
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Après une année record de revenus et de bénéfices en 2019, l’industrie européenne de la gestion d’actifs a dû faire face à des conditions inédites imposées par la pandémie. On peut dire qu’elle a bien résisté aux chocs puisqu’elle a terminé l’année avec un autre record de 25,2 milliards d’euros d’actifs sous gestion, en hausse de 5 % par rapport à 2019, révèle un récent rapport de McKinsey.

Il reste que la crise sanitaire est venue mettre en lumière certaines lacunes de l’industrie, mais aussi des opportunités de croissance. Dans son rapport, McKinsey identifie des tendances structurelles, certaines plus récentes que d’autres, mais qui toutes s’accélèrent. Ces dernières vont façonner le paysage européen de la gestion d’actifs et leurs impacts pour les gestionnaires.

Politique monétaire accommodante

Cette politique prévaut depuis la crise financière de 2008 et s’est maintenue durant la crise de la COVID-19. Cela a toutefois été insuffisant pour empêcher une récession.

Selon de récentes enquêtes de McKinsey, une véritable reprise en Europe n’est pas attendue avant 2023. Ce n’est qu’à ce moment qu’il pourrait y avoir un resserrement de la politique monétaire.

Les taux d’intérêt bas devraient donc perdurer jusque-là. Cela aura pour effet de soutenir les marchés d’actions tout en réduisant les rendements des titres à revenu fixe.

En conséquence, les sociétés de gestion d’actifs verront probablement de nouvelles baisses d’intérêt pour les titres à revenu fixe parmi les investisseurs de détail.

Intervention gouvernementale

Les mesures de relance budgétaire adoptées par les pays, même si elles étaient nécessaires pour assurer des liquidités à court terme aux particuliers et aux entreprises afin de passer à travers la crise, auront un impact sur les déficits publics. Dans l’Union européenne, ils devraient augmenter pour atteindre 95 % du PIB d’ici la fin de 2021.

L’intervention publique devrait se poursuivre afin d’assurer la reprise économique. Par conséquent, les gestionnaires d’actifs doivent évaluer les conséquences potentielles lors de l’élaboration de stratégies de portefeuille, y compris les augmentations possibles du contrôle de l’État sur les entreprises.

Un focus sur l’ESG

L’investissement durable gagne en popularité. Or, l’Europe compte plus de fonds considérés comme « durables » que toute autre industrie de gestion d’actifs dans le monde. De fait, le volume d’émission d’obligations ESG y est deux fois plus élevé que celui des États-Unis et de l’Asie réunis.

Dans l’économie de l’après-COVID-19, les gestionnaires d’actifs auraient l’opportunité de montrer leur leadership en guidant l’Europe vers une voie encore plus verte et une durabilité améliorée. Étant donné la part importante de investissements verts et numériques dans les plans de relance et de résilience des États membres de l’Union européenne, il y aura place pour de nouveaux produits et des solutions innovantes.

Passer au numérique

Le travail à distance et les autres changements dans les pratiques de travail (vidéoconférence, par exemple) ne sont peut-être que le début d’une perturbation technologique généralisée, prédit McKinsey.

La pandémie a également déclenché un changement radical dans les attitudes des clients envers les plateformes numériques. En Europe, le taux d’adoption du numérique dans tous les produits bancaires est passé de 55 à 77% pendant la COVID-19.

L’accélération de ce changement de comportements envers les outils numériques a le potentiel de perturber l’économie mondiale, croient les auteurs de l’étude. Le passage au numérique peut aussi accroître l’incertitude sur les marchés boursiers alors que les entreprises technologiques étendent leur avance par rapport à d’autres secteurs accusant un retard. Cela va obliger les gestionnaires d’actifs à ajuster leurs avoirs en portefeuille en faveur des entreprises plus dynamiques.

Régionalisation de l’économie

La mondialisation de l’économie semble être à un tournant alors que les entreprises rapatrient des activités de production pour, entre autres, réduire les risques sur leur chaîne d’approvisionnement, une tendance renforcée par la pandémie.

Cette situation a entraîné une forte baisse des flux commerciaux mondiaux. Selon McKinsey, la régionalisation pourrait aussi impacter les flux financiers. La démographie et les attentes variables des investisseurs mettront de la pression sur les gestionnaires pour qu’ils proposent des produits plus localisés et ciblés.