Une main d'homme d'affaires passant un témoin à une autre main d'homme d'affaires.
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Certaines déclarations fiscales pourraient comporter cette année un enjeu important pour les clients qui ont transmis leur entreprise à un enfant, alors que le Projet de loi C-208 (PL C-208) est entré en vigueur le 29 juin dernier.

Certaines nouvelles exceptions apportées, notamment à l’article 84.1, permettent en effet désormais à un propriétaire d’entreprise de vendre ses actions de petites entreprises admissibles à une compagnie contrôlée par un membre de sa famille immédiate tout en profitant de l’exemption pour gains en capital.

« Les personnes qui songent à effectuer un transfert générationnel de leur entreprise pourraient avoir avantage à profiter dès maintenant de certains changements apportés à la loi, car les dispositions sont susceptibles d’être modifiées et de devenir plus rigides », signale indique Marie-France Dompierre, associée, litige fiscal, chez Davies.

Elle croit que le gouvernement fédéral pourrait éventuellement profiter de la période du budget pour annoncer certaines modifications envisagées, mais qui tardent à se concrétiser, ce qui engendre un certain flou dans l’application de la loi.

Des règles à suivre

Voici quelques aspects à prendre en considération pour un propriétaire de PME qui souhaite profiter de l’exemption pour gain en capital dans le cadre d’un transfert familial :

  • Au fédéral, l’acheteur doit être un enfant ou un petit enfant majeur tel que défini par la loi, ou un gendre par mariage ou par union de fait. Il doit conserver les actions durant une période d’au moins 60 mois après la transaction. La juste valeur marchande (JVM) des actions doit être estimée par un évaluateur indépendant. De plus, l’entrepreneur qui vend les actions doit produire un affidavit attestant de divers éléments.
  • Au provincial, d’autres règles s’ajoutent : par exemple, les actions de l’entreprise cédée peuvent seulement être vendues par un particulier autre qu’une fiducie. Le cédant ne doit plus être actif dans l’entreprise après une certaine période ni conserver un contrôle sur l’entreprise après la vente. Il ne doit pas détenir d’actions ordinaires de l’entreprise transférée. Il doit également démontrer qu’il a pris part aux activités courantes de l’entreprise durant les 24 mois qui précèdent la vente des actions.
  • Malgré le fait que tous les critères ont été respectés, il se peut que les autorités fiscales effectuent une vérification de la transaction et estiment qu’elle n’est pas conforme aux exceptions ou encore qu’elle abuse de l’esprit des nouvelles dispositions, qui est de faciliter les véritables transferts intergénérationnels. Dans ce dernier cas, elles pourraient appliquer la règle générale anti-évitement prévue dans la législation fiscale fédérale et provinciale, ce qui pourrait avoir comme conséquence le refus de l’exemption pour gain en capital, signale Marie-France Dompierre. Elle conseille de prendre toutes les mesures pertinentes en amont pour effectuer une vérification diligente approfondie afin de s’assurer que tous les critères sont remplis.

Que faire en cas d’avis de cotisation ?

Dans le cas où un avis de nouvelle cotisation est établi à la suite d’une vérification fiscale, le client a plusieurs recours : il peut s’opposer à la décision des autorités et, si cette décision est confirmée, la contester devant la Cour canadienne de l’impôt ou devant la Cour du Québec. En décembre, un cas de contestation s’est retrouvé à la Cour suprême, et le contribuable a obtenu gain de cause, illustre Marie-France Dompierre.

La juriste précise qu’une augmentation des vérifications des autorités fiscales sur les demandes d’exemption en vertu des modifications adoptées en juin dernier est à prévoir au cours des prochaines années. Elle rappelle que les vérifications fiscales et l’établissement de nouvelles cotisations peuvent avoir lieu jusqu’à trois ans à partir de l’émission de l’avis de cotisation initiale pour une année d’imposition donnée, auxquels s’additionnent trois années supplémentaires du côté de Revenu Québec si l’application de la règle générale anti-évitement est envisagée, en plus d’une pénalité de 50 % de l’avantage fiscal refusé.

« Si les clients se trouvent à un moment de leur vie où ils commencent à considérer transférer leur entreprise à la prochaine génération, il est peut-être temps de saisir l’occasion pour mettre en place une stratégie fiscale et profiter de la souplesse des règles en vigueur pour effectuer un transfert familial », estime Marie-France Dompierre.

Le plus important dans ce type de planification, précise la juriste, consiste à s’entourer de professionnels aguerris afin d’éviter de tomber dans des exceptions telles que la règle d’évitement. « Il faut bien faire les choses dès le début. Pour nombre d’entrepreneurs, leur entreprise est leur fonds de retraite. En cas d’erreur, les conséquences pour leur avenir peuvent être désastreuses. »

892 218 $

C’est le montant maximum (indexé après 2021) pour lequel un particulier admissible a droit à une exonération cumulative pour gain en capital (ECGC). Il s’élève à 1 million de dollars (M$) pour une société agricole ou de pêche. Pour en bénéficier, il faut notamment respecter les critères de qualification à l’article 110.6 de la LIR. La vente d’actions admissibles de petite entreprise (AAPE) permet de réaliser des économies d’impôts d’environ 230000$ par individu pouvant demander l’EGCG (sous réserve de l’impôt minimum de remplacement).