«Nous avons rencontré quelques obstacles, qui ne sont pas des obstacles de type philosophique quant au bien-fondé du projet, mais bien des obstacles techniques et légaux qu’il a fallu surmonter. Nous sommes en train de le faire et les choses progressent bien», confirme Matthieu Cardinal, vice-président, affaires publiques et partenariats stratégiques chez Finance Montréal.

Selon des sources proches du dossier, la mise en place de la structure juridique, qui doit permettre le déploiement du capital auprès des gestionnaires sélectionnés et qui implique la création de sociétés en commandite, a été plus longue que prévu.

Pour l’instant, cinq gestionnaires se sont partagé un peu plus de 115 M$ destinés au volet alternatif du PGEQ. Il s’agit des firmes Lakeroad, de Lac-Beauport, ainsi que de Gestion de portefeuille Landry, de Galliant Advisor LP, de Gestion Cristallin, et de Majestic gestion d’actifs, toutes de Montréal.

Quant aux fonds réservés à la gestion traditionnelle, au moment de mettre sous presse, la date de l’annonce était toujours attendue.

D’après Stéphane Corriveau, président et directeur principal d’AlphaFixe Capital et pilote du comité chargé de trouver du capital d’amorçage au sein du Chantier entrepreneuriat de Finance Montréal, la valeur de ce fonds s’établirait à plus de 125 M$. Selon lui, d’autres investisseurs institutionnels pourraient accroître sa valeur d’ici son lancement.

L’identité des sept firmes retenues est pourtant connue depuis septembre 2015. Il s’agit d’Allard, Allard et associés, de Gestion d’actifs Global Alpha, de Gestion de portefeuille Landry, de Gestion d’actifs Stanton, d’IPSOL Capital, de LionGuard Gestion de Capital, et de Les Conseillers en Valeurs Razorbill, toutes des fimres établies à Montréal.

Stéphane Corriveau affirme que dans un deuxième temps, la croissance de la valeur de ce fonds permettrait à au moins un autre gestionnaire de se joindre à ce groupe.

Tout vient à point…

La survie d’un gestionnaire en émergence dépend souvent de sa capacité d’atteindre rapidement un certain seuil d’actif à gérer. Pas étonnant donc que certaines firmes soient impatientes de commencer leur mandat.

Du côté du Conseil des gestionnaires en émergence (CGE), 11 membres ayant été retenus pour le PGEQ, l’organisme diffère l’annonce officielle.

«Il a fallu tout remettre à plus tard à plusieurs reprises et maintenant l’été arrive, alors ça pourrait encore être reporté, ce qui nuit au momentum et à la visibilité des participants, et retarde d’autant la constitution de leur historique de rendement de l’actif», signale Philippe Hynes, propriétaire et président de Tonus Capital et administrateur du CGE.

«La bonne nouvelle, c’est que des investisseurs institutionnels se soient commis», ajoute-t-il.

Le PGEQ est entièrement financé par des investisseurs institutionnels, y compris la Caisse de dépôt et placement du Québec, qui a contribué à la solution de type alternatif.

Pour Philippe Hynes, ce délai de sept mois a sans doute permis à certains investisseurs institutionnels potentiels de mieux étudier le programme.

Philippe Hynes ne croit pas que le retard dans la remise des mandats ait entraîné des «conséquences financières sur les activités des firmes sélectionnées, puisque pour la plupart d’entre elles, il s’agit de firmes qui gèrent déjà un certain niveau d’actif».

Guy Desrochers, vice-président et chef de la conformité chez IPSOL Capital, dont la firme dépasse les 200 M$ d’actif sous gestion, en témoigne : «On ne peut pas dire que ce retard nous ait mis des bâtons dans les roues ou qu’il ait créé des empêchements, toutefois, pour une firme en démarrage, le fait d’avoir plus de clients, plus d’actif, et plus de revenus, c’est toujours bienvenu», dit-il.

Malgré tout, IPSOL Capital a hâte de gérer les actifs attendus, d’autant que cette forme de reconnaissance peut attirer des clients.

Lionel Alcoloumbre, vice-président senior, ventes et marketing chez LionGuard Gestion de Capital, abonde dans ce sens.

«Le fait d’avoir été sélectionné pour ce programme change pas mal de choses pour nous et nos collègues, souligne-t-il. Un investissement comme celui-ci apporte de la crédibilité, et dans le domaine du placement, la crédibilité et la réputation, ce sont les premiers actifs et les plus importants.»

Il ajoute : «Le retard n’a pas d’impact chez nous. Il s’agit d’un projet novateur, et nous avons compris que c’était un processus complexe».

Lionel Alcoloumbre précise que ce qui dérange dans cette situation, c’est par exemple d’annoncer à un investisseur éventuel que notre firme a été retenue et qu’elle recevra des fonds, et au moment de le relancer, lorsqu’il s’informe du projet, d’avoir à expliquer «qu’il y a eu des retards et qu’il s’agit d’un processus complexe».

Soutenir l’entrepreneuriat financier

Créé en avril 2015, le PGEQ est une solution pour pallier la difficulté d’obtenir des actifs à gérer dont se plaignent les firmes de gestion en émergence.

Les firmes qui parviennent à survivre sont celles qui font attention à leurs coûts, soulignait Geneviève Blouin, fondatrice et présidente d’Altervest et présidente du CGE, lors du 10e Colloque de conformité du Conseil des fonds d’investissement du Québec (CFIQ) en avril dernier : «Les coûts ne sont toutefois qu’une partie de l’équation, car le plus difficile consiste à convaincre des investisseurs de confier des actifs à des start-up de gestion de portefeuille».

«Le PGEQ a pour objectif de servir à la fois les allocateurs d’actif et les gestionnaires locaux. Il y a plusieurs grands acteurs au Québec, notamment la Caisse de dépôt et placement du Québec et Investissements PSP. Ces investisseurs doivent toutefois suivre des règles institutionnelles. Si la firme de gestion n’a pas accumulé de résultats pendant un certain nombre d’années, les caisses n’investiront tout simplement pas», expliquait le directeur général de Finance Montréal, Mario Albert, au cours de ce même colloque.

Selon lui, le PGEQ permet aux gestionnaires locaux d’établir un historique de placement, et aux investisseurs institutionnels d’obtenir une solution conçue pour créer de la valeur, de s’acquitter de leur devoir fiduciaire et de dissiper les appréhensions liées à la gestion du risque.