Une main tient une loupe qui grossit un signe attention.
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Certains aspects du soutien aux conseillers en placement (CP) francophones mériteraient un meilleur traitement, selon le Pointage des courtiers québécois 2025. Car si les exigences des lois sont suivies par les courtiers, le quotidien des représentants laisse entrevoir des angles morts, notamment en ce qui concerne les outils de travail et les communications internes.

Les répondants ont attribué une note moyenne de 8,8 sur 10 à leur firme en ce qui concerne les outils et le soutien en français, alors que l’importance moyenne accordée à ce critère atteint 9,3 sur 10. Un écart de satisfaction est présent (0,5 point), mais pas majeur. En tout, 66 % des répondants se disent satisfaits (notes de 9 ou 10), tandis que 8 % se déclarent insatisfaits (notes de 6 ou moins). Les résultats sont stables par rapport à l’an dernier.

Les firmes qui ont leur siège social au Québec obtiennent de meilleures notes. Du côté des firmes établies à l’extérieur de la province, RBC Dominion valeurs mobilières (RBC DVM) progresse légèrement (de 8,6 en 2024 à 8,9 en 2025), ScotiaMcLeod poursuit son amélioration (de 6,7 à 7,1) et Gestion de patrimoine TD (GPTD) enregistre une baisse (de 7,1 à 6,8).

Les dirigeants de firmes soulignent leur conformité aux lois linguistiques du Québec : comités de francisation, certificats, service à la clientèle en français, etc. Ce n’est pas là que le bât blesse. Les CP ne remettent pas en cause la capacité à servir les clients en français ni leur propre capacité à travailler dans leur langue.

Ce sont plutôt les outils et les communications internes qui posent des problèmes. La traduction de certains logiciels, rapports et documents prend du temps, parfois trop pour qu’ils soient encore pertinents lorsqu’ils arrivent en version française. Des formations ou contenus stratégiques sont offerts uniquement en anglais. Le soutien technique est parfois assuré par du personnel unilingue anglophone. Certaines réunions se tiennent systématiquement en anglais.

« Le site web n’est pas appuyé en français, et quand nous avons demandé de l’aide pour améliorer nos communications, nous nous sommes fait dire que c’était à nos frais », déplore un conseiller.

Un sondé dénonce une culture où le français semble toléré, mais non valorisé : « Ils le font par obligation, pas par conviction. » « On est toujours en retard pour les documents francophones. La traduction arrive une semaine plus tard », signale un autre répondant. Au-delà de la traduction, plusieurs CP montrent du doigt le soutien technique personnel unilingue, difficultés de communication, délais de réponse.

Chez un autre courtier, des répondants déplorent l’absence de traduction en temps opportun de certains documents, le manque de personnel francophone de haut niveau et l’absence de soutien linguistique pour des outils comme le logiciel correcteur de français Antidote.

Même chez certaines firmes basées au Québec, des critiques émergent parfois, dont celle de ce CP : « On reçoit encore des courriels internes de Toronto en anglais seulement. »

Les dirigeants, pour la plupart, reconnaissent les enjeux et se disent mobilisés. Suzanne Tremblay, vice-présidente et cheffe régionale Québec et Atlantique, Services privés à GPTD, assure que la firme a une stratégie claire pour le segment francophone : « “Le français est une priorité. Toutes les formations et communications sont offertes en français. Nous produisons et diffusons aussi plusieurs capsules Parlons Argent (MoneyTalk) en français.”

Chez RBC DVM, Jérôme Brassard, vice-président et directeur général régional, Québec, reconnaît que certains avis sont justifiés, notamment sur la présence de personnel de back office unilingue. “Le droit de travailler en français est extrêmement important. On met beaucoup de rigueur à respecter cela. On a des comités internes. Malheureusement, parfois, le volume ou le fait qu’il y a certaines questions très spécialisées nous obligent à aller chercher quelqu’un [qui parle] anglais.” Il note par ailleurs que des investissements ont été réalisés dans des outils d’intelligence artificielle pour accélérer la mise à jour des documents en français.

Du côté d’iA Gestion privée de patrimoine, Adam Elliott, président et chef de la direction, se dit surpris des quelques critiques formulées à l’égard du français. “Tous nos documents sont transmis simultanément en français et en anglais. Parfois, ce sont les fournisseurs américains qui causent des irritants, mais ça ne vient pas de nous.” Il rappelle que le soutien en français au Québec est solide et fait partie de la culture de la firme.

Si les résultats du sondage montrent une situation globalement satisfaisante, ils révèlent surtout une frustration sous-jacente celle de devoir constamment rappeler l’importance du français dans un univers d’affaires dominé par l’anglais. Les CP souhaitent être outillés pour servir leurs clients francophones avec le même niveau de professionnalisme et de réactivité que leurs collègues anglophones.

Avec la collaboration d’Alizée Calza et Guillaume Poulin-Goyer

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