Afin de bâtir les portefeuilles de mes clients, j’utilise des fonds négociés en Bourse (FNB) d’or en détention physique depuis 2006. Cette exposition à l’or a apporté différents bénéfices à mes clients, dont celui de la diversification. Par contre, elle comporte certains défis, dont celui de gérer leurs émotions par rapport à ces fonds. Voici des leçons tirées de mon expérience.
Actif unique. Les principaux utilisateurs d’or se répartissent en quatre groupes. L’industrie de la bijouterie représente près de la moitié de la demande mondiale. Les institutions financières utilisent l’or à des fins d’investissement. Le secteur technologique y a recours pour la fabrication de composants électroniques, tels que les connecteurs, et le secteur médical, pour la conception d’équipements.
Pour les clients, l’or peut offrir une sorte de couverture contre la perte de pouvoir d’achat des monnaies fiduciaires : ce métal précieux tend à conserver sa valeur avec le temps. Il est aussi une valeur refuge, les investisseurs se tournant souvent vers l’or lors des bouleversements du marché, faisant monter son prix et offrant une stabilité aux portefeuilles. L’or est un actif liquide, facilement convertible en espèces sur les marchés mondiaux. Cette liquidité garantit que les investisseurs peuvent rapidement accéder aux fonds en cas de besoin, faisant de l’or un élément flexible d’une stratégie d’investissement.
Gérer le risque. J’utilise l’or dans mes portefeuilles surtout pour sa capacité de diversification. Les mouvements de prix de l’or sont généralement non corrélés ou négativement corrélés avec d’autres catégories d’actifs, telles que les actions et les obligations. Ceci aide à réduire le risque global du portefeuille et sa volatilité, améliorant les rendements à long terme.
Par exemple, en 2022, alors que les actions et les obligations connaissaient des baisses de rendement, l’or s’est révélé stable, ce qui a permis à mes clients de réduire la volatilité à la baisse de leur portefeuille. Par contre, il faut être prêt à conserver l’or à long terme, et ceci, même lors de périodes prolongées de rendements moins intéressants.
Sur 25 ans, l’or a été la catégorie d’actifs qui a affiché la plus forte performance. Un investissement de 100 $ effectué le ler janvier 2000 vaut 1068 $ au 30 juillet 2025 pour un rendement annuel de 10 %, selon Thomson. La même somme investie dans le S&P 500 ne vaudrait que 710 $ pour un rendement de 6 % malgré ses impressionnants résultats depuis plus de dix ans. Et si on avait investi 100 $ dans l’or à son sommet du 11 août 2011 et dans le S&P 500 après sa décennie de sous-performance ? L’investissement dans l’or vaudrait 246 $ comparativement à 910 $ dans le S&P 500, soit un rendement de 6 % contre 17 % pour l’indice, d’après Thomson. L’or, comme tout autre actif, connaît de bonnes périodes et des mauvaises.
Choisir le bon FNB. Je préfère les FNB qui offrent le métal en détention physique plutôt que les titres de sociétés aurifères ou des contrats à terme sur l’or. Les aurifères comportent trop de risques opérationnels et un levier financier défavorable aux investisseurs. Et ils ont par le passé sous-performé par rapport aux FNB d’or en détention physique.
Quant aux FNB qui utilisent des contrats à terme, ils sont sujets au rendement inférieur lié au roulement de leurs contrats (vendre ceux à courte échéance et acheter ceux à plus longue échéance).
Cette situation s’explique parce que le marché est souvent en situation de report (contango), soit lorsque le prix à terme du contrat est supérieur au prix au comptant. Les FNB tels que le MNT se distinguent du fait qu’ils offrent la possession directe des lingots d’or, tandis que les fonds comme GLD donnent des certificats de livraison. Certains clients peuvent croire à tort que ces certificats les désavantagent par rapport aux grands acteurs du secteur financier. C’est un aspect sur lequel on doit les rassurer. On doit aussi les informer que, par rapport à un FNB classique, MNT est un fonds à capital fermé (closed end fund), ce qui vient avec un coût indirect, car il est sujet à des écarts importants entre la valeur marchande du fonds et sa valeur liquidative.
Pour m’exposer à l’or, je privilégie les FNB classiques, étant donné qu’ils sont généralement faciles à négocier en grands blocs, liquides et offerts à coût raisonnable.
Gare aux coûts. Certes, il faut tenir compte des frais de gestion et des frais de transaction des FNB sur l’or, qui varient entre 0,17 % et 0,74 %, d’après une compilation de Banque Nationale Marchés financiers. Or, il. Y a d’autres facteurs à considérer. Par exemple, un coût de l’écart cours acheteur-cours vendeur supérieur pour un FNB peut nuire à l’expérience du client si l’on doit négocier souvent ce FNB. La taille de l’actif géré par un FNB importe également dans ses coûts de transaction. Rien ne sert d’économiser quelques dollars en frais de gestion et ensuite de subir des coûts moins visibles encore plus importants.
Garder le cap. L’or a joué un rôle positif dans les comptes de nos clients au fil des années, même en faisant abstraction de la forte performance des 18 derniers mois. Or, il arrive que certains clients s’impatientent contre les catégories d’actifs qui semblent moins bien s’illustrer sur une période relativement prolongée. Peut-être que c’est même encore plus le cas avec un actif comme l’or qui ne paie aucun dividende ni revenu d’intérêts. C’est lors de ces moments de doute que le conseiller peut apporter beaucoup de valeur en expliquant que la diversification améliore la fiabilité des rendements. Le prix à payer pour cette fiabilité est qu’il faut accepter que certaines composantes puissent avoir une contreperformance durant une certaine période. On doit les conserver et même en acheter davantage pour maintenir la pondération cible, même si nos émotions nous disent de vendre.