4zevar / 123rf

Penchons-nous sur quelques cas. Dans la frénésie associée à l’action de GameStop et au désir d’un groupe de nuire à ceux qui prenaient une position vendeur sur ce titre, certains individus ont utilisé l’effet de levier pour acheter davantage de titres. Ils l’ont fait entre autres en empruntant pour investir.

Certains ont eu la chance d’avoir à la fois un moment d’achat favorable et un moment de vente favorable. Ils en ont profité. Mais d’autres non. L’effet de levier a été pour ceux-ci destructeur de richesse.

Rappelons que l’effet de levier a l’avantage de grossir les gains lorsqu’il joue en faveur d’un client, mais aussi d’accroître ses pertes lorsque cet effet joue contre lui.

La chute de la firme de gestion de patrimoine américaine Archegos est un aut re bon exemple des risques liés à l’effet de levier et à la concentration. Selon différents médias financiers, le fonds d’Archegos s’est endetté afin d’obtenir une exposition à différents titres financiers. Ses avoirs étaient sous la forme de swaps sur rendement total, un instrument f inancier où les titres sous-jacents sont détenus par des banques. Celles-ci devaient lui livrer le rendement du titre.

Incapable de respecter ses appels de marge, Archegos a implosé en mars, ce qui a forcé plusieurs banques à essuyer des pertes importantes. Dans ce cas, l’effet de levier a été destructeur de richesse.

Ces deux cas extrêmes, qui n’ont rien à voir avec les activités des conseillers, présentent malgré tout quelques leçons pour les clients et donnent matière à penser aux conseillers. Comme on peut le lire dans l’article «Tendances de l’industrie»présenté en première page, le recours à l’effet de levier existe encore dans l’industrie.

D’abord, l’effet de levier accroît le risque. Il augmente le potentiel à la hausse et le potentiel à la baisse. Le conseiller et son client doivent en être conscients et bien en comprendre les conséquences.

L’effet de levier peut convenir à un client qui a une tolérance au risque de moyenne à élevée ainsi qu’une capacité financière à prendre des risques. Selon la réglementation, l’effet de levier ne s’adresse qu’à un segment limité de clients, qui ont une situation financière saine, les connaissances requises, un horizon temporel suffisamment long, qui ne sont pas trop vieux et qui ont généralement un taux d’imposition élevé.

Le conseiller doit bien connaître son client et faire un suivi ponctuel du dossier afin de s’assurer que la stratégie d’emprunt du client lui convient toujours.

En vertu des nouvelles règles de convenance qui entreront en vigueur en 2021, avec les réformes axées sur le client, les régulateurs s’attendent à ce que l’on recueille des informations supplémentaires sur la capacité du client à s’acquitter de ses obligations financières si son conseiller emprunte pour investir. La récente hausse du prix des propriétés immobilières pourrait inciter certains clients à refinancer leur prêt hypothécaire et en investir une partie. Prudence et vigilance sont de mise.

Parmi les autres leçons à tirer de ces actualités, on note l’importance de la gestion des risques dans le processus d’investissement. Bien entendu, le risque de concentration permet de créer des fortunes, y compris quand on le jumelle à l’effet de levier. Toutefois, il peut être défavorable au client, voire lui causer des pertes permanentes qui peuvent handicaper ses projets futurs. La gestion des risques passe souvent par la diversification et une gestion des attentes du client quant aux rendements espérés de son portefeuille.

Autre leçon : nos émotions peuvent nous jouer de mauvais tours, surtout en ce qui concerne les questions financières. En effet, l’histoire démontre encore une fois que de suivre les mouvements de foule ou de tomber en amour avec certains titres peut être contreproductif lorsqu’on gère ses actifs. Conseillers et clients peuvent prendre de mauvaises décisions ou souffrir de biais compor tementaux, comme l’excès de conf iance, qui peuvent les mener à recourir à l’effet de levier. D’où l’importance d’avoir un processus de placement réfléchi et appliqué de manière disciplinée en faisant abstraction du bruit du moment.

Enfin, la récente actualité, y compris la pandémie, nous rappelle que l’avenir reste imprévisible, même quand on a une très bonne stratégie d’investissement. Quand vient le moment d’emprunter pour investir, mieux vaut bien avoir cette pen-sée en tête. Prudence devrait rimer avec effet de levier.