La décision prise par la Réserve fédérale d’augmenter enfin les taux d’intérêt le 16 décembre a étrillé le dollar canadien, qui était déjà aux abois, pour lui faire atteindre son plus bas niveau en 11 ans. Depuis le début de 2013, moment où les deux devises étaient à parité, le huard ne cesse de tomber, et il a perdu environ 25 % de sa valeur par rapport au billet vert. 

Il y a peu de chances que cette tendance change dans un avenir proche.

Toutefois, l’érosion du dollar canadien, surtout par rapport à son homologue américain, est une bonne chose pour certaines compagnies canadiennes. Ces compagnies ont des opérations solides aux États-Unis qui génèrent une grande partie de leurs revenus et de leurs profits en dollars américains tout en présentant leurs résultats en dollars canadiens.

En détenant des sociétés dont les résultats nets bénéficient d’un huard plus bas, les investisseurs peuvent faire jouer cette faiblesse de la devise à leur avantage. Certaines sociétés canadiennes de haute qualité choisies, qui ont de bonnes données fondamentales et dont les revenus le prix de leur action sont exposés au dollar américain, devraient bénéficier de la poussée suscitée par le repli du dollar canadien, selon les recherches sur les actions de Morningstar.

La Manuvie (MFC), qui est la plus grosse compagnie d’assurance canadienne selon la capitalisation boursière, fournit des produits et services d’assurance et de gestion de patrimoine aux individus et aux institutions au Canada, aux États-Unis et en Asie. La société a une participation très importante au dollar américain par sa filiale américaine, John Hancock, ce qui contribue grandement à son bilan consolidé. Les bénéfices en dollars américains de la société sont convertis en dollars canadiens au moment de présenter les résultats, ce qui génère des dollars supplémentaires quand le huard est plus bas.

La société a publié des bénéfices d’exploitation de base de 870 millions de dollars (M$) au troisième trimestre, soit une hausse de 15 % d’une année sur l’autre.

« D’un point de vue opérationnel, la Manuvie demeure fondamentalement solide, avec des ventes qui continuent sur leur élan dans la plupart des régions », a dit Vincent Lui, analyste des actions à Morningstar, qui a déterminé la juste valeur de l’action à 22 $.

La Manuvie a enregistré un accroissement de ses ventes de polices de 18 % d’une année sur l’autre, ce qui a conduit à une flambée de 31 % au cours des neuf premiers mois, selon un rapport sur les actions de Morningstar. La division de gestion d’actifs de la société a connu une croissance comparable, avec des flux d’actifs qui ont plus que doublé pour atteindre 1,4 milliard de dollars (G$).

Vincent Lui prévoit que les revenus auront un taux de croissance annuel composé de 3 % et un rendement des capitaux propres moyen de 13 % jusqu’en 2017.

L’Impériale (IMO) est une société énergétique canadienne intégrée qui prospecte, produit et vend du pétrole brut et du gaz naturel. Elle exploite aussi trois raffineries au Canada, fabrique des produits chimiques et gère une entreprise de marketing de carburant au détail. La société est à 70 % la propriété du géant pétrolier et gazier américain ExxonMobil (XOM). La dépréciation du dollar canadien se traduit par des bénéfices plus importants pour L’Impériale car ses revenus sont en dollars américains alors que ses coûts d’exploitation sont en dollars canadiens.

La société a publié une forte croissance de sa production au troisième trimestre et a réussi à générer des flux de trésorerie disponibles après les dividendes. Appelant cela un « exploit rare », un rapport de Morningstar a noté que la firme avait coutume de générer des rendements supérieurs sur le capital investi par rapport à ses pairs.

Une forte croissance de la production, des dépenses en capital plus faibles et des économies de coût ont aidé L’Impériale à produire près de 350 M$ de flux de trésorerie disponibles au troisième trimestre, dit Stephen Simko, directeur de secteur à Morningstar, qui a déterminé que la juste valeur de l’action était de 43 $.

Le rendement du capital investi (RCI) de L’Impériale, qui est au tout premier rang de l’industrie, a été en moyenne de 14 % de 2011 à 2014, bien au-dessus de la moyenne de 11 % de son groupe de pairs, mais Stephen Simko s’attend à ce qu’il chute jusqu’à atteindre un éventail de 5 % à 8 % sur la période de 2015 à 2019, en raison de la baisse du prix du pétrole.

La société de vêtements canadienne Gildan Activewear (GIL) fabrique et vend des T-shirts, maillots de sports, chaussettes et chandails aux États-Unis, au Canada et dans d’autres pays. Elle exploite aussi des installations de fabrication à grande échelle en Amérique centrale et aux Caraïbes. Gildan a une part de marché des vêtements imprimés de plus de 70 % aux États-Unis, ce qui génère une grande partie de ses bénéfices en dollars américains.

La société peut encore augmenter sa part de marché dans ce secteur en faisant des acquisitions, en créant de nouveaux produits et en accroissant sa présence internationale, indique un rapport sur les actions de Morningstar. « Des contrats de licence, davantage de présence sur les rayons et davantage de ventes au détail de sous-vêtements, de vêtements sportifs et de chaussettes Gold Toe à la marque de Gildan pourraient donner à la société une série de revenus affichant une croissance à deux chiffres », a dit le rapport.

L’analyste d’actions Bridget Weishaar de Morningstar a prévu une croissance des revenus de 11 % pour Gildan en 2015, avec une croissance moyenne annuelle des revenus de 8 % et une croissance moyenne annuelle du revenu d’exploitation de 18 % pendant les cinq prochaines années.

Les marges d’opération de la firme, a-t-elle ajouté, vont passer pendant cette période de cinq ans de 12,6 % à 19,7 % à la suite de 100 M$ d’économies résultant de réductions de coûts, de ventes de vêtements de marque et de produits aux marges plus élevées. Bridget Weishaar a récemment fait passer la juste valeur de l’action de 43 $ à 44 $, augmentation causée par la chute du dollar canadien.

Agrium (AGU) est le plus gros détaillant agricole aux États-Unis. Elle vend des engrais, des produits chimiques pour les récoltes et des graines directement aux fermiers. L’entreprise de gros de la firme produit et vend des nutriments de cultures comme l’azote, la potasse et le phosphate, avec des ressources naturelles situées des deux côtés de la frontière. La faiblesse du dollar canadien stimule encore davantage les revenus car une portion importante des revenus d’Agrium est générée aux États-Unis, alors que la plus grande partie de ses coûts de production est en dollars canadiens.

Cette société productrice d’engrais procède activement à des acquisitions de détaillants et de magasins agricoles pour augmenter son volume d’affaires, notamment aux États-Unis. Une empreinte plus large permettra à Agrium d’accroître son pouvoir de négociation auprès des fournisseurs et de créer des flux de trésorerie stables, selon un rapport sur les actions de Morningstar.

Défiant la tendance de diminution des bénéfices qui règne dans le secteur, Agrium a récemment publié un profit au troisième trimestre de près de 9 %, et des bénéfices nets de 99 M$US, stimulés par des volumes de ventes plus élevés et des coûts plus faibles.

L’analyste d’actions de Morningstar Jeffrey Stafford a noté que l’approbation par le conseil d’administration d’Agrium de l’expansion de sa mine de Vanscoy en Saskatchewan fera augmenter d’environ 50 % sa production annuelle de potasse.

Agrium est le troisième producteur de potasse en Amérique du Nord, et l’oligopole de la potasse a toujours bénéficié de décisions de ce type concernant sa production, ajoute Jeffrey Stafford, qui a établi la juste valeur de l’action à 137 $ et projeté une croissance organique moyenne des ventes de 5 à 6 % jusqu’à la fin de 2019.