Risque de conflits d'intérêts pour les enquêteurs de la CSF
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« Aucune directive n’encadre précisément les potentiels conflits d’intérêts avec les cabinets pour lesquels les enquêteurs ont travaillé, lorsque ces derniers proviennent de l’industrie », mentionne l’AMF dans son rapport d’inspection.

La CSF se doit de mieux circonscrire les situations susceptibles de susciter des conflits d’intérêts apparents ou réels et agir de manière proactive en prenant les mesures nécessaires en pratique pour minimiser ces risques, lit-on dans ce document.

Cette recommandation fait partie des 15 que l’AMF formule afin d’améliorer différents aspects des finances, de la gouvernance, des enquêtes et de la formation continue de la CSF. Celle-ci est l’une des trois qui ont un degré de priorité élevé.

Selon la CSF, qui répond à chacune des recommandations, « les enquêteurs du bureau de la syndique de la Chambre sont assujettis à l’application des règles qui régissent la conduite de l’ensemble de notre personnel, dont notamment celles qui encadrent les situations ou apparences de conflits d’intérêts, et ce, afin d’en prévenir les effets préjudiciables ».

La CSF a toutefois indiqué qu’elle verrait à « élaborer des règles de déontologie plus spéficiques pour les enquêteurs».

Dans son rapport d’inspection, l’AMF indique aussi que certains dossiers d’enquête prendraient trop de temps à cheminer.

« [L’AMF] a constaté que le cheminement de certains dossiers d’enquêtes au bureau du syndic s’avérait difficile et que, dans certains cas, ceux-ci n’étaient pas menés à terme dans des délais raisonnables, peut-on lire dans le rapport. Dans certains cas, l’enquête est demeurée inactive pendant des périodes importantes.»

En conséquence, l’AMF enjoint la CSF à prendre les mesures nécessaires pour faire cheminer les dossiers d’enquête dans des délais raisonnables. Si la CSF estime que « le traitement des dossiers d’enquête doit être efficient », l’organisme d’autorèglementation réplique toutefois qu’il est « soucieux de respecter l’indépendance et la latitude que le législateur confère au syndic dans l’exercice de ses pouvoirs et de sa discrétion, à l’instar de tout syndic qui oeuvre au sein d’un ordre professionnel. »

Ce n’est pas la première fois que l’AMF fait ce genre de reproche à la CSF puisque c’était l’une des critiques formulées dans le précédent rapport d’inspection. Ce précédent rapport d’inspection, publié le 18 juin 2012, couvrait la période comprise entre le 1er janvier 2008 et le 31 décembre 2010.

Publication tardive

Le rapport d’inspection couvrant la période comprise entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2014 n’a été rendu public que le 17 août 2017, et semble avoir été complété le 7 avril, d’après le dernier rapport de Vérificatrice générale du Québec qui faisait un audit l’AMF. Rappelons que, plus tôt cette année, la vérificatrice générale (VG) du Québec, Guylaine Leclerc, a recommandé que l’AMF améliore sa supervision de la CSF.

Lire aussi – L’AMF doit améliorer ses suivis d’inspection

Selon la Guylaine Leclerc, l’AMF n’avait pas respecté le cycle d’inspection de trois ans prévu dans les plans de supervision convenus avec la CSF et la ChAD. En effet, les derniers cycles d’inspection ont couvert une période de quatre ans plutôt que de trois ans.

Aussi, «les rapports faisant état des recommandations formulées aux chambres sont publiés trop longtemps après la fin de la période couverte par l’inspection, ce qui peut avoir un impact sur la pertinence des recommandations. En effet, nous avons constaté qu’il pouvait s’écouler de 14 à 27 mois entre la fin de la période d’inspection et la finalisation du rapport», pouvait-on lire dans le rapport de la VG publié en mai de 2017.

Selon ce dernier rapport, en juin 2012, l’AMF a recommandé que la CSF prenne les mesures adéquates afin de diminuer le nombre de dossiers d’enquête en cours depuis plus de 15 mois : « L’Autorité n’a pas fait de suivi de cette recommandation et près de cinq ans plus tard, soit en 2017, l’Autorité constate encore que les délais d’enquête sont longs. Un indicateur de délais aurait facilité le suivi de cette recommandation par l’Autorité et lui aurait notamment permis de réagir en temps opportun. »

En lisant le rapport d’inspection de la CSF publié en août 2017, il est toutefois clair que les enquêteurs de l’AMF ont tenté de prendre en compte les changements effectués à la structure ou aux politiques de la CSF entre la fin de la période d’inspection et la publication du dit rapport.

« Le programme d’inspection de la Chambre regroupait l’ensemble des activités et couvrait la période comprise entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2014, écrit l’AMF, dans son dernier rapport d’inspection de la CSF. Toutefois, les constats et les recommandations de l’Autorité sont à jour en date de ce rapport. L’Autorité a en effet tenu compte des modifications apportées par la Chambre qui ont été soumises à son attention depuis l’inspection, le cas échéant. »

La CSF réplique

Dans un communiqué de presse envoyé en fin de journée mardi, la CSF a indiqué  que « le véritable débat à l’heure actuelle devrait plutôt porter sur la disparition d’un organisme professionnel voué à la protection du public », et que « rien dans ce rapport ne justifie la remise en question » de son existence.

Flavio Vani, président de l’Association professionnelle des conseillers en services financiers et Guy Duhaime, président du Groupe financier Multicourtage et ancien président de l’Association des intermédiaires en assurances de personnes du Québec (AIAPQ), se sont d’ailleurs portés à la défense de la CSF dans un article, intitulé « Qui a intérêt à éliminer la Chambre?» publié par le magazine Conseiller.