C’est la question à laquelle tentent de répondre Josée Jeffrey, fiscaliste et planificatrice financière, et Paul Rioux, comptable professionnel agréé et planificateur financier, lors de la conférence qu’ils ont donnée dans le cadre du Congrès 2013 de l’Institut québécois de planification financière.

La conférence suivait l’étude de cas du congrès: Martin a connu une belle et longue carrière de près de vingt ans dans la Ligue nationale de hockey (LNH), mais la période d’inactivité survenue en raison du lock-out en 2012-2013 l’a amené à annoncer sa retraite définitive. Martin revient au Québec avec sa nouvelle conjointe américaine, Tracy qui se demande quel impact leur retour aura sur sa retraite et ses finances.

Dans un premier temps, en tant que citoyenne américaine, Tracy doit continuer de déclarer ses revenus et les comptes qu’elle détiendra au Canada à l’Internal Revenue Service (IRS) chaque année. Plus précisément, elle devra déclarer les comptes où on retrouve plus de 50 000$, les fonds communs de placement, les comptes de courtiers et les contrats d’assurance vie. Fait intéressant, les biens immobiliers possédés par le citoyen américain au Canada ne sont pas concernés par ces déclarations.

Si Tracy ne se conforme pas à ces exigences, Tracy s’expose à des pénalités pouvant atteindre 50 % de la valeur des comptes étrangers détenus au Canada: « Il est important de savoir qu’à partir de 2013, ou au plus tard 2014, les institutions financières devront fournir à l’IRS, à travers l’ARC, l’information relative à leurs clients qui pourraient être des citoyens américains (US indicia) », explique Paul Rioux.

Comme une grande majorité d’Américains, Martin et Tracy détiennent des 401k, ce régime ressemble à notre REER collectif. Le 401k est un régime offert par les employeurs américains à leurs employés pour épargner pour leur retraite, les cotisations du travailleur sont déductibles de son revenu et celles de l’employeur sont non-imposables. Les cotisations sont assujetties à un plafond et elles s’accumulent à l’abri de l’impôt.

 » Il y a toutefois une différence en ce qui a trait aux retraits obligatoires, ils commencent à 70 ans et demi, soit plus tôt que le FERR, et sont inférieurs à ceux demandés au Canada », indique Josée Jeffrey.

En déménageant au Canada, Tracy et Martin ont trois options: retirer toutes les sommes dans le cadre d’un retrait forfaitaire, faire des retraits périodiques ou simplement tout laisser dans le 401k aux États-Unis.

Différentes pénalités s’appliquent selon le choix : « Pour un retrait forfaitaire des retenues à la source de 30 %, note Josée Jeffrey. La convention fiscale prévoit un taux de retenue à la source de 15 % pour des retraits périodiques qui peut toutefois être récupéré via le crédit d’impôt pour revenu étranger, en totalité ou en partie, selon l’impôt payable au Canada. De plus, un impôt spécial de 10 % est prévue pour un retrait anticipé avant l’âge de 59 ans et demi. »

Une fois au Canada, un 401k peut aussi être transféré dans un REER si le citoyen américain prévoit résider au Canada en permanence et ne jamais redevenir un résident des États-Unis aux fins de l’impôt. Ce transfert n’affectera également pas les droits de cotisation au REER, le 401 k étant considéré être un revenu de pension admissible en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (LIR). Une retenue à la source sera applicable aux États-Unis en plus de l’impôt spécial de 10 % sera aussi appliquée si le client a moins de 59 ans et demi.

« Il est recommandé de consulter un professionnel avant le transfert et avant de devenir un résident canadien, souligne Josée Jeffrey. Dans certains cas, il pourrait s’avérer avantageux de retirer son 401k si on est près de la retraite ou si on a plus de 59 ans et demi. » C’est parfois le cas en raison du taux d’imposition aux États-Unis moins élevé qu’au Canada.

Si les 401k sont conservés et laissés aux États-Unis, Tracy et Martin devront demander chaque année le report d’impôt sur leurs régimes. Attention, le report n’est pas automatique, aucun formulaire n’existe à cet effet et le contribuable doit donc faire la demande lui-même auprès de l’ARC. C’est l’option que devrait choisir Tracy, selon les deux conférenciers, notamment en raison des complications que pourraient occasionner un retour possible aux États-Unis.

« De plus, sa relation avec Martin ne dure que depuis deux ans, rien ne dit qu’ils ne rompront pas et qu’elle souhaitera alors retourner aux États-Unis, rappelle Josée Jeffrey. Il faut être prudent. Pour Martin, puisqu’il n’est pas près de la retraite, un transfert de son 401 k au Canada est à envisager.. »