Son passeport canadien indique comme lieu de naissance une petite ville de l’État de New York, ce qui fait de lui un citoyen américain. Aujourd’hui, à 60 ans, il songe à renoncer à sa citoyenneté américaine, car il trouve injuste le traitement fiscal auquel il doit se conformer.

La fiscalité américaine, basée sur la citoyenneté, l’oblige notamment à produire des déclarations fiscales aux autorités fiscales du Canada et des États-Unis. Entrepreneur prospère, il a accumulé un actif important.

Les conséquences financières d’une renonciation à la citoyenneté américaine sont coûteuses, et William ne souhaite pas avoir d’ennuis avec les autorités américaines lors de ses nombreux voyages d’affaires. Il vaut mieux pour lui de conserver la double citoyenneté et de se conformer aux exigences fiscales américaines.

Avantages envolés

Pour l’aider à réduire son fardeau fiscal tant au Canada qu’aux États-Unis, des produits et des stratégies sur mesure qui tiennent compte de sa citoyenneté américaine et de sa résidence canadienne s’imposent.

Les bénéfices fiscaux canadiens de certains outils de placement peuvent vite s’envoler en frais de production de déclarations fiscales américaines et peuvent même lui créer une facture fiscale américaine.

C’est le cas du compte d’épargne libre d’impôt (CELI). Bien qu’ils ne soient pas imposables au Canada, les revenus et le gain en capital réalisés dans un compte CELI le sont au sud de la frontière. William devrait se départir de son CELI, à moins que son préparateur d’impôt américain n’en décide autrement en déclarant le CELI sur les formulaires 3520 ou 3520A. Même le CELI qui ne détient que de l’encaisse ou un certificat de dépôt garanti pourrait être traité comme une fiducie étrangère par le fisc américain.

Attention au REEE

William devrait aussi éviter d’être le cotisant au Régime enregistré d’épargne-études (REEE) de ses petits-enfants qu’il souhaite ouvrir, sans quoi il devra produire d’autres formulaires au fisc américain.

Son épouse ou sa fille, qui n’ont pas la citoyenneté américaine, peuvent cotiser à un REEE. Et à condition qu’il soit un résident canadien, l’enfant ou le petit-enfant de William, qui serait aussi un citoyen américain et un résident canadien, peut être le bénéficiaire d’un REEE. Toutefois, lorsqu’il commencera à recevoir des paiements d’aide aux études (PAE), la situation risque de se corser, et l’enfant américain bénéficiaire du REEE aura des obligations fiscales américaines pour les revenus qu’il recevra du régime.

William peut continuer à maximiser son REER sans avoir à remplir de documents pour le fisc américain, à moins que son préparateur d’impôt américain ne le définisse comme individu non admissible et exige la production d’un formulaire 8891.

Gare à certaines parts de fonds

Chose certaine, il est préférable pour William de ne pas investir dans des unités de fonds communs de placement (FCP) ou des unités de fonds négociés en Bourse (FNB), car dans ce cas, les mesures fiscales punitives du Passive Foreign Investement Company (PFIC) pourraient s’appliquer.

Le fisc américain considère en effet un détenteur d’unités de FCP comme un actionnaire d’une société générant des revenus passifs (soit des revenus de placement), l’obligeant à déclarer annuellement ces revenus sur des formulaires distincts (Form 8621) pour chacun des fonds communs dont il détient des parts.

Même si les unités de FCP sont traitées comme détenues en fiducies à des fins fiscales canadiennes, elles sont considérées comme des sociétés passives à des fins fiscales américaines.

Le détenteur américain d’unités de FCP a le choix entre deux modes de déclaration lors de la production des formulaires 8621, soit l’évaluation au cours du marché (mark to market) ou le recours au fonds électif admissible (Qualified Electing Fund ou QEF election).

Avec l’évaluation au cours du marché, tous les revenus de placements gagnés durant l’année (intérêts, dividendes, gain en capital) sont imposables comme un revenu ordinaire aux États-Unis. Le gain ou la perte en capital latente doit aussi être considéré comme un revenu réalisé, comme si le placement avait été vendu à la fin de l’année.

Si le mode QEF election est choisi, l’investisseur doit plutôt déclarer sa part proportionnelle du revenu gagné par le fonds dans le formulaire 8621.

Il existe des unités de FCP qui offrent les informations nécessaires aux détenteurs d’unités de fonds communs afin qu’ils puissent faire ce choix du côté des États-Unis. Il ne s’agit toutefois pas d’une solution miracle qui permette de faire fi définitivement des PFIC.

Différent pour les REER

Il vaut mieux que le préparateur d’impôt américain de William confirme si des unités de FCP permettant le QEF election sont appropriées dans son cas, ou si d’autres outils de placement le seraient davantage, comme des actions cotées en Bourse qui permettent d’éviter l’application des PFIC.

William peut, sans se soucier des PFIC, détenir dans son REER ou dans son Fonds enregistré de revenu de retraite (FERR) des unités de FCP ou de FNB. L’Internal Revenue Service (IRS) a clairement mentionné que des unités de FCP ou des FNB détenus dans un REER ou dans un FERR étaient protégées par la convention fiscale Canada-États-Unis.

Les investissements faits dans sa police d’assurance vie qui bénéficient d’un traitement fiscal particulier au Canada peuvent aussi être assujettis aux PFIC, et les primes payées sont sujettes à une taxe d’accise (Excise Tax) de 1 % et forcent la production d’un rapport trimestriel au fisc américain (Form 720).

De plus, puisqu’il a une incidence de propriété dans sa police (incidence of ownership), le capital-décès sera ajouté à la valeur de sa succession mondiale aux fins de l’application des droits successoraux américains (U.S. Estate Tax), et ce, quel que soit le bénéficiaire de la police. Si ce client vend sa police d’assurance à sa société de gestion, par exemple, les mesures fiscales américaines sur les dons (U.S. Gift Tax) pourraient s’appliquer.

L’utilisation d’une fiducie d’assurance particulière, l’Irrevocable Life Insurance Trust (ILIT), est souvent une solution optimale, cependant, si la police est déjà en vigueur, des conséquences fiscales surgiront lors du transfert à la ILIT.

Autrement dit, William a besoin de conseils et de produits particuliers qui tiennent compte de sa double citoyenneté.