Julie-Martine Loranger | Finance et Investissement https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/ Source de nouvelles du Canada pour les professionnels financiers Mon, 20 Oct 2025 11:31:14 +0000 fr-CA hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.8.3 https://www.finance-investissement.com/wp-content/uploads/sites/2/2018/02/cropped-fav-icon-fi-1-32x32.png Julie-Martine Loranger | Finance et Investissement https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/ 32 32 Encadrement de l’IA par les institutions financières https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/encadrement-de-lia-par-les-institutions-financieres/ Mon, 20 Oct 2025 11:31:14 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=110297 ZONE EXPERTS — Survol du projet de Ligne directrice de l’AMF.

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Introduction

En juillet 2025, l’Autorité des marchés financiers (« AMF ») a publié pour consultation son projet de Ligne directrice sur l’utilisation de l’intelligence artificielle Ligne directrice ») qui précise les attentes de l’AMF à l’égard des mesures à adopter par les institutions financières pour encadrer les risques associés à l’utilisation d’un système d’intelligence artificielle (« SIA »).

Cette Ligne directrice, qui vient compléter la Ligne directrice sur la gestion du risque de modèle[1] publiée par l’AMF en juin 2025, s’applique aux institutions financières régies par l’AMF[2]. La Ligne directrice s’appuie notamment sur les principes de l’Organisation de coopération et de développement économiques (l’« OCDE ») en matière d’intelligence artificielle (« IA »)[3].

Bien que cette Ligne directrice ne soit pas contraignante, elle demeure pertinente puisqu’elle reflète les attentes du régulateur sur l’encadrement de l’IA dans le secteur financier. Cet article dresse un sommaire des principales attentes de l’AMF énoncées dans la Ligne directrice.

Classification basée sur les risques

Les attentes de l’AMF pour l’encadrement des risques liés aux SIA reposent sur l’attribution d’une cote de risque à chaque SIA utilisé par les institutions financières. Les mesures à mettre en place devraient être proportionnelles à cette cote de risque. Pour établir cette classification, les institutions financières devraient réévaluer périodiquement divers facteurs, notamment l’utilisation de données personnelles et le niveau de dépendance de l’institution financière envers le SIA, et ajuster la cote de risque en conséquence.

Survol du projet de ligne directrice

  1. Attentes en lien avec le cycle de vie d’un SIA

Les SIA devraient être encadrés à chacune des étapes de leur cycle de vie soit : la conception ou l’approvisionnement ; la mise à l’épreuve ; l’utilisation et la surveillance ; ainsi que la mise hors service ou la modification du SIA. L’AMF expose les attentes suivantes que nous reprenons sommairement :

  • Processus et contrôles proportionnels: Les processus et contrôles devraient être documentés, approuvés et mis en œuvre proportionnellement à la cote de risque du SIA pour chacune des étapes de son cycle de vie.
  • Justification de l’utilisation: Avant de développer ou d’acquérir un SIA, l’institution financière devrait justifier son choix en tenant compte des alternatives disponibles et de son appétit pour le risque.
  • Données d’apprentissage : La qualité et l’équité des données utilisées pour l’apprentissage du SIA devraient être assurées en surveillant et en corrigeant activement les biais générés par le SIA.
  • Développement et acquisition: Le développement d’un SIA devrait suivre des processus robustes axés sur les risques, notamment en incluant des objectifs explicites de cybersécurité, d’explicabilité ou de robustesse.
  • Validation et audit interne : Le processus de validation et d’audit interne du SIA devrait notamment évaluer la cybersécurité, la correction des biais et la discrimination.
  • Approbation des SIA à haut risque : L’utilisation des SIA à haut risque devrait être limitée si des informations essentielles à leur évaluation sont manquantes.
  • Surveillance en continu : Les performances, les résultats et l’utilisation des SIA devraient être surveillés en continu afin de détecter les dérives, biais, facteurs interdits et conflits d’intérêts, à l’aide d’outils technologiques en complément d’une supervision humaine.
  1. Attentes en matière de gouvernance

Les institutions financières devraient, entre autres, définir clairement les rôles et responsabilités des parties prenantes à chaque étape du cycle de vie des SIA et s’assurer de leur niveau de compétence. Ces exigences s’ajoutent à celles prévues dans d’autres lignes directrices de l’AMF[4].

  • Conseil d’administration : Le conseil d’administration devrait promouvoir une culture d’entreprise responsable de l’IA, s’informer sur les SIA à risque élevé au sein de l’entreprise et veiller à la compétence de ses membres en matière d’IA.
  • Haute direction : La haute direction devrait élaborer une politique de gestion des risques liés aux SIA et désigner une personne imputable pour l’ensemble des SIA de l’organisation.
  • Fonction de gestion des risques : La fonction de gestion des risques devrait mettre en place un cadre de validation, élaborer et communiquer une taxonomie des risques et gérer les risques liés à l’utilisation des SIA.
  • Fonction d’audit interne : La fonction d’audit interne devrait examiner l’efficacité de la gouvernance, de la gestion des risques et des contrôles internes pour le développement, l’approvisionnement et l’utilisation des SIA.
  1. Attentes en matière de gestion des risques liés à l’IA

Les institutions financières devraient disposer de politiques, processus et procédures adaptés à la nature, la taille et la complexité de leurs activités et au profil de risque de l’institution et des SIA utilisés.

  • Répertoire des SIA : Les institutions financières devraient tenir un registre centralisé et à jour de l’ensemble des SIA, incluant leur spécificité et leur cote de risque.
  • Évaluation des risques et rapports : Les institutions financières devraient mettre en place des contrôles pour assurer une supervision transparente et communiquer périodiquement l’évaluation des risques aux parties prenantes (utilisateurs, la haute direction, etc.).
  1. Attentes en matière de traitement équitable des clients

L’institution financière devrait garantir un traitement équitable des clients lors de l’utilisation des SIA en maintenant des standards élevés d’éthique et d’intégrité dont notamment :

  • Code d’éthique : L’institution financière devrait s’assurer que son code d’éthique permette de maintenir des standards élevés d’éthique et d’intégrité dans l’utilisation des SIA.
  • Discrimination et biais : L’institution devrait corriger et documenter les facteurs discriminatoires et les biais dans les décisions prises par des SIA, et produire des rapports à cet égard.
  • Qualité des données : L’institution financière devrait s’assurer de la qualité et de la véracité des données personnelles utilisées par les SIA.
  • Communication au client : L’institution financière devrait fournir des informations claires lors de l’obtention du consentement des clients pour l’utilisation de leurs données personnelles avec un SIA, informer les clients lorsqu’ils interagissent avec un SIA, garantir la possibilité d’avoir accès à une personne humaine et expliquer les décisions prises ou assistées par un SIA.

Conclusion

En énonçant ses attentes en matière d’encadrement des SIA, l’AMF invite les institutions financières à adopter une approche proactive et responsable dans la gestion des risques liés à l’IA, tout en assurant la protection des clients. Bien que ces attentes ne soient pas contraignantes, elles constituent un signal fort quant à la direction que prendra la réglementation dans les prochaines années. Les professionnels du secteur financier ont donc intérêt à tenir compte des attentes de l’AMF afin de se préparer aux évolutions réglementaires en matière d’IA.

La période de consultation publique est en cours et les personnes intéressées sont invitées à soumettre leurs commentaires d’ici le 7 novembre 2025 en écrivant à l’adresse courriel suivante : consultation-en-cours@lautorite.qc.ca.

Par Me Julie-Martine Loranger, Avocate émérite, associée chez McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L., s.r.l., avec la collaboration de Vincent Leduc et Bronté Anderson respectivement associée, stagiaire et étudiante chez McCarthy Tétrault, S.EN.C.R.L.

Le présent article ne constitue pas un avis juridique.

[1] Voir : https://lautorite.qc.ca/fileadmin/lautorite/reglementation/lignes-directrices-assurance/ld-gestion-risque-modele-2025_fr.pdf.

[2] Notamment aux assureurs autorités, aux coopératives de services financiers, aux sociétés de fiducie autorisées et aux institutions de dépôts autorisées.

[3] À titre d’exemple, l’AMF a choisi de définir « Système d’intelligence artificielle » au lieu d’« intelligence artificielle », ce qui s’aligne avec les Principes de l’OCDE en matière d’IA. Voir : Principes de l’OCDE en matière d’IA.

[4] Voir notamment la Ligne directrice sur la gouvernance et la Ligne directrice sur la gestion du risque de modèle.

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Le secret professionnel des CPA au Québec https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/le-secret-professionnel-des-cpa-au-quebec/ Mon, 15 Sep 2025 12:01:33 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=109227  ZONE EXPERTS — Quand le devoir de confidentialité trouve ses limites.

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La décision autorité des marchés financiers c. Ordre des comptables agréés du Québec[1] a clarifié la portée du secret professionnel des comptables professionnels agréés (CPA) au Québec. La Cour d’appel a clarifié l’étendue du secret professionnel des CPA et les situations pour lesquelles il peut être levé. Bien que le respect du secret professionnel demeure la règle pour le CPA, la Cour a noté deux exceptions en vertu de la Loi sur l’encadrement du secteur financier (la LESF)[2] où le CPA n’est pas tenu de le respecter : lorsqu’il agit à titre de dénonciateur (whistleblower) et dans le cadre d’une enquête de l’Autorité des marchés financiers (AMF).

Qu’est-ce que le secret professionnel des CPA ?

Le secret professionnel des CPA est l’obligation de préserver la confidentialité de tout renseignement obtenu dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions. Cette obligation comporte deux volets : d’une part, l’interdiction formelle de divulguer tout renseignement confidentiel obtenu auprès d’un client et, d’autre part, le devoir de protéger activement ces renseignements contre tout accès non autorisé. La portée du secret professionnel est vaste : elle englobe tant les communications orales que les documents écrits, électroniques ou numériques[3].

Au Québec, le droit au secret professionnel jouit d’une protection quasi constitutionnelle puisqu’il est reconnu dans la Charte des droits et libertés de la personne du Québec (la Charte québécoise)[4].

Le droit au secret professionnel appartient au client, seul le client peut renoncer au secret professionnel. En principe, un CPA qui reçoit de l’information protégée par le secret professionnel ne peut pas la divulguer à un tiers. Cependant, la législation prévoit entre autres une exception lorsqu’une disposition expresse autorise la divulgation par le CPA d’information protégée par le secret professionnel[5].

Protection des dénonciateurs (whistleblowers) transmettant des informations confidentielles

L’article 17.0.1 de la LESF prévoit une exception au secret professionnel. En effet, cette disposition permet aux dénonciateurs (whistleblowers) qui constatent un manquement aux lois administrées par l’AMF de lui transmettre des informations confidentielles à sans contrevenir à leur obligation de confidentialité[6].

Cette disposition s’applique également aux CPA et leur permet de dénoncer des manquements malgré le secret professionnel.

Après l’adoption de cette disposition en juin 2018, l’Ordre des comptables agréés du Québec (l’Ordre) a contesté la constitutionnalité de cette exception au secret professionnel, soulevant deux principaux arguments : l’article 17.0.1 de la LESF ne contient pas une disposition expresse permettant d’écarter l’application du secret professionnel et il porte atteinte au droit du client du CPA au respect du secret professionnel prévu par l’article 9 de la Charte québécoise. La Cour a toutefois rejeté ces arguments.

Elle rappelle d’abord que l’article 9 de la Charte québécoise impose une obligation de confidentialité aux professionnels soumis au secret professionnel, sauf si une loi les autorise expressément à divulguer les renseignements confidentiels. La Cour d’appel a confirmé le jugement de première instance en concluant que l’article 17.0.1 de la LESF constitue bel et bien une disposition expresse. Ainsi, il permet aux CPA de transmettre des informations confidentielles sans enfreindre leur obligation de confidentialité.

La Cour souligne également que l’expectative raisonnable de vie privée des clients commerciaux des CPA n’est pas suffisante pour que la levée du secret professionnel en vertu de l’article 17.0.1 de la LESF viole le droit des clients au respect du secret professionnel. En effet, dans le contexte d’activités financières réglementées, l’expectative de vie privée doit être balancée avec l’objectif de protection du public. La Cour précise que l’expectative de vie privée des informations commerciales ou financières est moindre que celle en lien avec de l’information de nature personnelle (p. ex. : le nom, l’état de santé, etc.). Ainsi, l’article 17.0.1 de la LESF ne porte pas atteinte au droit du client du CPA au respect du secret professionnel.

Il est important de noter que, contrairement à l’article 15.1 de la LESF[7], l’article 17.0.1 n’impose aucune obligation de divulgation aux CPA. Il leur offre une possibilité, sans les y contraindre.

L’obligation de transmettre des informations confidentielles dans le cadre d’une enquête

Cette deuxième exception impose aux CPA l’obligation de transmettre des informations confidentielles lors d’enquête de l’AMF, même si cela viole le secret professionnel. En vertu de l’art. 15.1 de la LESF, un CPA ne peut refuser de communiquer à l’AMF un renseignement ou un document qu’il a obtenu ou préparé dans le cadre de ses fonctions, même s’il est couvert par le secret professionnel. Autrement dit, lorsqu’une demande formelle est émise par l’AMF, le CPA est dans l’obligation de transmettre les renseignements demandés, ce qui représente une exception claire au secret professionnel.

Conclusion

Ces développements législatifs et jurisprudentiels redéfinissent les contours du secret professionnel des CPA au Québec. Il faut désormais distinguer les situations où la divulgation d’informations confidentielles est permise, comme dans le cas des dénonciations protégées par l’article 17.0.1 de la LESF, de celles où elle devient une véritable obligation, comme le prévoit l’article 15.1. La règle demeure celle du respect du secret professionnel, mais elle connaît des exceptions précises, encadrées par la loi et validées par les tribunaux. Pour les CPA, une compréhension claire de ces limites est essentielle afin de concilier leur devoir de confidentialité avec leurs obligations légales en matière de collaboration avec l’AMF.

Julie-Martine Loranger est avocate émérite, associée chez McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L., s.r.l., article rédigé avec la collaboration de Yassine Khadir, Vincent Leduc et Hasmik Grigoryan, respectivement associée, sociétaire, stagiaire et étudiante chez McCarthy Tétrault, S.EN.C.R.L.

Le présent article ne constitue pas un avis juridique.

[1] Autorité des marchés financiers c. Ordre des comptables agréés du Québec, 2024 QCCA 1500.

[2] RLRQ, c. E-6.1.

[3] ORDRE DES COMPTABLES PROFESSIONNELS AGRÉÉS DU QUÉBEC, « Le respect du secret professionnel — un droit quasi constitutionnel appartenant à mon client », Montréal.

[4] Charte des droits et libertés de la personne, RLRQ, c. C-12., art. 9. Le secret professionnel des CPA repose également sur d’autres textes législatifs : Code des professions, RLRQ, c. C-26, art. 60.4 et Code de déontologie des comptables professionnels agréés, RLRQ, c. C-48.1, r.6.1, art. 39.

[5] Notons qu’une exception au secret professionnel existe également lorsqu’il y a un danger imminent de lésions graves ou de mort envers une personne ou un groupe de personne identifiables (art. 60.4 al. 3 Code des professions). Cependant, le professionnel n’a pas l’obligation de divulguer de l’information protégée par le secret professionnel ; il peut le faire si les conditions sont remplies.

[6] Il est toutefois important de préciser que cette exception ne s’applique pas aux avocats et aux notaires, en raison de l’importance capitale du secret professionnel dans ces professions. Comme l’a souligné le juge Lamer, « le secret professionnel de l’avocat doit demeurer aussi absolu que possible pour conserver sa pertinence » Lavallée, Racket & Heintz c. Canada (Procureur général) ; Ottenheimer & Baker c. Canada (Procureur général) ; R. c. Fink, 2002 CSC 61). Cette protection rigoureuse vise à garantir la confiance nécessaire entre le client et son conseiller juridique.

[7] Loi sur l’encadrement du secteur financier, supra note 1, art. 15.1.

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Les contrats de courtages sont exclus de la Loi sur la protection du consommateur https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/les-contrats-de-courtages-sont-exclus-de-la-loi-sur-la-protection-du-consommateur/ Mon, 18 Aug 2025 11:01:54 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=108347 ZONE EXPERTS - Une décision de la Cour d’appel le confirme.

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Le 30 janvier 2025, la Cour d’appel a rendu sa décision dans le dossier Salko c. Financière Banque Nationale inc.[1] concernant les plus grandes firmes de courtage en valeurs mobilières au Canada. Cette décision vient clarifier le champ d’application de la Loi sur la protection du consommateur[2] (ci-après la « LPC ») et de la Loi sur les valeurs mobilières[3] (ci-après la « LVM ») en confirmant que les contrats de courtage et concernant les opérations régies par la LVM sont entièrement exclus de l’application de la LPC.

Résumé des faits

En mars 2020, Nicolas Salko (ci-après « Salko ») a ouvert des comptes de « courtage à escompte » en ligne auprès de la Banque Nationale Courtage direct, une division de la Financière Banque Nationale inc. (ci-après « BNCD/FNB »)[4]. Ce type de compte permet au titulaire du compte d’acheter et de vendre des actions en ligne par lui-même sans bénéficier de conseils en matière de placement[5].

En août 2020, Salko a utilisé son compte en dollars canadiens pour acheter et vendre successivement des titres en dollars américains transigés sur les bourses américaines. Salko pensait réaliser un gain en raison des fluctuations du prix des titres. Cependant, il allègue que compte tenu de ce qu’il identifie comme des frais de conversion de devises pour ces opérations, il aurait plutôt réalisé une perte[6]. Salko reconnaît par contre que ces frais de conversion seraient prévus dans la Convention de compte au comptant et dans le Barème des frais généraux que Salko avait accepté en ouvrant ses comptes chez BNCD/FNB[7].

Salko a allégué que les frais de conversion imposés par la BNCD/FNB contrevenaient à la LPC puisque les frais n’avaient pas été préalablement divulgués (art. 12 LPC) et qu’ils constituaient des représentations fausses ou trompeuses (art. 219 et 224(c) LPC). Salko a également allégué que les frais de conversion contreviendraient aux articles 1491 et 1554 du Code civil du Québec (ci-après « CcQ ») sur la réception de l’indu[8].

Salko a donc déposé une demande d’autorisation d’exercer une action collective contre les firmes de courtage en valeurs mobilières canadiennes qui prévoyaient des clauses similaires en matière de conversion de devises[9].

Décision de 1re instance

En première instance, le tribunal a autorisé l’action collective pour la restitution des frais de conversion en vertu des articles 1491 et 1554 CcQ., mais n’a pas autorisé le recours en vertu de la LPC puisque les contrats concernant des opérations de courtage régies par la LVM étaient exclues du champ d’application de la LPC[10]. Le demandeur a ensuite fait appel de cette décision. La Cour d’appel a maintenu la décision de première instance et a rejeté l’appel[11].

Analyse de la Cour d’appel

Pour déterminer que le recours n’était pas possible en vertu de la LPC, la Cour a débuté son analyse en examinant le libellé de l’article 6(a) LPC. Celui-ci prévoit que « sont exclus de l’application de la [LPC] les pratiques de commerce et les contrats concernant une opération régie par la Loi sur les instruments dérivés ou par la Loi sur les valeurs mobilières[12]. ». Salko soutenait que cette disposition n’excluait pas son contrat de courtage en entier, mais uniquement les opérations régies par la LVM[13]. Ainsi, selon lui, la LPC s’appliquerait aux opérations connexes à son contrat de courtage, dont les opérations de conversion de devises, qui ne sont pas régies par la LVM[14].

La Cour d’appel n’a pas retenu cet argument pour deux raisons principales.

Premièrement, l’article 6(a) LPC a été adopté pour éviter un double emploi entre le régime de protection de la LPC et celui de la LVM. En effet, il existait déjà un régime autonome de protection des épargnants en matière de valeurs mobilières lors de l’adoption de la LPC[15].

Deuxièmement, la conversion de devises n’était pas une opération distincte de l’achat/vente de titres. La Cour d’appel a indiqué que le libellé de l’article 6(a) LPC était clair et qu’il ne se prêtait pas à interprétation. La portée de l’exclusion s’étendait aux pratiques de commerce et aux contrats en lien avec une opération sur les valeurs mobilières[16]. La conversion de devises lors de l’achat ou la vente de valeurs mobilières était donc exclue du champ d’application de la LPC.

La Cour d’appel a également précisé que, selon les faits de la demande, la conversion de devises ne pouvait avoir lieu sans qu’il y ait une opération sur les valeurs mobilières[17]. En effet, lorsqu’un client soumettait un ordre d’achat, il devait confirmer simultanément son acceptation du nombre et du prix d’achat des titres, mais également du taux de change applicable (qui incluait tout revenu touché par FBN)[18]. La conversion de devises était donc indissociable de l’achat/vente de titres[19].

Bref, cet arrêt constitue une décision d’importance au Québec, confirmant qu’un contrat de courtage et concernant des opérations sur valeurs mobilières sont exclus du champ d’application de la LPC.

Julie-Martine Loranger est avocate émérite, associée chez McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L., s.r.l., l’article a été rédigé avec la collaboration de Geneviève St-Cyr Larkin, Yassine Khadir et Vincent Leduc respectivement associée, sociétaire et stagiaire chez McCarthy Tétrault, S.EN.C.R.L.

Le présent article ne constitue pas un avis juridique.

[1] 2025 QCCA 74 (ci-après « Salko »).

[2] c. P-40.1.

[3] c. V.1-1.

[4] par. 8-10, Salko.

[5] par. 8, Salko.

[6] par. 10, Salko.

[7] par. 8, Salko.

[8] c. CCQ-1991.

[9] par.14, Salko.

[10] par. 11, Salko c. Financière Banque Nationale inc., 2022 QCCS 3361 (1ère instance).

[11] par. 6, , Salko.

[12] art. 6(a) LPC.

[13] par.37, Salko.

[14] par. 37, Salko.

[15] par. 53, Salko.

[16] par. 59, Salko.

[17] par. 60, Salko.

[18] par. 61, Salko. .

[19] par. 62, Salko.

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L’AMF propose d’encadrer les fonds d’investissement de cryptoactifs https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/lamf-propose-dencadrer-les-fonds-dinvestissement-de-cryptoactifs/ Mon, 16 Jun 2025 11:00:11 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=107896 ZONE EXPERTS — Différentes modifications au Règlement 81-102 ont été présentées pour ce faire.

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En 2020, le premier fonds de cryptoactifs ouverts (Public crypto asset funds) a été approuvé au Canada[1]. Depuis, le nombre de fonds de cryptoactifs ouverts a augmenté significativement au pays. En avril 2023, on dénombrait 22 fonds de cryptoactifs ouverts au Canada[2]. C’est dans ce contexte que les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (les « ACVM ») ont mis en place un projet visant à encadrer les fonds de cryptoactifs ouverts. En janvier 2024, les ACVM ont publié un projet de modification du Règlement 81-102 sur les fonds d’investissement[3]

(« Règlement 81-102 ») afin d’inclure les fonds d’investissement souhaitant investir directement ou indirectement dans les cryptoactifs.

L’Autorité des marchés financiers (l’« AMF »), le régulateur québécois en valeurs mobilières, a ensuite tenu une séance de consultation et a publié le 27 mars 2025 une version révisée d’un projet de modification du Règlement 81-102. Bien que ce projet ne soit pas encore en vigueur, il est intéressant d’examiner les principales modifications proposées au Règlement 81-102.

Modification de la définition de « OPC alternatif »

Le projet de modification propose la mise à jour de la définition d’organisme de placement collectif alternatif (alternative mutual fund) (« OPC alternatif ») afin d’y inclure les OPC qui investissent dans les cryptoactifs[4].

Ajout de restrictions sur les types de placements

Investissement direct limité aux OPC alternatifs et aux fonds d’investissement à capital fixe: Seuls les OPC alternatifs et les fonds d’investissement à capital fixe pourront acquérir, vendre, détenir ou utiliser des cryptoactifs directement[5]. Pour pouvoir investir dans les cryptoactifs, les OPC non alternatifs devront : (i) recourir à des OPC alternatifs ou à des fonds à capital fixe investissant dans des cryptoactifs ou (ii) investir dans des dérivés dont l’élément sous-jacent est un cryptoactif, mais cet investissement devra être limité à 10 % de la valeur liquidative totale du fonds[6].

Cryptoactif fongible et négociable sur une bourse reconnue : Le projet de règlement prévoit également que pour qu’un OPC alternatif puisse investir dans un cryptoactif, celui-ci doit être fongible et doit être négociable sur une bourse reconnue et, lorsque le cryptoactif est l’élément sous-jacent d’un dérivé visé, il doit satisfaire aux mêmes critères[7].

C’est une restriction additionnelle au type de placement que les OPC alternatifs peuvent faire.

Le premier projet de modification interdisait l’utilisation des cryptoactifs comme titres prêtés, titres transférés ou sûretés dans le cadre (i) d’opérations de prêts de titre (ii) de mises en pensions ou (iii) de prise en pension[8]. Cette restriction a été abandonnée dans le projet de modification du 27 mars 2025.

Ajout de dispositions spécifiques pour la garde des cryptoactifs

Détention des cryptoactifs dans un stockage hors ligne (cold wallet) : Des dispositions spécifiques aux dépositaires et aux sous-dépositaires qui détiennent des cryptoactifs pour le compte de fonds d’investissement (le « dépositaire de cryptoactifs ») sont prévues dans le projet de modification. Le dépositaire de cryptoactifs devra notamment détenir les cryptoactifs dans un stockage hors ligne (aussi connu sous le nom de portefeuille froid, cold wallet) sauf s’ils sont requis pour faciliter une opération de portefeuille du fonds[9].

Transmission d’un rapport annuel d’expert-comptable : Le dépositaire de cryptoactifs devra également, annuellement, obtenir un rapport d’expert-comptable évaluant les engagements de services et les exigences du système quant à la garde des cryptoactifs. Le dépositaire de cryptoactifs devra transmettre ce rapport au fonds d’investissement.

Le premier projet de modification prévoyait l’obligation de maintenir une assurance à l’égard de la garde de cryptoactifs pour le compte d’un fonds d’investissement[10]. Cette obligation n’a pas été reproduite dans le projet de modification du 27 mars 2025.

Ajout des cryptoactifs comme produit de la souscription

Acceptation des cryptoactifs comme produit de la souscription : Sous le régime actuel des fonds d’investissement, les OPC ne peuvent accepter que des valeurs mobilières au lieu d’un paiement en espèce lors de la souscription. Le projet de modification permettra aux OPC qui détiennent des cryptoactifs d’accepter des cryptoactifs comme produit de la souscription s’ils sont jugés acceptables par le conseiller en valeurs mobilières de l’OPC et qu’ils ont une valeur au moins équivalente au prix d’émission des titres de l’OPC obtenus en contrepartie[11].

Bref, les modifications apportées au Règlement 81-102 ont pour objectif d’adapter le régime réglementaire afin de tenir compte des aspects uniques des cryptoactifs comme produit d’investissement pour les fonds d’investissement faisant appel public à l’épargne[12]. Bien que l’AMF sera le premier des régulateurs canadiens en matière de valeurs mobilières à mettre en œuvre ces changements, les autres régulateurs envisagent de mettre en œuvre des modifications similaires dans le futur.

Par Me Julie-Martine Loranger Avocate émérite, associée chez McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L., s.r.l., avec la collaboration de Yassine Khadir et Vincent Leduc respectivement associée, sociétaire et étudiant chez McCarthy Tétrault, S.EN.C.R.L.

Le présent article ne constitue pas un avis juridique.

[1] p.2, CSA Staff Notice 81-336 Guidance on Crypto Asset Investment Funds Thar are Reporting Issuers («CSA Staff Notice 81-336»). (https://www.osc.ca/sites/default/files/2023-07/csa_20230706_81-336_guidance-on-crypto-asset-funds.pdf).

[2] p.2, CSA Staff Notice 81-336.

[3] Projet de Règlement modifiant le Règlement 81-102 sur les fonds d’investissement concernant les cryptoactifs publié le 18 janvier 2024. (https://lautorite.qc.ca/fileadmin/lautorite/reglementation/valeurs-mobilieres/81-102/2024-01-18/2024janv18-81-102-cons-crypto-fr.pdf).

[4] p.4, Avis de publication locale du Règlement modifiant le Règlement 81-102 sur les fonds d’investissement concernant les cryptoactifs (« Avis de modification »), publié le 27 mars 2025. (https://lautorite.qc.ca/fileadmin/lautorite/reglementation/valeurs-mobilieres/81-102/2025-03-27/2025mars27-81-102-crypto-avis-publ-fr.pdf)

[5] p.4, Avis de modification.

[6] p.7, Avis de modification.

[7] p.1, projet de Règlement modifiant le règlement 81-102 sur les fonds d’investissement publié le 27 mars 2025. (https://lautorite.qc.ca/fileadmin/lautorite/reglementation/valeurs-mobilieres/81-102/2025-03-27/2025mars27-81-102-crypto-final-acvm-fr.pdf).

[8] p.7, Avis de modification.

[9] p.4, Avis de modification.

[10] p.8, Avis de modification.

[11] p.5, Avis de modification.

[12] p.2, Avis de modification.

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Le shadow trading : à surveiller ? https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/le-shadow-trading-a-surveiller/ Mon, 12 May 2025 11:00:36 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=107168 ZONE EXPERTS - Le phénomène s’avère souvent difficile à détecter.

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Le 5 avril 2024, la Securities and Exchange Commission (« SEC ») a obtenu gain de cause dans la décision SEC v. Panuwat[i], élargissant ainsi la portée des délits d’initié aux opérations d’initiés parallèles aussi connues sous l’expression anglaise « shadow trading ». C’est la première décision aux États-Unis qui traite du concept de shadow trading.

Qu’est-ce que le shadow trading ?

Une information sur un émetteur assujetti qui est (i) inconnue du public et (ii) susceptible d’affecter la décision d’un investisseur raisonnable est une information privilégiée[ii]. Toute personne qui a une connexité avec l’émetteur assujetti (administrateurs, dirigeants, actionnaire avec 10 % des droits de vote) ou qui obtient une information privilégiée devient un initié et ne peut effectuer d’opération sur les titres de cet émetteur assujetti[iii]. S’il le fait, il commet un délit d’initié.

Il existe 3 principaux types de délits d’initiés :

  1. Opérations directes : Un initié, notamment un dirigeant ou un administrateur, négocie les titres de son émetteur assujetti sur la base d’information privilégiée obtenue en raison de sa position au sein de l’émetteur assujetti.
  2. Tuyautage : Un initié partage une information privilégiée avec un tiers. Ce tiers effectue alors des opérations sur les titres de l’émetteur assujetti sur la base de cette information privilégiée.
  3. Détournement : Une personne effectue des opérations sur la base d’information qu’elle sait avoir été obtenue de manière illégitime, quel que soit son lien avec l’émetteur assujetti.

Dans ces trois cas, il y a utilisation d’information privilégiée d’un émetteur assujetti pour effectuer des opérations sur les titres de ce même émetteur assujetti.

Le shadow trading est, quant à lui, un délit d’initié qui consiste à utiliser de l’information privilégiée relative à un émetteur assujetti afin d’acheter ou de vendre des actions d’un autre émetteur assujetti dont le cours est susceptible d’être affecté par cette information privilégiée. Ce type de délit d’initié est un phénomène qui est largement répandu puisqu’il est plus difficile à détecter par les autorités que les 3 principaux types de délits d’initiés[iv].

L’affaire SEC v. Panuwat

Dans la décision SEC v. Panuwat, Matthew Panuwat (« Panuwat »), un dirigeant de Medivation inc. (« Medivation ») a obtenu de l’information privilégiée à l’effet que les actions de Medivation allaient être achetées par Pfizer pour un montant supérieur à leur prix au marché. Quelques minutes plus tard, Panuwat a acheté des options d’achat sur des actions d’Incyte, une entreprise comparable œuvrant dans la même industrie et le même marché que Medivation. Panuwat misait que l’annonce publique de l’acquisition de Medivation par Pfizer entraînerait une augmentation de la valeur des actions d’Incyte puisque les deux entreprises étaient similaires. Lors de l’annonce de l’acquisition de Medivation, l’action d’Incyte a bondi de 8 %, permettant ainsi à Panuwat de réaliser un profit de 100 000 $ dollars américains.

La SEC a allégué que l’acquisition de titres d’une entreprise comparable, alors que l’on détient des informations privilégiées sur l’acquisition d’un émetteur assujetti, constituait un délit d’initié. La SEC a soutenu que l’acquisition de Medivation aurait été perçue par un investisseur raisonnable comme ayant considérablement modifiée l’ensemble des informations disponibles à l’égard non seulement de Medivation, mais également d’Incyte. Le tribunal a conclu que Panuwat avait commis un délit d’initié, reconnaissant ainsi pour la première fois aux États-Unis la théorie du shadow trading.

Qu’en est-il au Canada ?

De notre côté de la frontière, il n’y a pas encore eu de décision en lien avec le shadow trading. Considérant l’étendue du phénomène de shadow trading, il est fort probable que les régulateurs canadiens en valeurs mobilières y soient confrontés prochainement.

Au Québec, l’article 189.1 de la Loi sur les valeurs mobilières[v] prévoit spécifiquement qu’un initié ne peut pas exploiter une information privilégiée afin d’effectuer des opérations sur les titres d’un autre émetteur assujetti dès lors que leur cours est susceptible d’être influencé par les fluctuations des titres de l’émetteur assujetti dont il détient de l’information privilégiée. La législation québécoise prévoit donc explicitement l’interdiction du shadow trading.

Dans les autres provinces, la législation en matière de délit d’initié n’interdit pas explicitement le shadow trading. Cependant, les régulateurs pourraient invoquer la compétence résiduelle en matière d’intérêt public des tribunaux afin d’obtenir l’imposition de sanctions en lien avec le shadow trading[vi].

Bref, bien que la théorie du shadow trading n’ait pas encore été invoquée devant les tribunaux canadiens, les régulateurs disposent néanmoins des outils nécessaires pour sanctionner cette pratique. Les émetteurs assujettis devraient également mettre à jour leurs politiques internes afin de tenir compte des pratiques de shadow trading. Il reste à voir comment les régulateurs encadreront cette pratique.

Le présent article ne constitue pas un avis juridique.

Par Me Julie-Martine Loranger, Ad.E., avec la collaboration de Yassine Khadir, stagiaire en droit chez McCarthy Tétrault.

[i] Numéro de dossier 21-cv-06322-WHO. La décision a été portée en appel le 8 novembre 2024.

[ii] Loi sur les valeurs mobilières, RLRQ c. V-1.1, art. 5 (ci-après « LVM »).

[iii] Art. 89 et 187 LVM. Notez qu’au Québec, lorsque l’on obtient de l’information privilégiée, peu importe la manière dont on l’obtient, on devient un initié (art. 189 par. 6 LVM).

[iv] Voir Shadow Trading, M. Mehta, et al, The Accounting Review (juillet 2021), https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=3689154; et Shadow Trading and Macroeconomic Risk, Y. Lee et A. Romano, Harvard Business Law Review (2023), https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=3731719.

[v] Art. 189.1 LVM.

[vi] Par exemple : Loi sur les valeurs mobilières, L.R.O. 1990, c.-S.5, art. 127.

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L’AMF dévoile son nouveau cadre de surveillance https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/lamf-devoile-son-nouveau-cadre-de-surveillance/ Mon, 14 Apr 2025 11:12:28 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=105888 ZONE EXPERTS - Son objectif est la stabilité financière et la protection des intérêts des clients.

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Le 16 janvier 2025, l’Autorité des marchés financiers (l’« AMF ») a dévoilé la mise à jour de son cadre de surveillance des institutions financières et des agents d’évaluation du crédit (ci-après les « entités assujetties ») (le « Cadre »)[1]. Ce Cadre a pour objectif d’assurer que le système financier soit dynamique, intègre et digne de la confiance du public[2].

Le nouveau Cadre adopte une approche de surveillance axée sur les risques présentant des impacts potentiels les plus importants pour : la stabilité financière et la protection des intérêts des clients[3]. Le nouveau Cadre se veut également dynamique afin de s’adapter aux changements internes et externes des entités assujetties et d’intervenir au moment opportun.

Nous examinerons certains des changements apportés au Cadre soit :

  • Une approche de surveillance plus dynamique et prospective ;
  • Une transparence accrue et des échanges en continu avec les entités assujetties ;
  • Une importance accordée aux pratiques commerciales et au traitement équitable des clients ; et
  • Un profil de risque qui vise à évaluer la résilience des institutions financières.

Approche de surveillance plus dynamique et prospective

Le nouveau Cadre prévoit une formalisation des vigies en continu des environnements internes (notamment les tendances en matière de stratégies, produits, gouvernance ou pratiques) et externes (notamment les changements macroéconomiques et les innovations technologiques) des entités assujetties[4]. Une vigie spécifique est également effectuée pour les risques en émergence. Cela permettra à l’AMF d’intervenir en temps opportun puisqu’elle maintient une lecture des risques à jour.

Le nouveau Cadre prévoit également que L’AMF passe d’un plan de surveillance de trois ans mis à jour annuellement à un plan de surveillance annuel mis à jour trimestriellement ou au besoin[5]. L’aspect dynamique du nouveau plan de surveillance permettra de l’ajuster lorsqu’un événement survient dans l’environnement interne ou externe de l’entité assujettie et qu’il modifie l’évaluation des risques[6].

Enfin, le nouveau Cadre prévoit une évolution des modes et travaux de surveillance. En effet, la nature des travaux de surveillance de l’AMF peut prendre diverses formes dont notamment des demandes d’informations ponctuelles, d’auto-évaluation ou de rencontres périodiques[7]. Les travaux de surveillance s’intensifient en fonction de l’augmentation du niveau de risque ou du stade d’intervention[8]. L’AMF précise également que ces travaux de surveillance peuvent viser une entité ou une industrie (surveillance transversale).

Transparence accrue et des échanges en continu avec les entités assujetties

Le nouveau Cadre prévoit une communication accrue avec les entités assujetties en fonction de leur catégorisation[9]. Ces échanges en continu permettent un partage d’information sur les risques et tendances entre l’AMF et les entités assujetties.

Le nouveau Cadre prévoit également la communication en temps opportun avec les entités assujetties de tout développement en matière d’encadrement et de surveillance. Par exemple, dans le cadre de travaux de surveillance, l’AMF discute des observations et des recommandations avec la haute direction avant de les finaliser[10]. Cette transparence permet de donner de la prévisibilité aux entités assujetties[11].

Cette communication accrue a pour objectif de renforcer la collaboration entre les entités assujetties et l’AMF.

Importance accordée aux pratiques commerciales et au traitement équitable des clients

Dans le nouveau Cadre, l’AMF accorde une importance particulière aux pratiques commerciales et au traitement équitable des clients lors de l’identification et l’évaluation des risques. L’AMF tient maintenant compte, non seulement de l’impact des pratiques commerciales sur l’entité assujettie, mais également de leur impact sur les clients[12].

En effet, une pratique commerciale inadéquate pourrait avoir un faible impact sur l’entité assujettie, mais avoir un impact important sur les clients[13]. En tenant compte des clients dans son évaluation, l’AMF compte assurer une meilleure protection des clients.

Profil de risque qui vise à évaluer la résilience des institutions financières

Afin de déterminer le profil de risque, l’AMF fait l’analyse de 4 composantes. L’analyse de la composante « Risques non financiers » permet de déterminer la résilience opérationnelle de l’institution financière, soit sa capacité à opérer en cas de perturbation[14]. L’analyse des composantes « Risques financiers et d’assurance » et « Situation financière » permet de déterminer la résilience financière de l’institution financière, soit sa capacité à résister à des périodes de tensions financières[15]. La dernière composante, « Culture, gouvernance et fonction de supervision », permet de déterminer de manière transversale aux autres composantes si la gestion des risques fait partie intégrante de la culture d’entreprise, et ce, particulièrement au niveau du conseil d’administration et de la haute direction[16].

Le Cadre s’applique aussi différemment pour les agences d’évaluation du crédit (« AÉC ») et certaines institutions financières. Les AÉC ne sont soumis à une évaluation que sur deux des quatre composantes, soit celle sur la Culture, gouvernance et fonction de supervision ainsi que celle des Risques non financiers. Les organismes d’autoréglementation et les unions réciproques, quant à eux, ne sont évalués que sur la base de la composante Situation financière.

Suite à cette analyse, l’AMF attribue une cote de profil de risque, variant de « faible » à « très élevée », qui exprime l’impact que la matérialisation d’un risque pourrait avoir sur l’institution financière. L’AMF note que le risque « faible » ne signifie pas un risque nul. Cela tend plutôt à indiquer que l’institution financière met en place des mesures de gestions de risques suffisantes et est considérée comme résiliente face à la matérialisation d’un risque[17]. Cette nouvelle analyse permettra d’assurer la stabilité du système financier face aux potentielles perturbations.

Bref, en adoptant un nouveau Cadre plus dynamique et prospectif, l’AMF se dote des outils nécessaires pour répondre efficacement aux nouveaux risques. Cette approche lui permettra également d’intervenir en temps opportun et de favoriser la transparence dans ses communications avec les entités assujetties.

Par Me Julie-Martine Loranger, avocate émérite, associée chez McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L., s.r.l., avec la collaboration de Yassine Khadir et Vincent Leduc respectivement associée, sociétaire et étudiant chez McCarthy Tétrault, S.EN.C.R.L..

Le présent article ne constitue pas un avis juridique.

[1] https://lautorite.qc.ca/grand-public/salle-de-presse/actualites/fiche-dactualite/lautorite-met-a-jour-son-cadre-de-surveillance-des-institutions-financieres-et-des-agents-devaluation-du-credit

[2] P.7

[3] P.7

[4] P.11

[5] P.14

[6] P.13

[7] P.15

[8] P.14

[9] P.9

[10] P.16

[11] P.9

[12] P.13

[13] P.9

[14] P.12

[15] P.12

[16] P.11

[17] P.13

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L’affaire Autorité des marchés financiers c. XT.com Exchange https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/laffaire-autorite-des-marches-financiers-c-xt-com-exchange/ Mon, 17 Mar 2025 11:45:58 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=105775 ZONE EXPERTS — Un message en matière de conformité envoyé aux propriétaires et aux exploitants de plateformes de négociation de cryptoactifs.

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Le 20 septembre 2023, le Tribunal administratif des marchés financiers (le « TMF ») du Québec a rendu une décision non contestée contre XT.com Exchange (« XT Exchange ») et BZ Limited (« BZ »), opérant sous le nom de XT Exchange[i]. BZ, est une société constituée en vertu des lois de Hong Kong, et est propriétaire de XT Echange. XT Exchange est une plateforme de négociation de cryptoactifs en ligne basée aux Seychelles ayant son siège social à Dubaï, se présentant comme « la principale bourse de cryptoactifs dotée de capacités de trading social »[ii], et est classée parmi les plus grandes plateformes de négociation de cryptoactifs en termes de volume de transactions. Cette plateforme a plus de 3 millions d’utilisateurs et propose plus de 500 cryptoactifs[iii]. Dans les faits, le Tribunal a considéré que les deux compagnies, BZ et XT Exchange, agissaient de manière conjointe comme une seule et même personne.

XT Exchange offrait des produits d’investissement liés aux cryptoactifs au Québec, y compris des contrats sur cryptoactifs, des contrats sur cryptoactifs non fongibles (NFT), des contrats à terme (futures contracts), des programmes de rendement (savings programs) et des contrats liés à la validation par preuve d’enjeu (staking contracts). Suite aux procédures de l’Autorité des marchés financiers (« AMF ») contre XT Exchange en mars 2023, XT Exchange a informé l’AMF qu’elle avait mise en place des mesures pour bloquer aux adresses IP canadiennes l’accès à son site web. Cependant, bien que les Canadiens ne pouvaient plus créer de nouveaux comptes, le personnel de l’AMF a été en mesure de continuer à transiger dans un compte créé avant que le blocage géographique ne prenne effet.

Le TMF a conclu que les produits offerts par XT Exchange constituaient des contrats d’investissement et qu’ils avaient fait l’objet d’un placement sans prospectus, contrevenant ainsi à la Loi sur les valeurs mobilières[iv]. Le TMF a également conclu que les contrats à terme (future contracts) offerts par XT Exchange étaient des dérivés et qu’ils avaient été créés et mis en marché par XT Exchange alors que XT Exchange n’était pas agréée par l’AMF, contrevenant ainsi à la Loi sur les instruments dérivés[v]. De plus le TMF a précisé que, en exploitant et rendant disponible le site web XT.com, qui facilitait des opérations liées aux cryptoactifs[vi], XT Exchange a agi en tant que courtier en valeurs mobilières et en dérivés sans être inscrit auprès de l’AMF.

Lors de la détermination de la sanction, le TMF a tenu compte de plusieurs facteurs dont notamment :

  • L’absence de collaboration de XT Exchange avec l’AMF[vii]: XT Exchange n’a pas répondu aux nombreuses notifications de l’AMF concernant les procédures. Lors de l’audience, BZ n’a pas été représentée et n’a pas justifié un motif valable pour son absence. Le TMF a indiqué que la non-collaboration de XT Exchange et BZ démontrait une absence de respect envers les régulateurs.
  • L’aspect volontaire de la contravention : XT Exchange avait des activités internationales et devait donc savoir que ses activités étaient assujetties à la réglementation en valeurs mobilières au Canada[viii]. De plus, XT Exchange a continué à contrevenir à la réglementation après avoir été informée des procédures à son égard[ix]. XT Exchange a donc volontairement contrevenu à la réglementation en valeurs mobilières.
  • L’absence de facteurs atténuants : Le TMF a constaté l’absence de facteurs atténuants[x]

Le TMF a précisé qu’un message clair doit être envoyé aux propriétaires et aux exploitants de plateformes de négociation de cryptoactifs qui agissent en contravention à la législation en valeurs mobilières canadienne: la conformité est leur seule avenue possible[xi]. C’est pour cela que le TMF a imposé une pénalité administrative de 2 millions de dollars contre XT Exchange et a ordonné la cessation de toutes les opérations de valeurs mobilières et de dérivés au Québec, sauf celles nécessaires pour permettre aux utilisateurs de retirer leurs actifs et de fermer leurs comptes. Le TMF a également ordonné à XT Exchange de bloquer l’accès à tous les utilisateurs québécois dans les deux mois suivant la décision ainsi que de notifier aux utilisateurs, dans les deux jours suivant la notification de la décision, le délai dans lequel le site web devient inaccessible et du fait qu’ils doivent retirer leurs actifs dès que possible.

Cette décision est l’une des premières qui sanctionne les plateformes de négociations de cryptoactifs au Canada. Bien qu’elle date de septembre 2023, les tribunaux l’ont citée à de nombreuses reprises[xii]. Le message est clair, les autorités en valeurs mobilières canadiennes sont à l’affût et elles vont sévir contre les plateformes de négociations de cryptoactifs qui ne se conforment pas à la réglementation en valeurs mobilières. D’autre part, la question de l’application des jugements s’avère difficile, les entreprises étant basées aux Seychelles et Dubaï, l’AMF risque de rencontrer des difficultés majeures quant à la collecte des sanctions imposées.

Par Julie-Martine Loranger, avocate émérite, associée chez McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L., s.r.l., avec la collaboration de Yassine Khadir et Vincent Leduc respectivement associée, sociétaire et étudiant chez McCarthy Tétrault, S.EN.C.R.L.

Le présent article ne constitue pas un avis juridique.

[i] Autorité des marchés financiers c. XT.com Exchange (XT Exchange et XT.com), 2023 QCTMF 62

[ii] Par. 4.

[iii] Par. 239, 241

[iv] Par. 137, RLRQ, c. V-1.1., art. 11.

[v] RLRQ, c. I-14.01, art. 82.

[vi] Par. 223 à 225

[vii] Par. 267, 272, 273, 274, 275

[viii] Par. 284

[ix] Art. 278, 274

[x] Par. 288.

[xi] Par. 275

[xii] À titre d’exemple : Autorité des marchés financiers c. Coinex Global Limited, 2023 QCTMF 75, Autorité des marchés financiers c. Élan Future inc., 2023 QCTMF 93 et Re LiquiTrade Ltd., 2024 BCSECCOM 406.

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La fourchette raisonnable https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/la-fourchette-raisonnable/ Mon, 17 Feb 2025 11:53:34 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=105648 ZONE EXPERTS – Tout un processus entoure une entente de règlement.

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Prenons l’hypothèse suivante : à la suite d’une enquête menée par l’Organisme Canadien de réglementation des investissements (« OCRI ») une entente de règlement intervient entre le personnel de la mise en application et un intimé.

Quelles sont les prochaines étapes pour donner effet à cette entente de règlement?

Par un avis de demande d’audience de règlement, l’OCRI annonce qu’une formation d’instruction tiendra une audience de règlement afin de déterminer si une formation d’instruction devrait accepter l’entente de règlement conclue entre le personnel de la mise en application et l’intimé.

C’est donc au terme d’une audience sur une entente de règlement, conjointement proposée, que celle-ci sera acceptée ou rejetée. Ce n’est également qu’une fois acceptée par une formation d’instruction que l’entente de règlement deviendra publique et prendra plein effet.

À la suite d’une audience de règlement, la formation d’instruction peut accepter ou rejeter l’entente proposée, cependant elle ne peut pas la modifier.

Le rôle de la formation d’instruction, lors de cette audition, est de déterminer si les sanctions proposées se situent à l’intérieur d’une fourchette raisonnable d’adéquation. Les principes qui doivent guider la formation ont été, entre autres, énoncés dans l’arrêt de principe re : Milewski[i].

Les critères d’acceptation d’une entente de règlement ne sont pas identiques aux critères qui s’appliquent dans le cadre de la détermination de la sanction correcte suivant une audience contestée.

« Le conseil de section qui considère une entente de règlement n’aura pas tendance à modifier une sanction dont il juge qu’elle se situe dans une fourchette raisonnable, compte tenu de la procédure de règlement et du fait que les parties se sont entendues. Il ne rejettera pas une entente à moins qu’il estime qu’une sanction se situe clairement à l’extérieur d’une fourchette raisonnable d’adéquation »[ii]

Pour déterminer si la sanction proposée par l’entente de règlement se situe dans une fourchette acceptable, on aura recours à l’analyse d’affaires similaires où un règlement est intervenu. Les sanctions devront être proportionnelles et raisonnables aux contraventions en gardant à l’esprit l’aspect dissuasif des sanctions[iii].

Lors de son examen et analyse, la formation d’instruction tiendra compte du fait qu’il s’agit d’un règlement convenu entre les parties qui permet une résolution rapide des procédures disciplinaires. Il s’agit de l’avantage que constitue le processus de règlement et ce du point de vue de l’intérêt public.

Par Me Julie-Martine Loranger, Avocate émérite, associée chez McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L., s.r.l.

Le présent article ne constitue pas un avis juridique.

[i] Milewski [1999] I.D.A.C.D, no 17

[ii] Milewski [1999] I.D.A.C.D, no17, page 9

[iii] M Partners et Isenberg 2018 OCRCVM 25

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Les sanctions administratives ne survivent pas à la faillite https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/les-sanctions-administratives-ne-survivent-pas-a-la-faillite/ Wed, 15 Jan 2025 11:57:48 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=104358 ZONE EXPERTS — La Cour suprême a tranché.

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La Loi sur la faillite et l’insolvabilité (la LFI) vise deux objectifs principaux : le partage équitable des biens du failli entre les créanciers et la réhabilitation financière du failli, c’est-à-dire de permettre au failli d’avoir un nouveau départ financier. Pour ce faire, à l’issue du processus de faillite, le failli va être libéré de certaines dettes. Il existe cependant des exceptions à ce principe où les dettes vont survivre à la libération du failli.

Dans une récente décision, la Cour suprême du Canada (CSC) a dû déterminer si les ordonnances de remise et les sanctions administratives pécuniaires imposées par la British Columbia Securities Commission (la Commission) survivaient à la libération du failli.

Entre 2007 et 2009, monsieur et madame Poonian (ci-après les Poonians) ont manipulé le marché à l’aide d’un stratagème financier de type pump and dump obtenant approximativement 7 millions de dollars (M$) en gains illégaux[i].

Le stratagème consistait à gonfler artificiellement le prix des actions d’un émetteur public et, ensuite, à vendre ces mêmes actions à des prix très élevés, réalisant ainsi un gain important. La Commission a conclu que les Poonians avaient contrevenu à la législation en valeurs mobilières et leur a alors infligé des sanctions administratives pécuniaires totalisant 13,5 M$ et leur a ordonné de remettre les sommes obtenues à l’aide du stratagème financier, soit une somme totale de 5,6 M$.

À la suite de la décision de la Commission, les Poonians n’ont entrepris aucune démarche pour payer les sommes réclamées et ont déclaré faillite. La Commission a donc saisi les tribunaux afin que les sanctions administratives pécuniaires et les ordonnances de remise survivent à la libération des faillis. C’est dans ce contexte que la CSC a conclu que les ordonnances de remise subsistaient après la libération du failli, mais que les sanctions administratives pécuniaires ne survivaient pas à la libération du failli.

En réponse à la décision de la CSC, la Commission a publié un communiqué de presse réclamant une réforme de la LFI, soulignant que le processus de faillite avait permis à de nombreux contrevenants à la législation en valeurs mobilières de se soustraire aux sanctions administratives pécuniaires.

En effet, depuis 2001 plus de 40 individus et entreprises ont collectivement omis de rembourser 80 M$ à la Commission en déclarant faillite. La Commission a également précisé dans son communiqué que le fait que des sanctions administratives pécuniaires pouvaient être éteintes par la faillite discréditait son devoir de protéger les investisseurs et soulignait une lacune importante de la LFI.

Cette décision illustre l’un des défis des autorités en valeurs mobilières, soit la difficulté d’obtenir les sanctions pécuniaires administratives des contrevenants. Les autorités en valeurs mobilières imposent généralement des sanctions administratives élevées afin de dissuader d’autres contrevenants d’agir de manière similaire. Mais est-ce réellement dissuasif s’il est possible de s’y soustraire en faisant faillite ? Il sera intéressant de voir si cette décision et la prise de position de la Commission inciteront le législateur à modifier la LFI afin de mettre fin à cette porte de sortie pour les contrevenants.

Par Me Julie-Martine Loranger, avocate émérite, associée chez McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L., s.r.l., avec la collaboration de Yassine Khadir et Vincent Leduc, respectivement associée, sociétaire et étudiant chez McCarthy Tétrault.

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[i] Poonian (Re), 2015 BCSECCOM 96 (CanLII), <https://canlii.ca/t/ggsf7>

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Sanction record de 12,9 millions AUD pour Vanguard https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/julie-martine-loranger/sanction-record-de-129-millions-aud-pour-vanguard/ Mon, 16 Dec 2024 11:33:08 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=104309 ZONE EXPERTS - Le régulateur australien s’attaque à l’écoblanchiment

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Le 25 septembre 2024, la Cour fédérale d’Australie a ordonné à Vanguard Investments Australia Ltd (Vanguard) de payer une sanction considérable de 12,9 millions dollars australiens (AUD) (11,9 millions de dollars canadiens — CAD) pour des déclarations contenant de l’information fausse ou trompeuse concernant son Ethically Conscious Global Aggregate Bond Index Fund (le « Fonds ») ainsi que de publier sur son site web un avis de publicité défavorable détaillant ces déclarationsi.

Cette décision fait suite à la première cause initiée par l’Australian Securities and Investments Commission (ASIC) en matière d’écoblanchiment, où la Cour fédérale d’Australie a imposé une sanction de 11,3 millions AUD (10,5 millions CAD) à Mercer Superannuation (Australia) Limited pour des déclarations contenant de l’information fausse ou trompeuse sur l’aspect durable de ses produits d’investissement.

L’ASIC a allégué que Vanguard avait transmis de l’information fausse ou trompeuse du 7 août 2018 au 17 février 2021, en affirmant que le Fonds offrait une occasion d’investissement éthique, qu’une vérification des valeurs mobilières contre des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) était effectuée et que les valeurs mobilières ne respectant pas les critères ESG étaient retirées ou exclues.

Cette information fausse ou trompeuse apparaissait dans les documents d’information du produit (product disclosure statement – PDS) de Vanguard, sur son site web, ainsi que dans une interview et une présentation avec Finance News Network. Vanguard a admis la plupart des allégations de l’ASIC.

Afin de déterminer le montant de la sanction, la Cour fédérale d’Australie a pris en compte certains facteurs aggravants et certains facteurs atténuants pertinents afin de déterminer la pénalité appropriée.

Certains des facteurs considérés par la Cour sont les suivants :

  • Gravité de la conduite trompeuse : Vanguard a développé et fait la promotion du Fonds en réponse à la demande du marché pour des investissements ESG et l’aspect « éthique » du Fonds était sa principale caractéristique. De plus, 74 % des valeurs mobilières du Fonds (en fonction de leurs valeurs marchandes) n’avaient pas été analysées en fonction des critères ESG promis. Bien que la conduite de Vanguard n’ait pas causé de perte financière pour les investisseurs, la Cour fédérale d’Australie a indiqué que la conduite avait le potentiel de leur causer un préjudice en les empêchant d’avoir l’occasion de faire un choix d’investissement correspondant à leurs valeurs.
  • Durée de la conduite trompeuse et l’importance du fonds : La conduite trompeuse s’est poursuivie pendant une période d’environ deux ans et demi et Vanguard gérait 1,1 milliard AUD dans le Fonds qui comptait environ 1000 investisseurs.
  • Le caractère intentionnel de la conduite : Bien que la Cour ait reconnu que la conduite de Vanguard n’était pas intentionnelle, le désir de présenter son Fonds comme « éthiquement soucieux » était plus important que de s’assurer que la composition du Fonds et la vérification des critères ESG étaient correctement communiquées aux investisseurs
  • Implication de cadres supérieurs : Des cadres supérieurs, tels que le responsable des produits, le responsable de la stratégie des produits et le responsable de la gestion des produits, ont participé à l’élaboration des documents d’information continue contenant de l’information fausse ou trompeuse.
  • Autodénonciation et coopération : Lorsque le responsable des risques a pris connaissance du fait que les déclarations des PDS et du site web étaient inexactes, le Fonds a été immédiatement mis en arrêt des opérations. Vanguard a ensuite promptement dénoncé la situation à l’ASIC. De plus, Vanguard a maintenu un haut niveau de coopération tout au long des procédures et de l’enquête de l’ASIC en répondant rapidement aux demandes d’informations et de documents du régulateur. Vanguard a aussi admis pratiquement l’ensemble des allégations de l’ASIC, à l’exception d’une allégation sur la nature et la portée de certaines déclarations. La Cour a accordé à Vanguard une réduction de pénalité de 25% pour souligner sa coopération avec l’ASIC.
  • Améliorations apportées aux procédures de conformité de Vanguard : Lorsque l’information fausse ou trompeuse a été découverte dans le Fonds, Vanguard a procédé à un examen de ses produits d’investissement similaires qui s’appuyaient sur la vérification de critères ESG. De nouvelles politiques et procédures ont également été mises en place pour garantir le respect des obligations d’information continue et ainsi prévenir la transmission d’information fausse ou trompeuse.

Principes clés à retenir

Malgré la coopération de Vanguard avec l’ASIC, la Cour fédérale d’Australie, dans cette instance, a émis une pénalité monétaire importante, représentant un montant équivalant à l’ensemble des profits annuels de Vanguard Investments Australia Ltd et plus de 12 fois le revenu qu’a pu recueillir Vanguard pour la gestion du Fonds, et ce, malgré l’absence de préjudice financier pour les investisseurs.

En remportant deux grandes victoires en matière d’écoblanchiment et en imposant des sanctions civiles record, il appert que l’emphase est mise sur la dissuasion de publier de l’information fausse ou trompeuse sur les investissements ESG.

Au Canada, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) ont publié des indications concernant leurs attentes à l’égard des fonds d’investissement axés sur l’ESG (voir l’avis 81-334 du personnel des ACVM). Il sera intéressant de voir si les ACVM entameront aussi des poursuites afin de dissuader l’écoblanchiment de la part des gestionnaires de fonds.

Par Me Julie-Martine Loranger, avocate émérite, associée chez McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L., s.r.l., avec la collaboration de Yassine Khadir et Vincent Leduc, respectivement associée, sociétaire et étudiant chez McCarthy Tétrault.

Le présent article ne constitue pas un avis juridique.

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