Laboratoire en droit des services financiers (LABFI) – Finance et Investissement https://www.finance-investissement.com Source de nouvelles du Canada pour les professionnels financiers Wed, 16 Apr 2025 11:12:11 +0000 fr-CA hourly 1 https://wordpress.org/?v=5.9.3 https://www.finance-investissement.com/wp-content/uploads/sites/2/2018/02/cropped-fav-icon-fi-1-32x32.png Laboratoire en droit des services financiers (LABFI) – Finance et Investissement https://www.finance-investissement.com 32 32 Régulateurs : risque lié aux partages des pouvoirs en matière disciplinaire https://www.finance-investissement.com/nouvelles/economie-et-recherche/regulateurs-risque-lie-aux-partages-des-pouvoirs-en-matiere-disciplinaire/ Wed, 16 Apr 2025 11:12:11 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=106657 Il constitue une faiblesse dans la protection des clients.

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Pour améliorer la protection des épargnants, l’encadrement disciplinaire à la fois des représentants et des entreprises ainsi que de leurs dirigeants doit être exercé dans les faits par un même organisme. Cet organisme doit être en mesure d’identifier la faute du représentant et potentiellement le manque de surveillance du cabinet en même temps, ce qui n’est pas le cas en pratique pour les acteurs du secteur de l’épargne collective, de l’assurance de personnes et de la planification financière. Cette situation, qui découle du partage et du chevauchement des pouvoirs des régulateurs du secteur, crée un risque de confusion et constitue une faiblesse dans la protection des épargnants à laquelle les autorités gouvernementales devraient remédier.

Voici l’une des conclusions à laquelle arrive Cinthia Duclos, professeure à la Faculté de droit de l’Université Laval, interrogée à l’occasion du lancement de son livre Droit des services d’investissement, Encadrement des intermédiaires financiers et protections des épargnants, en mars.

Pouvoirs concurrents des régulateurs

L’Autorité des marchés financiers (AMF) exerce à la fois un rôle de surveillant direct auprès des intermédiaires financiers et un rôle de surveillant de certains organismes d’autoréglementation (OAR) comme la Chambre de la sécurité financière (CSF) et l’Organisme canadien de réglementation des investissements (OCRI), qui eux aussi, interviennent directement auprès des mêmes intermédiaires relevant de leur compétence, souligne la juriste dans son livre coécrit par Raymonde Crête, professeure émérite, Faculté de droit, Université Laval et Martin Côté, avocat, chargé de cours et membre régulier du Laboratoire en droit des services financiers (LABFI).

Ainsi, pour les courtiers en placements et leurs représentants, « les pouvoirs déontologiques et disciplinaires peuvent être exercés de manière concomitante par l’OCRI, l’AMF et le Tribunal administratif des marchés financiers (TMF) », lit-on dans le livre. Il en va de même pour les représentants en épargne collective, les représentants en assurance de personnes et les planificateurs financiers qui sont à la fois encadrés par la CSF, l’AMF et le TMF.

Par exemple, « quand on épluche la loi, on voit bien que l’AMF a le pouvoir, en même temps que la CSF, par exemple, pour le volet disciplinaire des conseillers en sécurité financière », dit Cinthia Duclos. Cependant, la chercheuse souligne que des ententes entre ces régulateurs font que, dans les faits, ils se sont « partagé la tarte » disciplinaire de manière à éviter les dédoublements. Selon sa compréhension, en général, l’AMF n’interviendra ainsi pas pour un cas disciplinaire qui touche les conseillers en sécurité financière parce que la CSF va le faire. L’AMF ciblera ses interventions auprès des entreprises et des dirigeants de ces cabinets quand ils sont capables.

Sur le plan de la recherche, la professeure mentionne qu’il serait pertinent de mener des études sur l’exercice de ces pouvoirs concomitants et sur leur mise en application auprès des intermédiaires. Cet exercice permettrait de vérifier si ce partage se confirme dans les faits ou si plutôt cette situation entraîne concrètement des chevauchements ou des dédoublements de mécanismes de contrôle pour les intermédiaires.

Si malgré des pouvoirs concurrents entre les régulateurs en théorie, les intervenants financiers ne semblent pas en subir de dédoublement sur le plan disciplinaire, alors pourquoi s’en faire alors ? Parce que la situation génère de la confusion pour les consommateurs, les intervenants et même les régulateurs, ce qui peut certes engendrer un risque que des dossiers disciplinaires tombent entre les craques et surtout que des situations problématiques ne soient pas sanctionnées dans leur ensemble (on cible le représentant, mais pas l’entreprise ; ou vice versa), selon Cinthia Duclos.

Fragmentation du contrôle disciplinaire

À ce sujet, la professeure suggère que le « partage » des pouvoirs disciplinaires entre les autorités soulève un autre enjeu important. Il s’agit de la fragmentation de l’encadrement disciplinaire des intermédiaires, c’est-à-dire que les aspects tant individuel (représentant) qu’organisationnel (entreprise et dirigeant) doivent être contrôlés sur le plan disciplinaire par une même autorité. Cet organisme devrait être en mesure, en même temps, d’identifier la faute du représentant, le potentiel manque de surveillance du cabinet et le défaut du dirigeant responsable de la conformité, le cas échéant. Actuellement, ce n’est pas le cas.

Par exemple, dans le domaine de l’épargne collective, la situation est un peu nébuleuse, selon la professeure. Selon le cadre juridique adopté, à la suite de la période de transition, les courtiers et leurs dirigeants seront contrôlés sur le plan disciplinaire par l’OCRI alors que ce contrôle pour leurs représentants est et sera réalisé par la CSF.

« Il y a de l’incertitude sur la mise en application. Mais pour le courtage en placement, c’est plus clair. En général, il semble que l’AMF ne va pas intervenir sauf si on tombe dans le domaine administratif et pénal. Le disciplinaire et le déontologique, ils vont le laisser à l’OCRI. »  Par ailleurs, l’OCRI encadre tant les aspects individuels qu’organisationnels.

Devant cette situation de chevauchement et de fragmentation des pouvoirs, que faire ? Plusieurs pistes de réflexion sont soulevées par la professeure. Un examen pourrait notamment porter sur la pertinence de reproduire le modèle de l’Office des professions et des ordres professionnels. Ce premier organisme n’a pas de lien direct avec les professionnels ni de pouvoirs directs sur l’exercice de leurs activités au quotidien. L’Office des professions est un peu comme le chien de garde du gouvernement à l’égard des ordres qui, eux, surveillent les professionnels. Une telle solution pourrait certes contribuer à réduire la confusion sur le rôle respectif des régulateurs, mais elle a d’autres implications, notamment juridiques et administratives, qui mériteraient d’être examinées et approfondies.

Par ailleurs, l’autrice ignore si l’intégration de la CSF à l’AMF, comme suggérée par divers responsables de la conformité au fil du temps, est une solution intéressante pour garantir la protection des épargnants et réduire le fardeau administratif pour les intervenants. En effet, les fonctions de la CSF qui sont déontologiques et disciplinaires, ainsi que liées à la formation continue des représentants, devraient malgré tout être présentes au sein de l’AMF. De plus, elle se questionne sur l’opportunité que l’AMF, qui exerce déjà plusieurs fonctions différentes dans l’encadrement du secteur financier, se retrouve au surplus responsable d’exercer le contrôle disciplinaire des représentants visés.

Même point de vue sur le plan de l’encadrement des représentants en assurance de personnes, des cabinets et des dirigeants du secteur. Sur cet aspect, elle suggère de réfléchir au fait qu’un cabinet n’est pas encadré par la CSF, alors que ses représentants en assurance de personnes le sont. Pourquoi l’AMF ne délèguerait-elle pas à la CSF sa supervision des cabinets en assurance et de leurs dirigeants, élargissant ainsi le champ de compétence de la CSF, comme elle le fait pour les courtiers en placement auprès de l’OCRI. Cette délégation ne simplifierait pas le portrait en matière de pouvoirs concurrents des régulateurs, mais elle constituerait possiblement un avantage en matière de protection des épargnants en raison de l’approche englobante de tous les acteurs (représentants, entreprises et dirigeants) qu’elle permettrait sur le plan disciplinaire, selon la chercheuse.

(NDLR: Ce texte et cette entrevue ont été réalisés avant le dépôt du projet de loi 92 sur le secteur financier par le ministre des Finances du Québec Eric Girard, le 8 avril. Ce projet de loi prévoit notamment la fusion de la Chambre de la sécurité financière et de la Chambre de l’assurance de dommages au sein d’une nouvelle chambre, soit la Chambre de l’assurance.)

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Les angles morts des régimes d’indemnisation https://www.finance-investissement.com/nouvelles/economie-et-recherche/les-angles-morts-des-regimes-dindemnisation/ Wed, 26 Mar 2025 11:05:43 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=106314 On doit voir au-delà de la simple indemnisation monétaire, selon des auteurs.

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La disparité des régimes d’indemnisation auquel un client peut avoir droit lorsqu’il fait affaire avec un représentant du secteur des investissements pose des problèmes. Les décideurs devraient non seulement corriger la situation, mais également bonifier ces régimes afin qu’ils soutiennent mieux les clients contre les effets sur leur santé d’être victime d’une malversation.

Il s’agit de deux pistes d’amélioration du droit des services financiers et d’investissement proposées par Martin Côté, avocat, chargé de cours à l’Université Laval et membre régulier du Laboratoire en droit des services financiers (LABFI) de cette université et coauteur du livre Droit des services d’investissement Encadrement des intermédiaires financiers et protection des épargnants, le 13 mars dernier. Il les a exposés à l’occasion du lancement de ce livre.

Selon les auteurs, le cadre juridique du Québec pour contrôler les comportements et les compétences des différents acteurs du secteur varie alors qu’il y a une convergence des services offerts aux clients, souvent autour du conseil financier. Cette fragmentation de l’encadrement engendre des écarts dans la protection des épargnants, notamment sur le plan des mécanismes de règlement des différends et des régimes d’indemnisation.

Martin Côté a donné l’exemple de ces écarts en analysant le cas de l’achat d’une part de fonds d’investissement par un client. S’il passe par un conseiller en placement au Québec, il sera couvert par le Fonds canadien de protection des investisseurs (FCPI).

Si ce client passe par un représentant de courtier en épargne collective au Québec, il sera couvert par le Fonds d’indemnisation des services financiers (FISF) et, dans de rares cas, par le FCPI si le courtier membre est également inscrit en tant que courtier en valeurs mobilières. Par contre, si le compte du client est un compte de courtier en épargne collective situé au Québec, il ne sera couvert que par le FISF.

Le FCPI vise à indemniser un client si un courtier membre de l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRI) faisait faillite et ne pouvait restituer certains titres et biens perdus. Le FISF vise à indemniser un client en cas de fraude ou de manœuvre dolosive d’un représentant de courtier en épargne collective. Ce fonds couvre également les représentants en assurances de personnes et autres représentants sous la Loi sur la distribution de produits et services financiers, mais pas les conseillers en placements.

« Le FISF s’applique à tous les intermédiaires en assurance, mais qui couvre seulement certains intermédiaires en valeurs mobilières. Ça pose une question de la symétrie dans la protection », a dit Martin Côté, qui propose l’élargissement de la couverture du FISF aux représentants de courtiers en valeurs mobilières et aux gestionnaires de portefeuille.

Selon l’auteur, le FCPI existe depuis 50 ans, mais a seulement « couverts 21 faillites de courtiers en placement pour 38 millions de sommes qui ont été remises aux investisseurs sur une période de 56 années. C’est très très peu ».

Dans son livre, l’auteur ajoute que la notion de « bien perdu » offre certaines limites de protection pour les clients. D’abord, une valeur mobilière est généralement détenue par un dépositaire, si bien qu’elle peut être difficilement perdue en l’absence d’une fraude. Or, dans ce contexte, « les produits financiers offerts sont généralement fictifs et se pose donc la question de savoir s’il s’agit de “biens” au sens de la couverture du FCPI. En sommes, dans son application concrète, la protection offerte par le FCPI nous semble limitée », lit-on dans l’ouvrage coécrit par Cinthia Duclos et Raymonde Crête, toutes deux professeure, Faculté de droit, Université Laval, en collaboration avec Salomé Paradis.

Les autrices du livre jugent que la protection du FISF est supérieure à celle du FCPI « puisque l’insolvabilité (du courtier) n’a pas à être démontrée ».

Le FISF n’est pas parfait non plus. Sa protection offerte est limitée à 200 000 $ par réclamation, par rapport à la garantie de un million de dollars (M$) pour un particulier pour ses comptes généraux, plus 1 M$ pour ses comptes de retraites enregistrés, plus 1 M$ pour ses régimes enregistrés d’épargne-études (REEE) pour le FCPI. Le FISF écarte également toute réclamation fondée uniquement sur la faute professionnelle du représentant, laquelle étant plutôt visée par la police d’assurance responsabilité des représentants.

Dans le livre, Martin Côté souligne que « dans certains cas, aucun mécanisme d’indemnisation ne protège le consommateur, notamment lorsque ce dernier fait affaire avec le représentant d’un gestionnaire de portefeuille qui ne détient que cette inscription ». Cette situation est problématique et « milite en faveur d’une réflexion qui permettrait à terme d’assurer l’égalité de traitement pour l’ensemble des consommateurs indépendamment des services financiers offerts ».

Et la santé psychologique des victimes ?

Les décideurs publics devraient également étendre les régimes d’indemnisation afin qu’ils couvrent les préjudices non pécuniaires, comme les troubles psychologiques pour les victimes de malversation, selon Martin Côté et les coautrices du livre. Ils pourraient prendre exemple sur les régimes de protections de la Société de l’assurance automobile du Québec ou de la CNESST, qui couvre non seulement la perte de revenu, mais également le soutien pour les troubles physiques et psychologiques.

Selon Martin Côté, les autorités de réglementation offrent certes des « mesures d’assistance indirecte », par l’intermédiaire de partenariats qui ont été initiés par les autorités de réglementation pour donner des services aux consommateurs.

Il cite en exemple le partenariat avec les Centres d’aide aux victimes d’actes criminels et l’Autorité des marchés financiers (AMF), qui existe depuis 2013. « Les intervenants des CAVAC sont formés pour offrir des services de première ligne d’intervention “psychosociojudiciaire” aux victimes de criminalité financière. Les services des CAVAC sont gratuits », lit-on sur le site de l’AMF.

« De quoi se rendons-nous compte lorsqu’on gratte un peu sur l’offre de services ? C’est qu’essentiellement, c’est un service de première ligne qui agit comme intermédiaire pour recommander ensuite le consommateur vers des professionnels. Donc, le consommateur se retrouve un peu au retour à la place de départ, si je peux dire », a noté Martin Côté.

En février 2025, l’AMF a également annoncé un partenariat avec la Clinique de cyber-criminologie de l’Université de Montréal. Grâce à ce partenariat, l’AMF ajoute à son éventail d’outils déjà offerts, une référence vers laquelle diriger les victimes de fraude financière.

Avec une équipe d’étudiants formés en criminologie et en intervention auprès des victimes, la Clinique vise à accompagner les victimes de fraude en ligne afin de comprendre la nature du crime, d’apprendre à s’en défendre, d’identifier les ressources pertinentes et de naviguer à travers les démarches administratives.

« Toutes ces initiatives sont tout à fait souhaitables, mais est-ce qu’il y aurait moyen d’aller plus loin ? » faisait mention Martin Côté.

Par ailleurs, l’équipe d’autrices propose de rendre exécutoires les décisions rendues par les mécanismes de règlement des différends, comme les services en ce sens offerts par l’AMF et l’Ombudsman des services bancaires et d’investissement (OBSI). En effet, selon l’ouvrage, la plupart d’entre eux vise à offrir des services de médiation et de conciliation, par opposition à l’arbitrage. « Cela a pour conséquence de rendre pour ainsi dire inutile la démarche entreprise par le consommateur lorsque l’institution financière ou l’intermédiaire financier est de mauvaise foi et que ce dernier ne souhaite pas collaborer ».

« Qu’est-ce qui lui reste (au consommateur) ? C’est de s’adresser au traitement de droits communs avec tous les désavantages qu’on connaît : des délais qui sont extrêmement longs. Des coûts qui sont extrêmement élevés. C’est une problématique qui n’est pas nouvelle, qui est bien documentée dans la littérature » et dans une position des ACVM de 2023 en faveur de rendre exécutoires les décisions de l’OBSI, a-t-il souligné.

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