Laure Fouin – Finance et Investissement https://www.finance-investissement.com Source de nouvelles du Canada pour les professionnels financiers Mon, 24 Nov 2025 11:59:42 +0000 fr-CA hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.9 https://www.finance-investissement.com/wp-content/uploads/sites/2/2018/02/cropped-fav-icon-fi-1-32x32.png Laure Fouin – Finance et Investissement https://www.finance-investissement.com 32 32 La nouvelle ère des cryptomonnaies stables au Canada https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/la-nouvelle-ere-des-cryptomonnaies-stables-au-canada/ Mon, 24 Nov 2025 11:59:42 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=111252 Novembre 2025 restera marqué dans l’histoire de l’industrie des actifs numériques au Canada : le gouvernement fédéral projette de légiférer directement les stablecoins et publie un projet de loi sur les cryptomonnaies stables (Stablecoin Act), intégré à la loi d’exécution du budget de 2025.

Cette initiative législative répond aux appels pressants des leaders de l’écosystème canadien qui alertent depuis des mois sur le risque de décrochage du pays. L’industrie a longtemps soutenu que l’absence de cadre fédéral clair freinait l’innovation et poussait les capitaux vers le sud.

L’industrie applaudit donc cet effort, mais il faut noter que les juridictions fédérales versus provinciales en la matière compliquent les choses : quelques jours après la publication du projet de loi, la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (CVMO) émettait un reçu de prospectus pour QCAD Digital Trust, un émetteur de stablecoin. Avec l’entrée en scène de la Banque du Canada (BdC), le maintien de l’autorité des autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) et la surveillance prudentielle des institutions financières par leur propre régulateur (fédéral ou provincial), il reste encore du travail en matière de coordination réglementaire pour créer un cadre clair.

Le projet de loi propose un régime d’enregistrement administré par la BdC : personne ne peut émettre un stablecoin au Canada sans être inscrit au Registre des émetteurs tenu par la BdC. La définition retenue pour un « stablecoin » est celle d’un actif numérique conçu pour maintenir une valeur stable par rapport à une monnaie fiduciaire. Fait notable, cette définition s’applique à toute « personne » (individu ou entité), sans restriction de juridiction, dès lors qu’elle rend le stablecoin disponible à un Canadien.

En ce qui concerne la protection des réserves, la loi adopte la règle du « 1 pour 1 » et impose que les actifs de réserve aient une valeur égale ou supérieure à la totalité des pièces en circulation. Ces réserves doivent être composées de la devise de référence ou d’actifs liquides libellés dans cette même devise. De plus, elles doivent être ségrégées, « à l’abri de la faillite » (bankruptcy remote) et détenues par des gardiens qualifiés.

En outre, l’émetteur a l’obligation légale de racheter les stablecoins en circulation à leur valeur (1:1) sur demande. Une politique de rachat détaillée, incluant les frais et les délais, doit être rendue publique. Sur le plan de la transparence, les émetteurs devront fournir des rapports certifiés par un CPA attestant de la suffisance des réserves, bien qu’il reste à clarifier si les rapports mensuels non audités seront publiés intégralement.

Point crucial et controversé, l’article 32 interdit formellement aux émetteurs de verser, directement ou indirectement, des intérêts ou tout autre rendement aux détenteurs de stablecoins. Cette mesure vise à distinguer clairement les stablecoins des produits d’investissement bancaires (dépôts), mais elle limite considérablement l’attractivité de ces actifs pour les épargnants. On peut s’attendre à ce que l’industrie continue de combattre cette disposition, comme c’est le cas aux États-Unis où les banques et les émetteurs de stablecoin luttent sur ce point.

Le texte est silencieux sur l’application des législations provinciales sur les valeurs mobilières. Il prévoit bien que l’émission ne constitue pas du commerce de valeurs mobilières au sens des lois fédérales (banques, assurances), mais il ne préempte pas les lois provinciales. La preuve de cette coexistence tendue est venue rapidement, avec l’émission par la CVMO d’un reçu de prospectus pour le QCAD Digital Trust (disponible sur SEDAR+). En validant ce prospectus, la CVMO confirme qu’elle traite ce stablecoin comme un titre (ou un « actif crypto lié à une valeur » — VRCA) relevant de sa juridiction.

Enfin, les institutions financières sont expressément exclues de l’application de la Loi, et restent ainsi soumises aux règles de droit commun en la matière permettant par exemple l’émission de dépôt tokenisé (tokenized deposits) par les banques fédérales si elles se conforment aux règles du Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF).

Nous nous retrouvons donc face à un triple cadre pour un même actif :

  1. la BdC pour l’émetteur inscrit en vertu de la nouvelle Loi sur les stablecoins ;
  2. les ACVM, qui exigent un prospectus et une distribution conforme aux règles sur les valeurs mobilières ; et
  3. les régulateurs prudentiels des institutions financières, par exemple le BSIF si l’émetteur est une banque.

Cette superposition contraste avec l’objectif de « clarifier » le marché. Les ACVM devraient rapidement mettre à jour leurs avis pertinents afin de prendre en compte l’existence de ce nouveau régime fédéral pour les émetteurs, et il convient qu’un régime équitable entre les émetteurs de stablecoin en application de la Loi et les institutions financières soit établi.

Un élément stratégiquement majeur du projet de loi réside dans la capacité du gouverneur de la BdC, s’il est d’avis qu’une loi provinciale ou étrangère à laquelle est assujetti un émetteur ou une catégorie d’émetteurs qui est essentiellement semblable à la loi fédérale, peut exempter cet émetteur ou toute une catégorie d’émetteurs, de la loi, sous réserve de toute condition que le gouverneur estime indiquée. Ainsi, les émetteurs étrangers tels que Circle, ou un régime établi par une province canadienne pourraient être reconnus par la BdC.

Avec ce projet de loi, le Canada tente de rattraper son retard en matière d’innovation financière. Toutefois, la question constitutionnelle crée un manque de clarté entre la surveillance fédérale des paiements et la réglementation provinciale des valeurs mobilières.

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Cryptos, été 2025 : perspectives Canada vs. États-Unis https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/cryptos-ete-2025-perspectives-canada-vs-etats-unis/ Mon, 04 Aug 2025 12:18:23 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=108854 Les États-Unis ont connu une « semaine de la crypto » très prolifique du 14 au 18 juillet 2025, lorsque deux projets de lois bipartisans et fondamentaux pour le secteur des cryptos ont avancé :

  • le projet de loi dit « CLARITY », qui concerne la catégorisation des actifs numériques et la réglementation des infrastructures de marché, et
  • la loi dite « GENIUS », qui concerne les cryptoactifs arrimés à une valeur (plus communément appelés les stablecoins). Venant renforcer le message, le 30 juillet le groupe de travail sur les marchés d’actifs numériques établi par le président des États-Unis publie des recommandations intitulées « renforcer le leadership américain dans le domaine des technologies financières numériques ».

Qu’est-ce que cela signifie concrètement et quelles sont les implications pour le Canada ?

Dans ce contexte, au cœur de tensions commerciales avec les États-Unis, et de recherche d’innovation et de croissance durable pour le Canada, il est important de mettre ces nouvelles en perspective.

« CLARITY » Act : Les États-Unis en voie de rattraper, et dépasser le Canada

Les États-Unis se joignent enfin aux Autorités canadiennes en valeur mobilières (ACVM) en traçant la voie pour une réglementation claire des infrastructures de marché crypto. Dans notre billet de février 2025, nous expliquions que depuis 2019, toute plateforme de négociation de cryptoactifs centralisées (communément appelées les CTPs) doit être autorisée à faire affaire au Canada et soumise à des mesures établies par les ACVM et/ou l’Organisme canadien de réglementation des investissements (l’OCRI) visant notamment à assurer :

  • la protection et la garde des actifs des clients ;
  • la solidité financière de la plateforme ;
  • la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, et
  • la protection des investisseurs.

Depuis, les CTPs aux États-Unis avaient chacune établi certaines normes de fonctionnement et de surveillance des marchés, obtenu des permis auprès de régulateurs Étatiques (et non fédéraux), et la plupart réclamaient ouvertement un cadre réglementaire clair et équitable pour tous qui protège leurs utilisateurs uniformément, quelle que soit la CTP utilisée.

Avec le Digital Asset Market Clarity Act de 2025 (le CLARITY Act), les États-Unis proposent enfin un tel cadre réglementaire, et vont plus loin en clarifiant la classification des actifs numériques. Le CLARITY Act vise ainsi à définir des limites de compétence claires entre la Securities and Exchange Commission (SEC) et la Commodity Futures Trading Commission (CFTC), à imposer des normes de conformité rigoureuses pour les CTPs et à offrir une sécurité juridique aux développeurs comme aux utilisateurs.

C’est au niveau de l’élaboration d’un cadre juridique clair et complet de classification des actifs numériques que nous voyons une occasion pour le Canada de s’inspirer de nos voisins du Sud. En effet, le CLARITY Act définit les actifs numériques selon leurs fonctions, et en distingue trois catégories : les « commodités » numériques, les actifs numériques restreints et les stablecoins de paiement.

  • Les « commodités » numériques sont définies comme les actifs numériques décentralisés qui ne confèrent pas de droits de profit, de gouvernance ou de créance à l’égard d’un émetteur. Ces actifs relèvent de la compétence de la CFTC, ce sont par exemple le bitcoin (BTC) et l’Ether (ETH).
    • La loi CLARITY définit un « système décentralisé » comme un système dans lequel aucune personne ou groupe affilié ne peut modifier unilatéralement le protocole ou contrôler sa gouvernance et un « protocole de négociation financière décentralisé » comme une application financière fonctionnant sur un système décentralisé, généralement sans intermédiaires et avec un code open source et autonome.
  • Les actifs numériques restreints sont définis comme représentant des contrats d’investissement ou conférant des droits financiers. Ils restent sous la juridiction de la SEC, ce sont par exemple les jetons vendus via des SAFT distribués par un émetteur lors de levées de fonds en phase de démarrage.
  • Les stablecoins de paiement sont définis comme des actifs numériques échangeables contre des monnaies fiduciaires, conçus pour être utilisés comme moyen de paiement ou réserve de valeur, généralement garantis à 1:1 par des dollars américains ou des actifs liquides de haute qualité tels que des bons du Trésor américain. En vertu de la loi CLARITY, ces actifs peuvent être soumis à la surveillance conjointe de la SEC et de la CFTC, la réglementation prudentielle principale étant régie par le cadre de la loi GENIUS.

« GENIUS » Act: États-Unis 1 — Canada 0

Les États-Unis prennent une importante avance dans un domaine primordial avec le Guiding and Establishing National Innovation for US Stablecoins Act (le GENIUS Act), qui établit un cadre réglementaire complet pour l’émission et la supervision des stablecoins aux États-Unis. Dans notre billet du 9 mai 2025, nous expliquions que les stablecoins sont une des applications les plus fondamentalement transformatrices de la crypto en 2025 (voire la plus transformatrice).

Malheureusement pour le moment, au Canada, les stablecoins sont qualifiés de valeurs mobilières par les ACVMs (régimes du prospectus et d’inscription à titre de courtier en valeurs mobilières applicables). Un seul stablecoin peut être légalement échangé sur les CTPs, et il est adossé au dollar américain.

Avec le GENIUS Act, les États-Unis se dotent d’un modèle de surveillance à plusieurs niveaux, des normes prudentielles et confirment que les stablecoins de paiement ne doivent pas être traités comme des titres financiers ou des dépôts.

Alors que nous célébrons les 10 ans de l’Ether, une invention Canadienne, nous pouvons espérer que le Canada retrouve l’élan qui lui a permis de faire figure de précurseur en 2019 et se dote aussi d’un régime juridique clair au support de l’innovation technologique et de la protection des utilisateurs, et surtout d’un stablecoin adossé au dollar Canadien.

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Série cryptos : les stablecoins https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/serie-cryptos-les-stablecoins/ Fri, 09 May 2025 11:05:13 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=107225 Les stablecoins

Les marchés financiers ont intégré les cryptos à titre de classe d’actifs. En revanche, les applications concrètes justifiant les promesses d’innovation dans le domaine financier relayées par l’industrie crypto restent souvent méconnues des acteurs de la finance traditionnelle.

Ici, nous souhaitons clarifier le cas des cryptoactifs arrimés à une valeur (plus communément appelés les stablecoins), et plus spécifiquement, les stablecoins dont l’objectif est de reproduire la valeur d’une seule monnaie fiduciaire et à l’égard desquels l’émetteur maintient une réserve adéquate d’actifs libellés dans la monnaie fiduciaire. Quelques exemples sont le USDC en dollars américains, le EURC en euros ou le QCAD en dollars canadiens.

Ce type de stablecoins permet d’appréhender facilement en quoi cette technologie peut effectivement révolutionner certains domaines de la finance traditionnelle. Ils existent depuis plus de dix ans, mais depuis 2024 ils ont l’une des croissances les plus rapides de l’industrie. Les stablecoins représentaient en 2024 un tiers de l’activité des utilisateurs de cryptomonnaies et leur volume d’échange mensuel s’élève régulièrement à plusieurs centaines de milliards de dollars.

Les acteurs majeurs du paiement sont tous conscients de cette importance :

  • Visa et Bridge ont annoncé le 30 avril 2025 un partenariat permettant aux titulaires de cartes Visa utilisant Bridge d’effectuer leurs achats quotidiens à partir de leur solde en stablecoins chez tous les commerçants acceptant Visa.
  • Stripe, le deuxième plus grand processeur de paiement en ligne, permet aux commerçants dans certaines juridictions d’accepter les stablecoins, qui sont ensuite réglés en monnaie fiduciaire sur le solde Stripe du commerçant récipiendaire. Cela permet à ces commerçants d’accepter les paiements en USDC sans détenir ou convertir ceux-ci en monnaie fiduciaire, pour un frais de 1,5 % du montant de la transaction (en USD).
  • PayPal, le plus grand processeur de paiement en ligne, expérimente l’utilisation de son propre stablecoin PYUSD pour les transactions commerciales.

Le marché des actifs tokenisés comme les stablecoins pourrait atteindre 5 000 milliards de dollars en 2030, selon une étude de Citigroup, et les stablecoins sont en passe de devenir l’un des principaux moteurs de l’adoption des cryptomonnaies grand public.

Alors, quelle est l’utilité des stablecoins ?

Deux utilités principales : les paiements, notamment transfrontaliers, et la protection contre l’inflation ou le manque de services bancaires dans les marchés émergents.

Comme l’illustrent les rapports de Chainalysis et de Castle Island susmentionnés, les habitants des économies en développement se tournent de plus en plus vers les stablecoins comme refuge contre l’inflation. En Argentine, les habitants ont recours aux stablecoins pour protéger leur épargne et assurer la stabilité économique : l’utilisation des stablecoins y représente désormais 62 % de toutes les transactions en cryptomonnaies, bien au-dessus de la moyenne mondiale de 45 %. Le Venezuela a connu une croissance de 110 % d’une année sur l’autre de l’adoption des cryptomonnaies depuis 2022.

En Afrique et en Asie, ils sont une alternative viable à la difficulté d’obtenir des services bancaires appropriés : Au Nigéria, environ 48 % des personnes interrogées ont déclaré utiliser principalement les stablecoins pour acheter ou vendre des biens et services ; 46 % ont déclaré détenir un quart ou plus de leur portefeuille en stablecoins, et 77 % ont déclaré avoir converti leur monnaie locale en stablecoins au moins une fois. En Indonésie, selon le rapport de Castle Island, l’adoption des stablecoins a été favorisée par leur relative facilité d’accès, comparée à la création d’un compte bancaire en dollars américains.

Pour les marchés plus matures où l’accès aux services bancaires est moins difficile, comme le Canada, il s’agit surtout de faciliter des paiements et transferts plus rapides et moins coûteux, comme le font les projets de Visa, Stripe et Paypal susmentionnés. Les virements de stablecoins sont par définition accessibles 24/7, 365 jours par an. À l’échelle mondiale le coût moyen d’un transfert de 200 dollars est de 6,35 % du montant du transfert, soit un total de 54 milliards de dollars de frais annuels avec les opérateurs traditionnels. En comparaison, le coût moyen des transferts de fonds effectués à l’aide de stablecoins se situe entre 0,5 à 3 % du montant du transfert.

N’oublions pas que pour le moment, au Canada, les stablecoins sont qualifiés de valeurs mobilières par les autorités canadiennes en valeurs mobilières (régimes du prospectus et d’inscription à titre de courtier en valeurs mobilières applicables), rendant ces applications difficiles à réaliser en pratique.

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Cryptos : que savoir pour bien commencer 2025 ? https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/cryptos-que-savoir-pour-bien-commencer-2025/ Wed, 19 Feb 2025 11:55:17 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=105715 2024 a marqué la fin du marché baissier ayant frappé les cryptos depuis l’année 2022 (aussi surnommé “crypto winter”), et s’est soldée par l’atteinte de la valeur symbolique de 100,000 dollars américains (USD) par Bitcoin. Depuis, un gouvernement fortement pro-crypto est entré au pouvoir aux États-Unis, le maire de Vancouver a indiqué réfléchir à créer une réserve de Bitcoin pour la ville, le gouvernement de l’Alberta s’exprime publiquement en faveur de ce marché, et au moins un candidat majeur en course pour le poste de premier ministre fédéral fait de même.

La politique influence l’adoption des cryptomonnaies malgré que celles-ci aient été créées pour être fondamentalement apolitiques. Ainsi, les changements susmentionnés auront probablement un impact positif sur l’adoption des cryptoactifs et plus de clarté réglementaire pourrait en résulter.

Le marché haussier, quant à lui, pourrait encourager la participation institutionnelle et l’adoption du grand public, tout en supportant les investissements par les “sociétés de cryptos” (les échanges centralisés et décentralisés, les mineurs, les développeurs de projets utilisant la chaîne de blocs etc.) dans l’innovation technologique.

Alors, que savoir pour bien commencer 2025 ?

Au Canada, les Autorités canadiennes en valeur mobilières (ACVM) ont fait figure de précurseurs en fournissant dès 2019 un modèle d’encadrement des plateformes de négociation de cryptoactifs centralisées (communément appelées les CTPs). Selon cet encadrement, les CTPs sont autorisées à faire affaire au Canada si elles sont inscrites à titre de courtier en valeurs mobilières. Elles sont aussi autorisées à continuer à faire affaire au Canada pendant qu’elles font des efforts pour obtenir cette inscription avec l’Organisme canadien de réglementation des investissements (l’OCRI), en soumettant en premier lieu un engagement préalable à respecter certains termes et conditions, puis en obtenant en second lieu une inscription intérimaire à titre de courtiers restreints et une dispense de prospectus de la part des membres des ACVM pertinents à leurs activités.

En date du 17 février 2025, 5 CTPs sont inscrites à titre de courtier membre de l’OCRI, 8 à titre de courtier restreint et 6 en sont au stade de l’engagement préalable.

Ainsi, depuis plusieurs années toute CTP autorisée à faire affaire au Canada est soumise à des mesures établies par les ACVM et/ou l’OCRI visant à assurer la protection et la garde des actifs des clients, la solidité financière de la plateforme, la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, et la protection des investisseurs. Ainsi, tout investisseur canadien investissant dans les cryptoactifs par le biais d’une plateforme centralisée devrait s’assurer d’utiliser une CTP inscrite. Certains de ces joueurs offrent aussi des services de jalonnement et de garde d’actifs pouvant permettre aux joueurs institutionnels d’investir dans les cryptos par leur biais.

Du point de vue réglementaire, 2025 devrait apporter plus de clarté et éventuellement un régime adapté pour les cryptoactifs arrimés à une valeur (plus communément appelés les stablecoins). Les cryptoactifs arrimés à une valeur sont conçus pour maintenir une valeur stable dans le temps en s’arrimant à une valeur, le plus souvent une monnaie fiduciaire (comme le USD ou le CAD). Les stablecoins sont aujourd’hui assujettis à la réglementation des valeurs mobilières et seul un d’entre eux, le USDC qui est arrimé au USD et émis par un émetteur américain, peut être acheté et vendu sur une CTP inscrite. L’émetteur est tenu de maintenir un site internet sur lequel figure le nombre de USDC en circulation (56 milliards), ainsi que les réserves maintenues par l’émetteur (au 13 février 2025, 56,2 milliards USD en liquide et bonds/repos du trésor américain).

Du point de vue adoption, celle-ci devrait continuer à croître, et le Canada pourrait continuer à mener le marché en termes de diversité des sous-jacents. Le marché canadien comprend des FNBs sur le Bitcoin, sur l’Ether (avec ou sans “jalonnement”, ou staking) et des prospectus préliminaires pour des FNBs de Solana et de XRP ont été déposés aux ACVM. Aux États-Unis, il a fallu attendre janvier 2024 pour que la Securities and Exchange Commission autorise les FNBs de Bitcoin spot. Malgré leur retard en matière de diversification, les États-Unis mènent évidemment la parade sur les actifs sous gestion avec environ 132 milliards USD d’actifs sous gestion dans les fonds crypto au 7 février 2025, tandis que le marché canadien est estimé à environ 8,4 milliards CAD, dans les deux cas, selon Scotiabank GBM estimates et Bloomberg Finance LP.

Plusieurs éléments tendent vers l’adoption des cryptoactifs comme une composante d’un portefeuille diversifié à hauteur de 1 à 5 % par le secteur de l’investissement, tel que rapporté publiquement par des acteurs majeurs tels que Grayscale, qui met en valeur le peu de corrélation entre le S&P500 et le Bitcoin, ainsi que le profil unique du spectre rendement/risque du Bitcoin et de l’Ether :

The Role of Crypto in a Portfolio, Grayscale, 26 janvier 2024, disponible en ligne.

Pour consulter ce graphique en grand format, cliquez ici.

En résumé, pour bien commencer 2025 il faut retenir que nous avons la chance d’avoir des acteurs inscrits pouvant desservir la clientèle canadienne et qu’il convient de faire appel à ceux-ci dès que la réglementation en valeurs mobilières est applicable, l’adoption institutionnelle est appelée à croître et au-delà des perceptions, il faut baser son analyse des cryptoactifs sur les données.

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