RRQ et PSV : on reporte ou pas?

Notre système de revenus de retraite public est sous forte pression. Au cours des deux dernières années, le Régime de rentes du Québec (RRQ) et la Pension de la Sécurité de la vieillesse (PSV) ont été modifiés.

Évidemment, la première réaction face à ces modifications en est généralement une d’appréhension. Au cours des dernières années, les modifications annoncées à d’autres programmes gouvernementaux se résumaient fréquemment à des diminutions de prestations, à des resserrements de critères d’admissibilité et/ou à des hausses de coûts.

À ce titre, une partie des modifications annoncées par ces régimes ne fait pas exception :

  • augmentation progressive et significative du taux de cotisations au RRQ;
  •  augmentation progressive de la pénalité pour anticipation au RRQ (diminution pour rente avant 65 ans);
  •  report progressif de l’âge d’admissibilité à la PSV jusqu’à 67 ans pour les particuliers nés après janvier 1962.

Toutefois, les modifications apportées à ces deux régimes rendent désormais potentiellement pertinente une option qui ne l’était que rarement auparavant : le report de l’âge auquel on commencera à toucher ces prestations afin d’améliorer le niveau de celles-ci.

Le Régime de rentes du Québec

Le participant qui choisissait de retarder le paiement de sa rente de retraite, d’un maximum de cinq années, voyait sa rente augmentée de 6% par année pour chacune des années entre 65 ans et son âge au début du versement de la rente. Dès 2013, ce facteur d’ajustement est passé à 8,4%. Concrètement, le participant qui aurait eu droit à une rente de 10 000 $ à 65 ans, avant cette modification, aurait pu retarder de cinq ans ce paiement et recevoir 13 000 $ par année. Ce même participant qui déciderait de retarder de cinq ans le début de sa rente, après modification, toucherait maintenant 14 200 $ par année.

Pension de la Sécurité de la vieillesse

Il n’était pas possible, avant modification, de retarder le début du paiement de cette prestation afin d’augmenter le montant de celle-ci. Dès le 1er juillet 2013, le particulier qui choisira de reporter, après 65 ans, le début de paiement de cette prestation verra celle-ci augmentée de 7,2% par année pour chacune des années de report. Le report maximum est également fixé à cinq années pour ce régime.

Concrètement, le participant qui aurait eu droit à une prestation de 6 553 $ en 2013 $, à 65 ans, aura le loisir de retarder d’un maximum de 5 ans le paiement de cette prestation afin de recevoir 8 912 $ par année.

Comparaison des prestations maximales

Ce tableau présente, selon l’âge auquel ces prestations sont demandées, les prestations maximales payables de ces régimes (en dollars de 2013).

Toujours en dollars constant, on peut déduire de ce tableau qu’un particulier qui demande les prestations de ces régimes dès que possible (RRQ à 60 ans et PSV à 65 ans) recevrait, à 70 ans, un revenu total annuel de 14 329 $ (7 776 $ de RRQ et 6 553 $ de PSV). Si ce particulier décidait au contraire de reporter jusqu’à 70 ans le début de ces prestations, il recevrait annuellement un revenu total de 26 165 $ (17 253 $ de RRQ et 8 812 $ de PSV). Il s’agit donc d’une augmentation de 82% par rapport à celui qui aura opté pour des prestations dès que possible.

L’âge idéal de demande

Devant ces options, la pertinence de reporter ou non le début des prestations de ces régimes devient tout à fait légitime. S’il est vrai qu’avant les modifications au RRQ, il était fréquent que la bonne décision s’avérait toucher la prestation de ce régime dès que possible à la retraite, cette question devient dorénavant plus complexe. De très nombreux éléments devraient être considérés afin d’établir l’âge idéal de début de ces prestations.

Ce tableau présente certains de ces éléments et, le cas échéant, si ceux-ci militent vers le report de l’âge ou, en ce qui a trait au RRQ, vers l’anticipation. Notez que ces éléments sont en quelque sorte présentés ci-après en vase-clos, la décision finale devrait être prise en considérant et en sous-pesant l’ensemble de ces facteurs.

Simulation financière

Au-delà des éléments précités, on peut aussi simuler la valeur des scénarios de report ou d’anticipation. Ce tableau présente les soldes REER nécessaires à 60 ans d’âge pour financer, selon trois scénarios, un revenu total de retraite annuel de 30 000 $ indexé de 60 à 95 ans. Les prestations maximales des régimes sont touchées et les hypothèses de rendement et d’inflation sont respectivement de 4,81 % et 2,25 % (résultant en un rendement réel de 2,50%). Ces hypothèses (rendement, inflation, durée du décaissement) sont basées sur les Normes d’hypothèses de projection de l’IQPF.

On constate donc que toucher les prestations de ces régimes dès que possible nécessite, sous ces hypothèses, un capital retraite beaucoup plus important que de reporter celles-ci. Le report pourrait donc être considéré.

En somme, les modifications apportées à ces deux régimes font en sortes qu’il sera assurément encore plus pertinent qu’auparavant de consulter un spécialiste avant de décider de l’âge idéal pour toucher ces prestations. Ce qui constituait auparavant une règle simple : « Généralement, on touche à la RRQ dès que l’on peut » demande maintenant une analyse plus poussée considérant de nombreux éléments supplémentaires. De la même manière, le report possible de la PSV complexifie encore la décision.

Photo Bloomberg