Commissions de suivi: l'oeuvre d'un oligopole?

Vous êtes-vous déjà questionné quant aux limites de votre modèle de rémunération? Explorons ensemble quelques options ou concepts en prenant bien soin d’identifier quelques écueils à éviter.

Le classique : les commissions

De vente ou de suivi, les commissions constituent la principale source de rémunération pour une majorité de conseiller. Les commissions sont également un sujet d’actualité que l’on peut qualifier de « chaud » depuis que les ACVM ont lancé leur consultation sur le règlement 81-407. Mais, afin de garder cette chronique simple et d’éviter de bouleverser plusieurs lecteurs, concentrons-nous sur l’état actuel des choses en la matière.

Ce qui détermine grandement la commission générée à la vente d’un produit, c’est la nature du produit et la structure de frais choisie. Fonds communs ou distincts, structure de frais d’acquisition, de sortie reportés ou frais réduits, les options sont variées et peuvent convenir, ou pas, à votre client. Ce qui importe, c’est de recommander le bon produit au bon client et, par la même occasion, la bonne structure de frais.

Par exemple, un client qui souhaite investir un montant d’argent à court ou même à moyen terme ne serait pas un bon candidat pour une structure en frais de sortie reportés. Cette structure limiterait ou pénaliserait beaucoup trop le client au moment de décaisser les sommes investies.

Rappelons-nous que le Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière intime aux représentants de subordonner leurs intérêts à ceux de leurs clients et d’éviter de se placer en situation de conflit d’intérêt.

Bien entendu, vous avez le droit d’être rémunéré pour le travail que vous effectuez. C’est normal et personne (du moins pas l’auteur de ces lignes) ne vous demande la charité. Il y a toutefois une différence fondamentale entre être rémunéré et chercher à faire un maximum d’argent. Dans l’ordre, la réflexion du représentant devrait suivre ce cheminement :

1) Quel est le besoin de mon client?
2) Quel est le meilleur produit pour combler ce besoin?
3) Quel est l’horizon de placement ou de détention de ce produit?
4) Quel niveau de service mon client requiert-il?
5) Quelle structure de frais est appropriée considérant le produit retenu, l’horizon de mon client et le niveau de service requis par celui-ci?

Remarquez que l’ensemble de ce processus est orienté vers le client et non le conseiller. De cette manière, vous laisserez peut-être parfois passer quelques commissions plus importantes, mais vous comblerez vos clients, ferez prospérer vos affaires à plus long terme et protègerez vos arrières déontologiquement parlant.

Le « churning »

Un vieux classique. Pas dans le sens de méthode éprouvée et approuvée, mais dans le sens de dépassée et inadéquate. Le « churning » est cette méthode qui consiste à effectuer des transactions dans le seul but de générer des commissions.

Par exemple, vous recommandez à un client l’achat de part dans un fonds avec une structure de frais de sortie différés dont l’échéance est de six ans. Dès l’échéance du terme, vous recommandez à votre client de liquider cet investissement pour se procurer des parts d’un autre fonds, toujours dans une structure à frais de sortie différés. En clair, avec une même mise de départ, vous faites de l’argent deux fois, sans compter vos commissions de suivi.

Cette méthode est hautement discutable et, sans être illégale, soulève d’importantes questions d’éthique. Éviter d’y avoir recours est sans doute une excellente idée.

Certains poussent même l’audace jusqu’à recommander au client de liquider ses parts avant l’échéance du terme, engendrant ainsi un frais pour le client. Lorsque le conseiller rembourse ce frais, le dommage est réparé. Dans le cas contraire, la porte est ouverte toute grande au conflit d’intérêt et aux problèmes déontologiques.

Quelques conseils en vrac

– Assurez-vous de connaitre les règles de votre organisation en matière de commission. Pas uniquement le taux auquel vous êtes rémunéré, mais également ce qui sera accepté ou refusé comme pratique, les raisons, les exceptions et les options qui s’offrent à vous.

– Pensez à votre client avant de penser à votre chèque de paie. Cette méthode, en plus de rendre service à votre client, vous permettra sans doute d’en recruter beaucoup d’autres avec le temps, et, pour les bonnes raisons.

– Posez-vous la question : Votre client connait-il la manière dont vous êtes rémunéré et êtes-vous à l’aise d’en discuter ouvertement avec lui? Votre réponse devrait être oui et oui. Indiquez à votre client où il peut trouver l’information à cet effet et répondez à ses questions, même celles qu’il a envie de vous poser et qu’il n’ose pas.

En terminant, n’oublions pas que les changements règlementaires à venir entraineront chez certains clients qui n’ont jamais eu avec leur représentant de discussion sur la rémunération de celui-ci une prise de conscience importante. Prenez les devants et discutez avec lui. Si c’est déjà fait bravo et continuez sur cette voie!

Photo Bloomberg