Oui à un régime collectif d'assurance responsabilité
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Il existe une quatrième méthode beaucoup moins laborieuse que le pipeline, soit le choix du paragraphe 164(6) de la Loi de l’impôt sur le revenu (LIR) combiné à l’utilisation d’une assurance vie. Cette méthode permet, dans certains cas, de maximiser les liquidités versées à la succession lors du retrait de l’argent investi dans la société de portefeuille, à la suite du décès de son actionnaire.

Nous comparerons donc ces deux méthodes afin d’identifier celle qui offrira la valeur successorale nette après impôt la plus élevée.

Pour mieux illustrer nos propos, nous reprendrons le cas de Richard (voir chronique précédente), à l’âge de 50 ans, seul actionnaire de Gestion Richard inc. (Gestion R) et désirant maximiser sa valeur successorale en faveur de son fils Martin.

Nos hypothèses:

• Juste valeur marchande (JVM) des actions de Gestion R aujourd’hui : 2 millions de dollars (M$). La valeur future projetée des placements, variant selon chacune des méthodes, sera présentée subséquemment.

• L’actif de Gestion R est composé principalement de fonds communs de placement.

• Richard a un profil investisseur prudent modéré.

• Richard possède d’autres actifs que Gestion R qui lui permettront assurément de financer son mode de vie pour le restant de ses jours. Il planifie donc la dissolution de Gestion R suite à son décès et désire maximiser les liquidités versées à son fils Martin.

• Les soldes fiscaux de Gestion R sont actuellement nuls, ce qui comprend :
– L’impôt en main remboursable au titre de dividendes (IMRTD)
– Compte de revenu à taux général (CRTG)
– Compte de dividende en capital (CDC)

• Prix de base rajusté (PBR) et capital versé des actions de Gestion R : 100 $

• Taux d’impôt personnel maximum sur le gain en capital imposable : 53,3 %

• Taux d’impôt personnel maximum sur les dividendes ordinaires : 43,84 %

• Taux d’impôt personnel maximum sur les dividendes déterminés : 39,83 %

• Âge de décès projeté de Richard : 92 ans

Méthode numéro 1 : le pipeline sans assurance vie

Tel qu’expliqué dans la dernière chronique, la méthode dite du « pipeline » permet de limiter l’imposition à titre de gain en capital de la personne décédée (et non celui de la succession). Ainsi, en présumant un rendement sur le portefeuille corporatif selon le profil d’investisseur de Richard et en ne présumant aucun ajout d‘assurance vie, la valeur des placements détenus au sein de Gestion R à la date du décès de Richard, sera d’environ 7,1 M$. Ainsi, Richard (le défunt) aura dans sa déclaration finale un gain en capital d’environ 7,1 M$, entrainant un impôt à payer sur ce gain de 1,9 M$ (JVM X taux d’inclusion du gain en capital X taux d’imposition = 7,1 M$ X 50% X 53,3 %).

Pour sa part, Martin ou la succession, selon le cas, recevra, sous forme d’un billet à ordre libre d’impôt, les sommes détenues dans la nouvelle société issue de la liquidation ou de la fusion pour un montant total équivalent, soit 7,1 M$. Il faut noter que la stratégie pourrait également permettre d’éliminer, sous certaines conditions, l’impôt à payer sur la disposition des fonds communs de placement détenus initialement par Gestion R.

La valeur successorale nette après impôt sera donc d’environ 5,2 M$, soit la somme encaissée par Martin ou la succession, selon le cas, moins l’impôt à payer par le défunt (7,1 M$ – 1,9 M$).

Méthode numéro 2 : Souscription d’une police d’assurance vie et choix du paragraphe 164(6) LIR

Afin d’augmenter la valeur successorale de Richard, Gestion R pourrait immédiatement souscrire à une police d’assurance vie entière avec participations. Gestion R serait donc titulaire, payeur et bénéficiaire de l’assurance vie advenant le décès de Richard. Une partie des placements détenus par Gestion R servirait à payer la prime annuelle de 49 235 $ faisant passer la valeur projetée des placements à son décès de 7,1 M$ (sans assurance) à 2,8 M$ (avec assurance). Toutefois, en contrepartie, la société bénéficierait d’une prestation d’assurance vie non imposable de 4 703 187 $ et d’un remboursement au titre de dividende (RTD) potentiel de 775 000 $, amenant les liquidités de la société à environ 8,3 M$ (soit la valeur des placements au décès de Richard, celle de sa prestation d’assurance vie ainsi que celle du RTD). De plus, l’encaissement de la prestation d’assurance vie créera un crédit au compte de dividende en capital (CDC) de Gestion R de 4 361 516 $ : ce qui permettra à cette dernière de verser un dividende non imposable à la succession.

Ainsi, en souscrivant à une police d’assurance vie et en procédant au rachat des actions de Gestion R avant la fin de la première année d’imposition de la succession, suivi du choix du paragraphe 164(6) LIR et de l’utilisation des comptes fiscaux (IMRTD, CRTG et CDC) créés par l’encaissement des revenus de placements et de la police d’assurance vie, la valeur successorale nette après impôt serait d’environ 6,5 M$, soit 8,3 M$ moins les impôts de 1,8 M$* à payer par le décédé et la succession lors du rachat des actions de Gestion R.

*Les 1,8 M$ d’impôts à payer par le décédé et la succession viennent de :

Dividende provenant du CDC de 4,3 M$ X taux d’impôt de 0% = 0 $
Dividende déterminés de 990 000 $ X taux d’impôt de 39.83 % = 0,4 M$
Dividende non déterminés de 3 M$ X taux d’impôt de 43.84 %= 1,3 M$
Impôt à payer au niveau du décédé après l’application de 164(6) LIR de 0,1 M$

Cette somme de 6,5 M$ représente 1,3 M$ de plus qu’avec la technique du pipeline. Toutefois, comme mentionné précédemment, le rachat des actions ne permet pas de réduire l’impôt à payer sur la disposition des fonds communs de placement détenus initialement par Gestion R, lequel est estimé à environ 350 000 $ dans notre exemple. Ainsi, la souscription d’une police d’assurance vie permettra d’augmenter la valeur successorale de Richard de près de 1 million de dollars.

Il faut donc retenir qu’il peut être avantageux pour les individus, propriétaires de société de portefeuille et ayant des objectifs successoraux bien définis, de souscrire à une police d’assurance vie afin d’optimiser, au niveau fiscal, la transmission de leur patrimoine. Évidemment, les résultats présentés ci-dessus peuvent varier en fonction du profil d’investisseur de l’actionnaire et de son désir ou non de maximiser la valeur successorale à transmettre aux héritiers.

Veuillez noter que le présent aticle a été publié avant le lancement de consultations sur la planification fiscale au moyen de sociétés privées par le ministère des Finances Canada, le 18 juillet dernier.