Selon l’organisme, la divulgation des frais sur un relevé qui indique le montant total des commissions de suivi est un pas dans la bonne direction, mais cela ne s’attaque pas à la cause du problème.

Les conflits d’intérêts dans la relation conseiller-client seraient plutôt réduits si on interdisait les commissions de suivi et si on facturait les clients directement pour les conseils financiers, croit FAIR Canada.

Le Royaume-Uni comme modèle

Bien que la Fondation ne mentionne pas le «modèle anglais» dans son message, celui-ci est souvent cité en exemple par les tenants de l’abolition des commissions intégrées. Rappelons que depuis le 1er janvier 2013, les commissions intégrées aux produits financiers sont interdites chez les Britanniques.

Il est trop tôt pour en faire un bilan, mais un fossé existerait entre ce que les consommateurs sont prêts à débourser et la valeur du conseil financier. Dans «The banning of embedded compensation», Keith Costello, président et chef de la direction du Canadian Institute of Financial Planners (CIFPs) et du Canadian Institute of Financial Planning (CIFP), cite Rostrum Research. Selon la firme, neuf consommateurs de services financiers sur dix paieraient les conseils financiers jusqu’à 25 livres sterling de l’heure. Je n’ai pas besoin de vous dire qu’après les multiples frais défrayés par les conseillers pour faire fonctionner leur pratique, il ne resterait pas grand-chose pour se payer un salaire…

Dans ce même texte publié sur le site Internet de notre publicationsoeur, Investment Executive, Keith Costello cite également Deloitte Touche Tohmatsu. Selon la firme, 5,5 millions de personnes au Royaume-Uni choisiraient de ne plus recevoir de conseils financiers ou n’auraient tout simplement plus accès à ceux-ci.

Je crois que nous trouvons ici le noeud du problème : le conseil financier risque de devenir hors de portée pour les investisseurs qui ont peu d’actif. «Ces changements ont forcé beaucoup de conseillers à revoir leur modèle d’affaires et à se tourner vers les clients plus aisés», note Charles Guay, président et chef de la direction de Standard Life, dans un texte publié en page 4 de ce journal.

«C’est l’un des dangers de ce genre de réforme : abandonner les moins bien nantis, alors que ce sont justement ces clients qu’il ne faut pas laisser à eux-mêmes», renchérit-il.

On le sait, avec le système de commissions intégrées, les clients qui ont plus d’actifs «subventionnent» en quelque sorte à ceux qui ont peu d’actif à investir. Je n’y vois rien de mal.

Évidemment, il est beaucoup trop tôt pour conclure à la réussite ou à l’échec de cette audacieuse initiative du Royaume-Uni, mais nous suivrons de près les premiers bilans qui seront dressés prochainement. C’est d’autant plus intéressant que l’Union européenne songerait aussi à abolir les commissions intégrées.

Si nous revenons au pays, Invesco Canada croit beaucoup dans l’importance du conseil financier et travaille depuis toujours avec les conseillers. Il n’est donc pas étonnant que son président, Peter Intraligi, ait publié la «Lettre ouverte à l’intention de tous les conseillers financiers».

Selon lui, le système de rémunération par honoraires et celui à frais intégrés comportent tous deux des avantages indéniables.

De là à affirmer que l’élimination des frais intégrés ferait épargner des frais aux investisseurs, il y a un grand pas.

En effet, selon Invesco, parmi les quelque 2 700 fonds communs au Canada, 10 % versent des commissions de plus de 1 %. Or, aux États-Unis, les clients ne parviennent pas à négocier des frais inférieurs avec des comptes à honoraires. Invesco estime, en citant une étude de Cerulli Associates, que les clients qui détiennent des placements supérieurs à 100 000 $ paient des frais de plus de 1 %.

Une iniquité facile à réparer

S’il y a une iniquité, selon moi, c’est plutôt envers les investisseurs autonomes, qui n’ont pas de conseiller et doivent tout de même débourser des frais pour un service dont ils ne bénéficient pas. Un non-sens, d’après moi.

On sait que la loi interdit aux courtiers en ligne de donner des conseils financiers. Il me semble illogique qu’ils reçoivent la totalité d’une commission de suivi de 1 %, simplement pour la détention d’un fonds d’actions, sans conseils.

Or, les fonds de série F ne sont habituellement pas offerts par les courtiers en ligne, ils sont réservés aux comptes sur honoraires.

Il y a des exceptions, et certaines firmes offrent des produits à faibles frais destinés aux investisseurs autonomes, comme Steadyhand, Mawer et Phillips, Hager & North, mais elles représentent une minorité dans l’offre de produits.

Peter Intraligi est du même avis. «Nous suggérons que les sociétés de fonds communs de placement unissent leurs efforts avec les courtiers en ligne pour réduire les coûts intégrés imputés aux épargnants autonomes.»

Voilà une mesure assez simple à mettre en place. Une mesure qui réparerait une iniquité évidente, sans bouleverser tout le système.

Certes, ce système n’est pas parfait, mais ses solutions de rechange ne le sont pas non plus.

Christian Benoit-Lapointe

Rédacteur en chef