Une recrue nommée ministre des Finances pour la première fois en près de 100 ans
Parti libéral du Canada

Le budget présenté cette semaine par le gouvernement libéral a suscité les critiques des experts en fiscalité, qui ont souligné que des déficits projetés de l’ordre de 100 milliards de dollars (G$) dans les quatre prochaines années allaient inévitablement entraîner une spirale de la dette et l’augmentation des impôts.

L’énoncé budgétaire, qui portait le titre « Assurer la croissance de la classe moyenne », prévoit augmenter les revenus du gouvernement en renforçant l’application des règles sur l’impôt, particulièrement en ce qui a trait à l’évitement fiscal pour les Canadiens les plus riches.

Le gouvernement prévoit également une augmentation du taux d’imposition pour les contribuables qui gagnent plus de 200 000 $ par année afin de compenser la baisse des impôts pour les Canadiens de la classe moyenne.

Les revenus du gouvernement fédéral devraient fléchir légèrement en 2016-2017 par rapport à l’année financière qui prend fin le 31 mars.

En entrevue avec La Presse Canadienne, le ministre Morneau a toutefois laissé entendre que cette réforme n’en était qu’à ses débuts. Les libéraux prévoient examiner les dépenses fiscales du système actuel pour s’assurer qu’elles soient cohérentes avec l’approche du gouvernement en termes d’équité.

Les dépenses fiscales désignent les allégements fiscaux ciblés qui visent certains groupes spécifiques de la population.

M. Morneau a pris l’exemple de l’Allocation canadienne pour enfants, qui sera remise à compter du 1er juillet, une politique plus généreuse qui fusionne quatre prestations familiales. Les libéraux ont également abrogé certains crédits d’impôts adoptés par le précédent gouvernement conservateur, dont ceux pour les activités sportives et artistiques des enfants. En revanche, il a instauré des crédits d’impôts pour les enseignants qui doivent acheter des fournitures scolaires.

Les libéraux ont annoncé le mois dernier que Dominic Barton, directeur général mondial de la firme de consultants McKinsey & Company, dirigerait un nouveau comité fédéral sur la croissance économique. Mais le gouvernement n’a pas précisé comment cette révision fiscale s’effectuera.

Les libéraux seront « transparents » sur cet examen des dépenses fiscales, a assuré le ministre Morneau.

Si le gouvernement a vraiment l’intention d’examiner le système fiscal, une première en cinquante ans, il sera encouragé par une multitude d’experts. Mais le budget 2016 a envoyé des signaux contradictoires, selon Jack Mintz, un spécialiste des impôts de l’Université de Calgary.

Le gouvernement se débarrasse du fractionnement du revenu pour les familles avec de jeunes enfants, mais il permet toujours le fractionnement pour les pensions, a-t-il remarqué.

M. Mintz appuie l’idée d’augmenter le Supplément de revenu garanti pour les aînés à faible revenu, mais ses recherches démontrent que les citoyens plus âgés, lorsqu’ils gagnent moins de 60 000 $ par année, paient en réalité des impôts négatifs lorsque les subventions gouvernementales sont prises en compte.

« Nous avons un système d’imposition actuellement qui est orienté vers les plus âgés », a-t-il expliqué. Selon lui, avec une population vieillissante, le gouvernement devra se pencher sérieusement sur cet enjeu.

Le système d’imposition n’a pas été révisé dans son intégralité depuis la Commission royale d’enquête sur la fiscalité, en 1966.

Une réflexion fondamentale sur le sujet serait la bienvenue, ont confirmé Dennis Howlett et Aaron Wudrick, des experts en fiscalité qui ont généralement des opinions diamétralement opposées sur cette question.

M. Howlett, du groupe Canadiens pour une fiscalité équitable, souhaite abolir les allégements fiscaux « injustes et inefficaces » qui équivalent annuellement à 10 G$. Selon lui, il s’agit de la « solution évidente » au manque de revenus des libéraux.

M. Wudrick, de la Fédération canadienne des contribuables, a affirmé que son organisation avait toujours défendu une baisse des impôts, mais aussi une simplification du régime fiscal.

« Nous ne croyons pas que les Canadiens devraient avoir à embaucher un expert pour faire leurs propres impôts », a-t-il tranché.

Photo : Parti Libéral du Canada.