« La focalisation apparente par plusieurs régimes de retraite sur la performance relative (benchmarking) de leurs pairs », est d’ailleurs la source d’une tension émergente entre le comité de placement, l’équipe de gestion interne et le comité de retraite, selon le Rapport de projet intitulé Gouvernance des caisses de retraite et gestion de portefeuille dans un contexte de tension, produit principalement par Bryan Campbell et Michel Magnan pour le CIRANO et publié en octobre 2015.

« Ce mode de gestion basé sur les indices de référence détermine le choix des investissements et contraste fortement avec une gestion guidée par la mission et les objectifs du régime ainsi qu’avec le mandat du gestionnaire de portefeuille », peut-on y lire.

Gouvernance en mutation

Bien que la préoccupation principale demeure la conciliation du rôle de fiduciaire avec la pérennité du régime et sa capacité de saisir les opportunités d’investissement, la manière d’y répondre soulève plusieurs défis, selon le Rapport.

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Les fiduciaires de caisses de retraite peinent souvent à suivre les changements considérables qui marquent l’univers des opportunités de placement depuis les vingt dernières années, ainsi que le niveau de complexités de ces placements.

« La complexité grandissante des portefeuilles des caisses de retraite amène les experts à jouer un rôle grandissant dans leur gouvernance et dans leur gestion, minant possiblement les pouvoirs réels des comités de retraite et posant le risque que la gestion de l’actif se détache graduellement des intérêts de l’ensemble des membres du régime », écrivent les chercheurs.

Cette situation aurait contribué à une plus grande externalisation des fonctions de définition et d’opérationnalisation des politiques de placement, ainsi qu’à l’avènement des comités et des sous-comités de placement, qui sont composés de membres dont les connaissances sont plus sophistiquées.

Ces comités se voient déléguer les fonctions de définition des politiques de placement, d’allocation des portefeuilles d’actifs, de gestion du risque et de choix et suivi des gestionnaires, « menant par le fait même la gouvernance des régimes de retraite à reposer sur un nombre restreint de consultants et de membres indépendants ».

À cet effet, les chercheurs ont constaté que les pouvoirs effectifs des acteurs varient considérablement selon le régime, « et que certains des modèles de gouvernance présentés par nos répondants s’éloignent considérablement du modèle mis de l’avant par la loi ».

De même, en raison de l’importance du risque financier lié à la gestion des caisses de retraite, « certains employeurs ont mis en place des mécanismes informels par lesquels ils parviennent à avoir le contrôle des décisions d’investissement », selon les informations fournies aux chercheurs et rapportées par eux.

L’un des volets du Rapport découle effectivement d’entretiens effectués avec 28 acteurs du monde des régimes de retraite québécois.

Ainsi, une majorité de répondants interpelés par les chercheurs « s’accordent à dire qu’il serait pertinent de réviser la législation actuelle sur la gouvernance des régimes de retraite ».

Selon eux, les fiduciaires devraient être issus de parties qui assument le risque et prennent en charge les coûts associés aux régimes. Une représentation des différentes parties au comité de retraite, selon la part de risque assumée par chacun, est donc préconisée.

Tendance en matière de répartition d’actif

Les rendements affichés par les régimes de retraite ne semblent pas reliés à leur taille et sont comparables entre les régimes des secteurs privé et public/parapublic, selon l’analyse des données de la Régie des rentes du Québec (RRQ), effectuée par les auteurs du Rapport.

De même, ils soulignent que le tiers des régimes de retraite sont de taille relativement modeste et représentent environ 1% de l’actif total du système de retraite québécois.

L’analyse des tendances en matière de répartition de l’actif démontre que les profils de répartition d’actif des régimes du secteur privé et des secteurs public et parapublic ne se démarquent pas de manière apparente en 2000, « si ce n’est que les régimes des secteurs public et parapublic de grande taille ont légèrement plus d’actif immobilier. Cependant, la situation est différente en 2013, alors que les régimes du secteur privé de grande taille ont en général accru la proportion de leur portefeuille investie en obligations à compter de l’an 2000 ».

En 2000, les régimes détenaient en moyenne entre 35% et 40% de leur portefeuille en obligations. Cette réalité persiste en 2013, sauf dans le cas des régimes de très grande taille, dont une proportion d’obligations dans leur portefeuille est en deçà de 35%.

À noter également que la croissance de la pondération concernant l’investissement en immobilier, survenue à la même période, est particulièrement prononcée dans le cas des régimes de petite et de moyenne taille. Les régimes de moyenne et de grande taille allouent pour leur part respectivement 4,9 % et 5,9 % de leur portefeuille à l’investissement de type immobilier.