Question : Chaque année, un client ajoute de l’argent à son REER en un seul montant. Est-ce qu’il ferait mieux d’avoir recours aux achats périodiques par sommes fixes tout au long de l’année?

Réponse :
Les achats périodiques par sommes fixes, terme technique qui se réfère à des achats d’actions ou de parts d’un fonds commun de placement d’un même montant d’argent et à intervalles réguliers, sont considérés par de nombreux investisseurs et professionnels du domaine financier comme le meilleur moyen d’investir. Les avantages en sont clairs : en investissant un montant toujours égal plusieurs fois au fil du temps plutôt que le montant total en une seule fois, l’investisseur finira par acheter plus d’actions lorsque les prix baissent et moins d’actions lorsqu’elles deviennent plus chères.

Par exemple, disons que votre client reçoit un remboursement d’impôt de 1 200 $. Plutôt que d’investir les 1 200 $ en une seule fois, il peut investir 100 $ par mois pendant un an. Maintenant, disons que le fonds dans lequel il investit vend ses parts à 10 $ le premier mois mais que ce montant baisse à 5 $ le mois suivant.

S’il a eu recours à la méthode des achats périodiques, il aura acheté 10 parts le premier mois, avant la chute boursière, mais 20 parts le second, après la chute. S’il a investi la totalité des 1 200 $ le premier mois, il détiendra 120 parts, ce qui, le deuxième mois, aura fait baisser la valeur du placement à 600 $. De cette façon, les achats périodiques réduisent l’exposition de l’investisseur à un potentiel ralentissement boursier, qui est un danger inhérent à l’approche du versement unique.

Les achats périodiques encouragent aussi une certaine discipline de placement. Plutôt que d’essayer de déterminer le meilleur moment pour investir une somme unique, les achats périodiques sont une approche plus systématique qui aide les investisseurs à surmonter de mauvaises habitudes comme l’achat de parts lorsque le marché est en hausse.

Si votre client bénéficie d’un régime de pension à la charge de l’employeur, il se peut qu’il fasse des achats périodiques sans même le savoir. Cotiser toutes les deux semaines ou tous les mois à son régime de retraite est une forme d’achat périodique par sommes fixes.

Mettre à l’épreuve les achats périodiques par sommes fixes

Il n’en reste pas moins que, malgré la sagesse conventionnelle qui veut que les achats périodiques par sommes fixes soient habituellement le meilleur moyen d’investir, il y a un coût de renonciation à payer pour détenir de l’argent dans des liquidités en attendant de l’investir en bourse. Si le marché monte alors que votre client investit par achats périodiques, il perd tous les gains qu’il aurait pu collecter en investissant la totalité du montant tout de suite.

En fait, selon une étude récente de Vanguard aux État-Unis, investir une somme unique génère les deux tiers du temps environ des rendements plus élevés que les achats périodiques. Les auteurs de cette étude ont examiné les rendements historiques mensuels d’un placement de 1 M$ US investis en une seule fois et par achats périodiques sur plusieurs périodes, aussi courtes que six mois et aussi longues que 36 mois, en présumant que cet argent était constitué de liquidités avant d’être investi. Ils ont testé diverses répartitions d’actifs entre actions et obligations, depuis un portefeuille entièrement investi dans les actions à un portefeuille entièrement investi dans les obligations. Enfin, ils ont testé ces variations dans le cadre d’achats périodiques par rapport à un placement unique sur des périodes mobiles de 10 ans de 1926 à 2011.

À la fin de chaque période de 10 ans, la valeur du portefeuille à placement unique a été comparée avec celle d’un portefeuille constitué à partir d’achats périodiques par sommes fixes. Le résultat : la méthode du placement unique a généré des rendements composés plus élevés que ceux des achats périodiques, sur 12 mois, environ 66 % du temps, que le portefeuille soit entièrement constitué d’actions ou d’obligations, ou de 60 % d’actions et 40 % d’obligations. Lorsque les auteurs ont effectué une analyse comparable en utilisant les rendements historiques enregistrés sur les places boursières britannique et australienne, un modèle similaire a émergé, les investissements effectués en une seule fois surclassant ceux faits par achats périodiques.

Les auteurs font remarquer que plus la période des achats périodiques est longue, plus il y a de chances que la méthode du placement unique surclasse l’autre. Par exemple, les achats périodiques effectués sur 36 mois ont été battus par les versements uniques 90 % du temps (pour les marchés américains).

Il convient aussi de noter que, bien qu’un placement effectué en une seule fois surclasse régulièrement un placement par achats périodiques, le taux moyen de surclassement a été relativement modique. Dans le cas d’une répartition de 60 % d’actions et 40 % d’obligations sur les marchés américains et en ayant recours aux achats périodiques sur 12 mois, les auteurs ont trouvé qu’après 10 ans, le placement initial d’un million $ US serait passé en moyenne à 2 450 264 $ US en utilisant la méthode du versement forfaitaire, et à 2 395 824 $ US avec celle des achats périodiques, soit une différence d’environ 54 000 $ US ou 2,3 %.

Les achats périodiques sont préférables en marché baissier
 
Les achats périodiques sont préférables en marché baissier

L’étude de Vanguard montre donc qu’il est toujours mieux d’investir en une seule fois dans la mesure du possible, n’est-ce pas? Pas si vite. Comme le concèdent les auteurs, les achats périodiques se comportent souvent mieux en marchés baissiers parce qu’ils contribuent à atténuer les effets de la chute du prix des parts, tandis que l’approche de la somme unique expose immédiatement la totalité du capital au risque boursier. Ils ont examiné plus de 1 000 périodes mobiles de 12 mois sur les marchés américains et trouvé que les investisseurs ayant appliqué la méthode du versement unique auraient vu la valeur de leur placement chuter 22,4 % du temps, contre 17,6 % pour l’approche par achats périodiques.

En conclusion

Que faut-il donc en conclure? Il ne fait pas beaucoup de doute qu’en investissant à long terme, on a plus de chances d’obtenir un rendement supérieur avec la méthode du placement unique qu’avec celle des achats périodiques. (Une fois encore, à supposer qu’on ait le choix — avec un compte de retraite à la charge de l’employeur, ce n’est sans doute pas le cas). Toutefois, il y a trois points importants qui militent en faveur de l’approche des achats périodiques.

Si vous prévoyez un ralentissement boursier dans l’avenir, les achats périodiques sont le meilleur choix. En étalant les cotisations de votre client à intervalles réguliers, vous limitez essentiellement son exposition au risque en gardant une partie de votre argent en liquidités.

Pour certains investisseurs, un manque à gagner relativement faible n’est vraiment pas beaucoup à payer pour dormir sur ses deux oreilles. Si les achats périodiques permettent d’avoir une tranquillité d’esprit supérieure à celle que procurent les cotisations uniques, le jeu peut en valoir la chandelle.

Les achats périodiques, particulièrement sous forme de cotisations automatiques comme le régime de pension à la charge d’une compagnie ou le retrait automatique d’un compte bancaire, offrent une discipline de placement que n’offrent pas les cotisations uniques.

La méthode par somme unique, de par sa nature même, implique la synchronisation du marché, ce qui est un jeu dangereux, surtout en périodes de volatilité. Les achats périodiques offrent une participation moins heurtée et plus régulière aux marchés boursiers.

Un dernier facteur à prendre en compte est le coût des placements, qui peut intervenir en faveur de la méthode de la cotisation unique. Par exemple, si pour avoir recours aux achats périodiques il faut payer des frais de courtage multiples en achetant les actions d’une compagnie en plusieurs lots plutôt qu’en un seul, cela peut éroder davantage le rendement de votre client par rapport à la cotisation unique.