Ce n’est pas mal du tout si l’on prend ces chiffres au pied de la lettre. Toutefois, les analystes sont des animaux de troupeau, et leurs projections extrapolent souvent le passé récent dans l’avenir. Lorsque les cours des actions ont monté, on les recommande à l’achat, et lorsqu’ils ont baissé, on recommande de les vendre. C’est le fruit compréhensible de leur horizon de placement très court et du risque auquel ils exposent leur carrière s’ils sont les seuls à avoir tort.

Les gestionnaires de placements axés sur la valeur, qui pensent à long terme, ont une vision plus sobre. Jeremy Grantham, co-fondateur de la société mondiale de gestion de placements GMO LLC, croit que les marges de profit des sociétés sont trop élevées pour que ça dure. Les profits en tant que portion du produit intérieur brut en sont à un niveau record de 11 %, bien au-dessus de leur moyenne historique de 6 %.

Cette poussée a été en partie provoquée par une expansion massive de la dette publique et privée qui s’est accélérée dans les années 2000 et qui a donné un coup de fouet à la demande d’ensemble alors que le marché du travail s’est rétréci et les salaires ont stagné.

Une mesure populaire d’évaluation, le ratio C/B de Shiller, fait la moyenne des bénéfices réels sur 10 ans pour adoucir les effets du cycle commercial. Au niveau actuel du S&P 500 (1 650), le ratio C/B de Shiller est de près de 24, soit environ 44 % de plus que sa moyenne historique.

Selon Cliff Asness, co-fondateur de AQR Funds, le rendement réel moyen du marché sur 10 ans relevant de ce ratio est allé de -4,4 % à 8,3 % par an, pour une moyenne annualisée de 0,9 %. Ce chiffre faible reflète le fait que le ratio C/B de Shiller ait tendance à revenir à la moyenne.

Bien que le ratio C/B de Shiller soit une mesure préférée des pessimistes, tout le monde n’y adhère pas. En fait, le professeur Jeremy Siegel de la Wharton School de l’Université de Pennsylvanie (un optimiste notoire sur les actions) a récemment écrit une critique du ratio C/B de Shiller dans le Financial Times.

Il avance que les changements intervenus dans la comptabilité au cours des années 1990 relativement aux radiations d’actifs non liquides des bilans, qui ont un impact sur les bénéfices, déforment les données quant aux profits réels après impôts. Il suggère que lorsqu’on remplace les résultats publiés du S&P 500 par les profits après impôts dans le modèle du ratio C/B de Shiller, le marché boursier américain actuel ne paraît pas surévalué.

Si vous ne croyez pas que le ratio C/B de Shiller va revenir à la moyenne ou augmenter, vous pouvez procéder à une estimation raisonnable des rendements réels à long terme du marché en faisant la somme des rendements en dividendes actuels et de la croissance réelle des dividendes par action à long terme.

Le S&P 500 rapporte environ 2 %, et a accru historiquement ses dividendes réels par action d’environ 1,5 % par an. Ajoutez-y les rachats nets d’actions et les investisseurs peuvent raisonnablement s’attendre à un rendement réel annualisé à long terme de 4 % à 5 %. Depuis 1926, le rendement réel moyen du marché américain est de 6,5 %.

Séparer le bon grain de l’ivraie

Après la série de résultats remarquables que nous avons connus depuis que le marché a atteint son creux en mars 2009, le pessimisme peut sembler plus convaincant pour certains. Cela ne veut pas dire que les actions américaines devraient être carrément abandonnées, mais simplement qu’il est temps de se décharger un peu ou, mieux encore, d’être plus sélectif dans sa répartition d’actifs.

Par exemple, selon la plus récente prévision sur les catégories d’actifs de GMO, l’on devrait s’attendre à ce que les sociétés américaines à grande capitalisation perdent 2,1 % par an, après l’inflation, pour les sept années à venir. La firme prévoit aussi que les sociétés américaines à petite capitalisation vont perdre 3,5 % par an, en termes réels, pendant la même période. Pour ceux qui réfléchissent sur leurs affectations aux actions américaines, ces estimations sont pour le moins ternes.

Toutefois, GMO voit de la valeur dans les actions américaines de haute qualité. En fait, elle prédit des gains annualisés de 3,1 % pour ces dernières sur les sept années qui s’annoncent (après ajustement à une inflation américaine de 2,2 %). À partir de ces prévisions, il apparaît que les investisseurs feraient peut-être bien d’être sélectifs quant à leurs investissements dans les actions américaines.

Un choix de haute qualité et à bas prix pour une participation aux actions américaines

Le dernier lot de FNB de Placements Vanguard Canada, lancé le 12 août, comprenait un excellent substitut pour les actions américaines de haute qualité : le FNB Vanguard U.S. Dividend Appreciation Index, disponible en versions couverte et non couverte. La version couverte en dollars canadiens se négocie sous le symbole boursier VGH , alors que le symbole de la version non couverte est VGG .

Ce FNB piste l’indice NASDAQ U.S. Dividend Achievers Select, un sous-ensemble de l’indice plus large Dividend Achievers. Les « Dividend Achievers » (gagneuses de dividendes) sont des actions qui ont accru leurs dividendes dans chacune des 10 dernières années. L’indice utilise aussi des écrans exclusifs qui éliminent les actions moins liquides et les sociétés qui ne sont peut-être pas capables de continuer à accroître leurs dividendes.

Malheureusement, la méthodologie exacte utilisée est secrète, mais elle semble se concentrer sur les firmes les moins endettées et les mieux pourvues en flux de trésorerie. Le résultat est la qualité plutôt qu’un revenu élevé. Alors que de nombreux fonds axés sur les dividendes se concentrent sur de petites sociétés de valeur, ce fonds penche légèrement vers la croissance. Le créateur de l’indice, Mergent (dont le NASDAQ a récemment fait l’acquisition) a créé cet indice de référence sur mesure spécialement pour Vanguard.

La pondération ajustée selon la capitalisation boursière de cet indice se traduit par une situation où les 10 avoirs principaux constituent près de 40 % du portefeuille, soit presque deux fois plus concentré que les indices de l’ensemble du marché comme le S&P 500. Il fait aussi de grosses mises sectorielles contre la technologie et en faveur des secteurs des services et de la fabrication. À la différence des FNB traditionnels axés sur les dividendes, ce fonds a une participation légère aux industries de la finance et des services publics.

Les investisseurs auraient peine à trouver un portefeuille d’actions américaines de meilleure qualité. Environ 54 % du portefeuille est constitué de firmes dont Morningstar a déterminé qu’elles avaient des bastilles économiques fortes. Un autre 35 % du portefeuille est constitué de firmes aux bastilles économiques faibles, selon les analystes de Morningstar.

Le portefeuille du fonds se distingue aussi par ses cotes d’incertitude de valeur juste, autre mesure exclusive de Morningstar promue par ses analystes. Les sociétés stables et de haute qualité dotées d’avantages concurrentiels structuraux ont plus de chances de recevoir des cotes d’incertitude plus basses. Par ailleurs, les sociétés plus risquées qui présentent un éventail de résultats potentiels plus grand justifient généralement des cotes d’incertitude de valeur juste plus élevées.

Les sociétés à incertitude faible et moyenne constituent respectivement 37 % et 48 % du portefeuille. Pour mettre les choses en perspective, seules 14 % des sociétés de l’indice S&P 500 avaient une cote d’incertitude de valeur juste faible, et 54 % une cote moyenne. (Les abonnés au site Privilège peuvent lire le rapport d’analyste intégral du frère aîné de ce produit vendu aux États-Unis : le Vanguard Dividend Appreciation ETF VIG , dont l’historique des rendements est plus long.)

Les versions couverte et non couverte de ce FNB font payer des frais de gestion de 0,28 % : une aubaine. Bien que les FNB passifs à grande capitalisation puissent être achetés à des prix beaucoup plus bas, aucun d’entre eux ne détient un portefeuille penchant autant vers la qualité tout en maintenant la diversité.

–Avec la participation du stratège des FNB Samuel Lee.