L'assurance vie fait reluire les actions de revenu

Question : Parlons donc du secteur canadien des services financiers, un important terrain de chasse pour actions à dividendes.

Michèle Robitaille, directrice générale et spécialiste des mandats d’actions à revenu chez Guardian Capital, société sous-conseillère de la famille de fonds BMO :

L’année devrait être bonne pour les actions bancaires canadiennes.

Jason Gibbs, vice-président et gestionnaire de portefeuille à Gestion d’actifs 1832 :

Leur croissance va ralentir cette année et toutes les banques l’ont fait savoir publiquement. Beaucoup de facteurs qui ont joué en leur faveur l’année dernière pourraient présenter des difficultés cette année. Les pertes sur prêts ne devraient plus baisser davantage. Elles pourraient augmenter, compte tenu des problèmes que connaît l’industrie énergétique. Les marchés des capitaux pourraient se durcir. La gestion du patrimoine devrait bien aller et la croissance des prêts aussi. Cela ajoute probablement 4 ou 5 % à la croissance des bénéfices cette année, contre 9 ou 10 % l’année dernière. Les actions bancaires devraient continuer à être avantageuses à long terme.

MR : Nous consacrons près de 42 % au secteur financier dans le Fonds de revenu mensuel élevé BMO : environ 15 % dans les banques et un peu moins de 10 % dans les compagnies d’assurance et les firmes de gestion d’actifs, et 17 % dans les fiducies de placement immobilier (FPI). Nous accordons notre préférence aux compagnies d’assurance plutôt qu’aux banques. Nous pensons que le profil de croissance que connaîtront les bénéfices des compagnies d’assurance vie sera un peu plus solide. Nous aimons les perspectives que présente le secteur de la gestion du patrimoine.

Dans ce climat d’investissement défensif, les FPI auront de bons résultats à court terme. J’ai augmenté ma participation à H&R Real Estate Investment Trust HR.UN et RioCan Real Estate Investment Trust REI.UN. Leurs évaluations relatives les rendent attrayantes. En général, les FPI ne sont pas aussi bon marché qu’il y a un ou deux mois, mais elles continuent de représenter une valeur raisonnable. Si la hausse des taux d’intérêt est retardée, les FPI devraient être assez performantes. Notre vision à long terme est qu’elles connaîtront des difficultés lorsque les taux d’intérêt augmenteront à un moment ou à un autre au cours des deux prochaines années.

Parmi les banques canadiennes, les plus fortes pondérations dans le fonds sont la Banque Toronto-Dominion TD, la Banque Royale du Canada RY et la Banque Scotia BNS BNS.

Peter Frost, vice-président principal et gestionnaire de portefeuille à Placements AGF :

J’investis dans les trois.

JG : Moi aussi.

MR : La Financière Manuvie MFC représente la pondération la plus élevée d’une compagnie d’assurance dans le Fonds de revenu mensuel élevé BMO.

PF : Le Fonds de revenu mensuel élevé AGF investit 29 % dans les services financiers, contre 36 % pour l’Indice composé. J’aime les firmes de gestion d’actifs, et l’un de mes principaux avoirs est Brookfield Asset Management BAM.A. Je suis en train de songer à des firmes de gestion d’actifs américaines. J’aime aussi la Manuvie et j’ai continué d’y relever ma participation. Je suis aussi d’avis que les compagnies d’assurance sont mieux positionnées que les banques. J’ai très peu de participation aux FPI, mais je détiens Chartwell Retirement Residences CSH.UN dans le Fonds de revenu mensuel élevé.

JG : Le Fonds Scotia de dividendes canadiens investit 31 % dans les services financiers, contre 36 % pour l’indice composé. Le fonds continue d’être sous-pondéré dans les banques à des fins de diversification. J’investis dans TD, la Banque Royale et Scotia. J’y ai récemment augmenté ma participation. On devrait assister à une croissance solide des bénéfices des assureurs. J’ai étoffé mes actions de la Manuvie. Les assureurs sont bien capitalisés et ils pourraient générer une bonne croissance des dividendes. D’autres avoirs dans ce secteur comprennent Brookfield Asset Management et RioCan.

Q : Parlons maintenant des actions des services publics.

JG : Elles constituent 5 % du Fonds Scotia de dividendes canadiens. Des avoirs comme la compagnie d’électricité Fortis FTS se sont assez bien comportés l’année dernière, tout comme Brookfield Infrastructure Partners BIP.UN. Le fonds détient les deux. Les investisseurs doivent réduire leurs attentes de rendement total à court terme pour ces actions. Ces actions des services publics auront du mal à produire une croissance de leurs multiples.

PF : Particulièrement s’il y avait une rotation en faveur des actions cycliques.

JG : C’est vrai. Cela dit, les titres des services publics ne représentent que 2 % de l’Indice composé S&P/TSX et la demande continue d’être vigoureuse pour ces compagnies, tant dans le secteur public que le secteur privé. Si un titre de services publics devient trop bon marché sur les places boursières, il pourrait être racheté par, disons, un fonds de pension. Dans l’ensemble, les titres des services publics sont bons à conserver à long terme.

PF : J’investis à la fois dans Fortis et Brookfield Infrastructure Partners. Fortis a été ajoutée plus récemment. La société a traversé une phase de croissance dans tout le Canada pendant dix ans et sa croissance des dividendes a commencé à ralentir. Je n’y avais pas investi depuis plusieurs années. Mais elle a effectué plusieurs acquisitions aux États-Unis, et ses perspectives de croissance des bénéfices sont bonnes. Brookfield Infrastructure détient des actifs dans le monde entier. Le Fonds de revenu mensuel élevé AGF investit 9 % dans les services publics et le Fonds de revenu traditionnel AGF y investit 5 %.

MR : Nous avons 5 % dans les services publics, ce qui est inférieur à l’indice. Nous possédons Brookfield Renewable Energy Partners BEP.UN , Emera Inc. EMA et Northland Power Inc. NPI. Nous aimons les perspectives de croissance de toutes ces compagnies. Nous y avons rehaussé notre participation, surtout à Northland Power. Son profil de risque est un peu meilleur, car elle s’est lancée dans des projets éoliens en Europe. Mais elle gère le risque de manière prudente.

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Q : Et les actions des télécoms, qui comme les services publics sont un autre secteur à dividendes défensif?

MR : Nous sommes sous-pondérés dans les télécoms depuis deux ans. Ces actions représentent actuellement 5,7 % du portefeuille. La croissance au sein de leur marché est en train de ralentir, alors que la pénétration des téléphones intelligents atteint son apogée. Aussi, le climat réglementaire est devenu au cours de la dernière année beaucoup moins bénin, le gouvernement fédéral se concentrant davantage sur l’amélioration des prix à la consommation. Cela se fait par le biais d’une nouvelle société de téléphonie sans fil ou de l’examen des aspects des contrats de télécommunications avec les consommateurs.

Nous pensons que les prix des actions des télécoms reflètent une croissance que les compagnies ne vont pas réaliser. Les évaluations ou prévisions vont devoir baisser. Parmi les grands participants, nous aimons Telus T le plus. Elle a le meilleur profil de croissance. Nous investissons dans Shaw Communications , car elle n’est pas exposée au segment sans fil (elle appartient au secteur de la consommation discrétionnaire).

Dans le secteur des télécoms, un autre avoir est Manitoba Telecom Services MBT . Son dividende est viable et la compagnie finira par être morcelée et vendue.

JG : Le Fonds Scotia de dividendes canadiens investit 9 % dans ce secteur, notamment des avoirs dans Telus, BCE BCE et Rogers Communications Inc. RCI.B . À court terme, les avoirs de télécommunications canadiens sont chers et je suis d’accord avec Michèle : leur croissance va ralentir. Mais il est difficile pour les nouveaux intervenants du secteur des télécommunications de faire concurrence à l’oligopole. Au bout du compte, tout comme pour les sociétés d’oléoducs, il est difficile de reproduire ce qu’ont ces compagnies de télécoms. Je suis conscient des risques réglementaires et politiques qui se posent.

PF : Je n’ai pas d’actions de télécoms canadiennes. Je suis du même avis que Michèle au sujet de leur croissance et du risque réglementaire. Tout comme Michèle, j’investis dans Shaw. Elle a un dividende attrayant et une bonne entreprise de câblodistribution.

MR :
Les investisseurs se sont réfugiés dans les télécoms canadiens dans cette conjoncture défensive. Ces titres ont été très performants au dernier trimestre de 2014.

Q: Enfin, le secteur industriel, à commencer par l’industrie ferroviaire.

PF : Je préfère les sociétés ferroviaires américaines aux canadiennes car les premières ont des évaluations plus raisonnables. Mais j’ai investi dans le Canadien National CNR , quand le marché boursier s’est effondré en octobre. Je n’investis pas dans le Canadien Pacifique CP . Si les volumes de pétrole brut transportés par voie ferroviaire baissent, CP serait plus vulnérable que CN à une correction de ses évaluations.

JG : Les sociétés de chemins de fer sont des oligopoles, elles ont des barrières à l’entrée et un pouvoir d’établissement des prix. J’investis dans CN.

MR :
Dans le Fonds de revenu mensuel élevé BMO, notre pondération dans l’industrie est assez faible et comprend Westshore Terminals Investment WTE. On en revient une fois de plus à cet actif d’infrastructure difficile à reproduire. Son segment d’exportation du charbon est bien positionné sur la côte ouest. La société a des contrats à long terme, donc ses flux de revenu sont relativement stables et la valeur de son infrastructure est élevée.

PF :
Je détiens Westshore Terminals dans le Fonds de revenu mensuel élevé AGF. La société présente un actif stratégique.

JG : J’y investis aussi, dans le Fonds mondial d’infrastructure Dynamique. La société possède un actif dominant, un excellent bilan et des flux de trésorerie relativement stables.