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« La proposition se retrouvant dans le document de consultation touche tous les produits, même ceux moins pertinents pour les clients d’un conseiller. C’est une norme impossible à mettre en place. Elle pourrait conduire à un rétrécissement du nombre de produits pour répondre aux besoins réglementaires, conduisant à moins de choix pour les investisseurs », écrit l’iA Groupe financier dans son mémoire.

Dans le Document de consultation sur la norme 33-404 sur les propositions de rehaussement des obligations des conseillers, des courtiers et des représentants envers leurs clients, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) proposent d’obliger des représentants à avoir « une connaissance approfondie de tous les titres qu’elles négocient pour [le client] », comprenant la compréhension des caractéristiques, l’incidence du montant du placement proposé, la stratégie proposée ainsi que la place du titre dans le portefeuille du client.

De plus, la société à laquelle le représentant est associé devrait, selon les règles proposées, détenir une liste de produits approuvés. Si, par exemple, le représentant recommande un produit qui n’est pas sur la liste, il serait dans l’obligation d’obtenir l’autorisation avant de le recommander à un investisseur.

« [Les ACVM] suggèrent, déraisonnablement, qu’il y a une liste qui peut être « approuvée » ou « rejetée ». En fait, [l’obligation] peut amener les courtiers à obtenir l’approbation réglementaire pour les produits qu’ils mettent sur leur tablette », exprime le Conseil des fonds d’investissement du Québec.

Irréaliste

Les participants à la consultation considèrent qu’il s’agit d’une proposition impossible à appliquer dans la réalité.

« Nous considérons que l’obligation pour les représentants de comprendre chaque produit de leur firme est irréaliste », indique Fidelity

Les sociétés s’appuient particulièrement sur la quantité de produits que les représentants devraient maîtriser pour justifier leur argumentation. Par exemple, pour la Banque Scotia, les conseillers devraient être familiers avec 110 000 codes de valeurs, incluant 1500 fonds communs de placement (FCP).

Les intervenants admettent toutefois l’importance que le produit ou les services offerts par les différents acteurs de l’industrie correspondent adéquatement au profil des investisseurs.

Certains, comme la Chambre de la sécurité financière (CSF), considèrent d’ailleurs que les objectifs cernés par les ACVM sur cet aspect sont déjà atteints.

« Il n’y a pas lieu d’aller plus loin en y ajoutant des critères d’applications supplémentaires », écrit Me Marie-Élaine Farley, présidente et chef de la direction de la CSF dans son mémoire.

Manuvie élargit cette vision en invitant les ACVM à reprendre les règles et les directives sur la connaissance du produit de l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels (ACCFM) et de l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM).

Implantation onéreuse

L’industrie croit que l’implantation de telles mesures impliquerait des coûts substantiels, notamment en technologie et en ressources humaines.

« Les coûts associés à l’enquête pourraient être importants d’autant que l’information sur les produits peut être difficilement accessible », écrit le Mouvement Desjardins dans son mémoire.

Les indépendants et les firmes de taille modeste craignent également que cette obligation soit plus lourde à porter à terme pour eux. Les hausses de coûts envisagées par les sociétés de courtage impacteront directement le marché et pourraient même être transférées aux investisseurs, d’après les participants.

« Certains de ces coûts seront facturés aux investisseurs et/ou des produits de placement ne pourront plus être offerts (ou peuvent devenir moins accessible), et donc de limiter l’univers des fonds d’investissement » soutient dans son mémoire Martin Gagnon, coprésident et cochef de la direction à la Financière Banque Nationale ainsi que premier vice-président à la direction en gestion de patrimoine.

Offre de produit menacée

Un marché restreint par une offre de produits réduite est évoqué par différents intervenants comme raison suffisante pour que les ACVM revoient l’obligation qu’ils soumettent.

« Nous craignons que certaines personnes inscrites décident de réduire de manière significative la gamme de leur offre respective, ce qui ne servirait pas les intérêts supérieurs des investisseurs », ajoute Martin Gagnon.

La Banque de Montréal va dans le même sens: « Les entreprises peuvent choisir de réduire leur nombre de produits pour améliorer la gestion de la conformité ainsi que réduire leur responsabilité potentielle sur la connaissance des produits et les autres obligations supplémentaires. »