« Tout le monde est assoiffé de rendements. On voit que la quête de revenu est généralisée, en Amérique du Nord ou dans le monde entier », dit M. Addeo, directeur général et gestionnaire de portefeuille principal des titres américains à revenu fixe auprès de Gestion d’actifs Manuvie (U.S.) à Boston. « Dans un marché comme celui du rendement élevé, où nous nous obtenons une compensation excédentaire pour le risque encouru par rapport aux obligations du Trésor, cela continue d’attirer l’attention ».

Les compagnies endettées qui ont accès à des capitaux par le biais du marché à rendement élevé peuvent continuer à remédier à leurs problèmes en prolongeant les échéances de la dette, par exemple, ou en tirant profit de taux d’intérêt plus faibles, dit M. Addeo, gestionnaire principal du Fonds tactique de titres de créance mondiaux Manuvie. Pourtant il admet aussi que la maturation de l’économie est inquiétante et qu’on ne peut pas échapper au cycle économique. Lorsqu’on assiste à un ralentissement de l’activité économique, le nombre de défaillances augmente parmi les compagnies dont la cote de crédit est de moins bonne qualité.

Pour renvoyer à une analogie de baseball, M. Addeo suggère que l’on se trouve dans la huitième ou neuvième manche. « Peut-être que le score est à égalité et qu’on risque d’avoir des manches supplémentaires, à cause des facteurs concurrentiels. Les conditions économiques mondiales semblent s’améliorer quoiqu’à un rythme un peu lent », dit-il. « Les facteurs démographiques, la technologie et les niveaux de dette élevés empêcheront une croissance exceptionnelle qui pourrait créer de l’inflation. Donc c’est un environnement idéal pour les obligations même si les taux sont très faibles. »

En ce moment, l’écart de rendement des obligations du Trésor américain est d’environ 380 points de base, selon l’indice Bank of America Merrill Lynch U.S. High Yield Master II Index (BOAMLHYI), comparativement à 422 points de base au début de l’année. « On a assisté à un resserrement jusqu’à présent cette année et c’est la tendance actuelle. Mais sur le plan des évaluations, ce resserrement est plus prononcé que la moyenne historique », dit M. Addeo. Il ajoute que les écarts des cinq dernières années ont été aussi serrés que 335 points de base et aussi lâches que 887 points de base. « Nous approchons la fin du resserrement. »

Puisque les rendements dans le monde entier sont très faibles, M. Addeo dit qu’il est difficile de trouver des occasions qui ne comportent pas trop de risque. On voit se manifester une vision bienveillante des taux d’intérêt à court terme, dit-il, ajoutant que le risque de crédit est plus complexe à déterminer. Même avec un taux de défaillance faible et l’économie avançant tant bien que mal, M. Addeo maintient qu’il existe un risque supplémentaire pour lequel on doit recevoir compensation.

Se fondant sur un taux de défaillance de 2 % et un taux de récupération de 40 cents par dollar, M. Addeo suggère que le marché perdrait 120 points de base à cause des défaillances. En plus, il ajoute environ 300 points de base en compensation d’autres risques comme la volatilité. « Si c’était mon hypothèse de base, la juste valeur devrait être d’environ 420 points au-dessus des obligations du Trésor. À 380 points et en considérant seulement les défaillances, nous pouvons en conclure que nous ne sommes pas payés équitablement ou que le marché a décidé que le taux de défaillance futur serait inférieur à 2 %. » Les défaillances, conformément aux données de JPMorgan, avoisinent présentement 1,5 %.

M. Addeo est principalement un investisseur stratégique ascendant. « Nous effectuons un gros travail fondamental et tentons de dénicher des occasions de placement durables, et nous avons tendance à conserver nos avoirs, dit-il. Il s’agit d’une approche de construction de portefeuille stratégique à long terme. Mais le fonds est conçu pour investir n’importe où dans le monde, d’où son nom comportant le terme « tactique ». Puisque M. Addeo fait preuve de flexibilité quant à la qualité du crédit, il peut investir dans des obligations de qualité supérieure. Il peut aussi parcourir la structure de capital et acheter par exemple des prêts à taux variable.

Environ 80 % du fonds, qui arbore une cote Morningstar cinq étoiles dans la catégorie Revenu fixe à rendement élevé, investit dans une combinaison d’obligations à rendement élevé et de prêts à taux variable. Les 20 % restants sont composés d’obligations nord-américaines de qualité supérieure et de liquidités. Pour ce qui est de la participation géographique, environ 52 % du fonds sont investis aux États-Unis et au Canada, 25 % en Asie et 20 % répartis entre l’Amérique latine, l’Europe et le Moyen-Orient.

M. Addeo travaille aux côtés d’Endre Pedersen, un gestionnaire établi auprès de la section de Hong Kong de Gestion d’actifs Manuvie qui gère les quelque 25 % du fonds investis dans des titres asiatiques. Très diversifié, le fonds détient des titres provenant d’environ 270 émetteurs. La durée du fonds est de 3,7 ans, contre 4,6 ans pour un panachage entre l’indice Barclays Global High Yield Bond et l’indice Barclays Global Credit.

M. Addeo se positionne généralement de manière défensive mais il a sélectionné quelques obligations cotées CCC qui offrent des rendements très attrayants. Cela dit, environ 7,5 % du fonds sont investis dans des obligations cotées CCC, soit la moitié de l’indice BOAMLHYI.

Il cite en exemple Tapstone Energy, qui oeuvre dans le secteur du schiste. L’obligation de la compagnie qui arrive à échéance en 2022 a un coupon de 9,75 % et a récemment affiché un rendement de 15 %. « C’est une mise quelque peu anticonformiste, mais nous mettons souvent en valeur la qualité sous-jacente du portefeuille », dit M. Addeo, ajoutant que Tapstone représente un mélange attrayant de production de pétrole et de gaz, et elle est pourrait faire l’objet d’une acquisition. « Occasionnellement, nous trouvons des titres intéressants qui nous dédommagent assez bien d’avoir pris la peine d’investir en eux. »