Vulgarisateur dans l'âme
Fabien Major (Photo : Martin Laprise)

«La radio, je suis tombé dedans lorsque je suis arrivé au cégep, raconte celui qui se destinait originalement aux sciences pures. Je me dirigeais vers la biologie ou la médecine, mais en arrivant au cégep, j’ai eu un coup de foudre pour la radio étudiante et je ne voulais plus faire que ça.»

Il multipliera les emplois dans des stations radiophoniques un peu partout au Québec. Le rythme de travail est effréné et il doit cumuler les mandats pour subvenir aux besoins de sa jeune famille.

«J’ai beaucoup aimé la radio, mais je courais tout le temps après mon souffle et les revenus étaient aléatoires, raconte celui qui est devenu père à 23 ans. Mon père, Jacques Major, était dans un petit cabinet privé d’assurance de personnes. Il voyait la montée du monde du placement et me demandait souvent de me joindre à lui.»

De la radio à la finance

En 1997, Fabien Major accepte finalement l’offre de son père et se joint à son cabinet après avoir décroché ses permis en assurance et en épargne collective.

«Lorsque je faisais des rencontres clients avec mon père, le bagage que j’avais acquis en radio me permettait d’entrer tout de suite en contact avec eux, souligne Fabien Major. Ils trouvaient que je vulgarisais bien et qu’ils me comprenaient quand je leur parlais.»

Fabien Major n’a toutefois pas la même vision de la profession que son père : «Lui, c’était un vrai vendeur avec les méthodes d’autrefois, alors que moi, je suis arrivé avec un idéal de conseil. Il y a eu un choc. J’ai travaillé trois ans avec mon père.»

En 2001, il devient directeur des produits de placement au Groupe CMA. La pratique d’assurance de Fabien Major continuera de passer par CMA jusqu’en 2015. Le volet fonds communs sera quant à lui transféré, au fil de la consolidation, de Promutuel à Groupe financier Peak, puis à Excel Gestion privée en 2013, et à Gestion de patrimoine Assante en 2015.

«J’ai été déçu lorsque j’ai su qu’Excel allait être vendue. Je voulais faire mon nid dans une entreprise québécoise où je pensais passer le reste de ma carrière, dit-il. J’ai donc repris les discussions que j’avais amorcées en 2013 avec Assante.»

Dès ses débuts en finance, Fabien Major montre un intérêt pour la technologie. C’est lui qui installe Internet dans les bureaux du cabinet de son père. Il s’intéresse au Web et lance son propre blogue en 2007 après avoir tenté, sans succès, d’approcher plusieurs médias afin d’offrir ses services comme collaborateur.

«Personne ne voulait me publier. J’ai continué à nourrir mon blogue et les journalistes ont commencé à m’appeler pour leurs articles, parce qu’ils faisaient des recherches et qu’ils tombaient sur moi, note ce titulaire d’un MBA de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Je suis allé suivre des formations sur les meilleures pratiques liées aux mots-clés chez Google. J’ai découvert que la clé, avec Internet, c’est la même que celle que j’employais en radio à l’époque : pour te faire comprendre, il faut utiliser les mots que les gens utilisent eux-mêmes.»

Communiquer avant tout

C’est là la base de la stratégie de Fabien Major : employer des images et un vocabulaire que le grand public va comprendre. C’est d’ailleurs une façon de faire qui lui vaut certaines critiques dans l’industrie financière, où on loue ses qualités de vulgarisateur tout en remettant en question son approche, qui manquerait de profondeur.

«Fabien n’est pas du genre à entrer dans les détails, souligne Stéphane Desjardins, journaliste et rédacteur en chef de Finance et Investissement de 2007 à 2010. Il a l’avantage de ses défauts ; toutefois, je n’ai jamais trouvé d’erreurs factuelles dans ses écrits. C’est avant tout un grand vulgarisateur.»

Fabien Major l’admet d’ailleurs d’emblée : «Si un de mes confrères dit : « Major reste trop en surface », c’est que j’atteins mon objectif. Ce n’est pas lui, ma cible, je ne cherche pas des clients parmi mes confrères. J’accepte totalement qu’on me dise que mon discours est simpliste, puisque je cherche à me faire comprendre par une grande quantité de gens.»

C’est dans la même optique que Fabien Major a publié, chez VLB éditeur, Petits secrets et gros mensonges de votre banquier. Dans son livre de 232 pages, il critique vivement les grandes banques canadiennes, qu’il accuse de favoriser leur propre rentabilité aux dépens de l’intérêt supérieur des clients.

«C’est un essai où on soulève un point de vue : les banques, c’est du commerce, dit-il. Ma critique, c’est qu’on est rendu dans un oligopole et qu’il faudrait séparer tout ça en une trentaine d’organismes pour que le consommateur soit plus libre. Une chose est certaine : le conseil financier est incompatible avec les quotas de vente de produits particuliers.»

Fabien Major tient mordicus à sa liberté d’offrir les produits de son choix à ses clients. C’est d’ailleurs ce qui l’inquiétait avant d’accepter de passer chez Assante, qui est une filiale de la Financière CI. «J’avais peur qu’on m’impose des quotas de vente de produits de Placements CI. C’est un mythe, il n’y a rien de tel dans mon contrat.»

Fidèle à ses gestionnaires

Cela dit, Fabien Major n’hésite pas à placer les billes de ses clients chez des gestionnaires de CI : «Ils ont recruté un gestionnaire avec lequel je faisais déjà affaire lorsqu’il était chez Invesco, Richard Jenkins. J’aime suivre mes gestionnaires, c’est ma façon de faire.»

C’est une méthode qui a bien servi Fabien Major dans le passé. «Lorsque Vincent Lacroix s’est nommé gestionnaire chez Norbourg, j’ai suivi mes gestionnaires et j’ai déplacé les actifs de mes clients, raconte-t-il encore visiblement ébranlé. C’est en Jarislowsky Fraser et Montrusco Bolton que j’avais confiance, donc j’ai suivi ces gestionnaires. Mes clients n’ont pas perdu un sou.»

Fabien Major a foi en la gestion active : «J’ai fait mon cours en valeurs mobilières, mais je ne pratique pas, parce que je ne crois pas que je serais capable de mieux négocier des titres en Bourse que les gestionnaires-vedettes que je choisis.»

Si Fabien Major refuse de révéler la taille de son actif sous gestion, il admet qu’il se compte «en centaines de millions» et qu’il croît de façon régulière. Sa clientèle comprend de nombreux professionnels des communications et de l’informatique et d’anciens investisseurs do-it yourself qui ont jeté la serviette et décidé de faire affaire avec un conseiller.

«Son plan d’affaires est similaire au nôtre, souligne Éric Lauzon, vice-président développement des affaires et recrutement chez Gestion de patrimoine Assante. C’est-à-dire qu’il fait évoluer sa pratique vers une gestion de patrimoine intégrée pour les clients plus fortunés, tout en utilisant les outils technologiques et des ressources humaines pour continuer de servir sa clientèle originale qui est moins fortunée. On essaie d’éviter que nos conseillers ne délaissent leurs plus petits clients qu’ils servent depuis les débuts.»

En plus des experts mis à sa disposition par Assante, Fabien Major peut aussi compter sur le soutien de trois autres conseillers, soit Frédérique Poirier, conseillère associée, Yacob Nour, conseiller associé, et Jonathan Therrien, conseiller adjoint. Au total, une équipe de 10 personnes travaille de près ou de loin avec Major Gestion Privée, dont les bureaux sont situés à Outremont.