Isabelle Gervasio en est venue à cette conclusion après avoir mené une étude cernant les critères de sélection de type intangible qui ont un impact significatif dans le processus de décision des membres des comités de régime de retraite et des consultants, dans le cadre de sa maîtrise en administration des affaires (MBA) à l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal.

Elle souhaitait comprendre les motivations d’achat des comités de régime de retraite au moment de la sélection de nouveaux gestionnaires de portefeuille.

«On ne peut tirer de statistiques ni généraliser les comportements des décideurs à partir de cette étude», met en garde Isabelle Gervasio, qui a interrogé 20 personnes au cours de sa démarche. Elle n’en constate pas moins de fortes convergences d’opinion.

Pour se démarquer, les gestionnaires de portefeuille doivent soigner leurs relations avec les responsables de l’allocation d’actif, dit-elle. La création d’un plan de marketing relationnel semble être une voie efficace pour y parvenir, ajoute-t-elle.

Les résultats de cette étude ont été présentés récemment lors d’une causerie organisée par le Conseil des gestionnaires en émergence (CGE), qui se compose d’une quarantaine de gestionnaires québécois dont l’actif sous gestion est inférieur à 1 G$.

«Chez les gestionnaires en émergence, la nécessité de déployer des stratégies destinées à diminuer la perception de risque m’apparaît encore plus importante», précise Isabelle Gervasio.

Pas de surprise

La décision portant sur le choix d’un gestionnaire de portefeuille repose sur la confiance qui marque la relation, montrent les résultats de l’étude.

Des résultats qui sont appuyés par l’étude CFA Institute & Edelman Investor Trust 2013 citée par Isabelle Gervasio, au sein de laquelle on mentionne que l’obtention de rendements élevés a été citée deux fois moins souvent, et le montant des frais, cinq fois moins souvent.

Ainsi, le responsable de l’allocation d’actif doit avoir la conviction que le gestionnaire de portefeuille agira dans son intérêt.

De fait, la crédibilité et la confiance sont les deux plus importants critères de type relationnel qui ont été définis. Ces critères ont respectivement été cités par 85 % et 75 % des répondants.

De plus, 70 % des participants ont mentionné vouloir une communication transparente et proactive de la part des firmes de gestion d’actif.

«Le respect du mandat et du processus contribue à générer la confiance. Le décideur ne veut pas de surprise, explique Isabelle Gervasio. S’il y a des difficultés, il veut être informé rapidement. Les gestionnaires de fonds conserveront leur crédibilité s’ils expliquent les raisons qui font que les rendements sont mauvais et si ces raisons sont cohérentes.»

La compétence et la fiabilité sont pour leur part les deux plus importants critères reliés à la qualité des services. Ces critères ont été déterminés respectivement par 95 % et 50 % des répondants.

«On désire qu’il y ait une structure en place, un plan de relève qui permet de maintenir le processus d’investissement, même en cas de départ d’employés-clés», illustre Isabelle Gervasio.

Réduire la perception du risque

La sécurité est d’une si grande importance pour les responsables de l’allocation d’actif qu’elle est implicite aux prises de décision, selon Isabelle Gervasio. La gestion du risque constitue également un facteur décisif.

«Le risque personnel est énorme pour les décideurs. S’ils font des recommandations qui ne s’avèrent pas tout à fait bonnes, au final ils perdent non seulement de l’argent, mais aussi leur crédibilité et potentiellement leur emploi», illustre Isabelle Gervasio.

C’est pourquoi plus le risque personnel est élevé, plus la décision du responsable de l’allocation d’actif sera motivée par des raisons qui permettent de diminuer la perception du risque, explique-t-elle.

Chez les responsables de l’allocation d’actif, la perception de risque se nourrit directement de l’incertitude liée aux bénéfices futurs, en regard des montants investis, analyse Isabelle Gervasio.

Parmi les éléments intangibles qui atténuent la perception du risque figure la notoriété dont bénéficie une entreprise et qui la distingue de la compétition. À preuve, 85 % des répondants ont affirmé que l’image de marque contribue à diminuer la perception du risque.

«En moyenne, les répondants ont accordé un niveau d’importance de 7 sur 10 à l’image de marque au moment de sélectionner un gestionnaire de portefeuille», précise Isabelle Gervasio.

Perceptions confrontées

Les résultats de l’étude montrent que l’avantage concurrentiel d’un gestionnaire de portefeuille repose largement sur sa réputation et que celle-ci est souvent tributaire de la qualité de la relation qui existe entre le responsable de l’allocation d’actif et le gestionnaire.

«Si les résultats ne sont pas très bons, il sera difficile pour un gestionnaire de se qualifier auprès d’un responsable de l’allocation d’actif. Le pourcentage de la décision qui n’est pas lié à la performance est toutefois plus élevé que je l’imaginais», témoigne Philippe Hynes, président de Tonus Capital et membre du conseil d’administration du CGE.

Il souligne l’importance de réduire la perception de risque pour se distinguer d’un autre gestionnaire de portefeuille.

«L’évocation des contrôles et procédures en place dans l’entreprise, tout comme le fait de parler de nos partenaires comme les gardiens de valeur et les auditeurs, est donc une stratégie qui peut influencer positivement la décision d’un responsable de l’allocation d’actif», ajoute Philippe Hynes.