Les surprises potentielles de 2018, selon Byron Wien de Blackstone
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M. Wien, 85 ans, définit ses surprises géopolitiques et macro-économiques comme des événements auxquels les investisseurs accordent une chance sur trois de se réaliser. Le financier les juge plus «probables» et leur attribue des probabilités de plus de 50%.

Les voici.

1- La Chine décide qu’il devient intolérable de coexister avec une force nucléaire montante sur sa frontière bien que la Corée du Nord serve d’amortisseur communiste entre elle et la démocratie de la Corée du Sud. La Chine coupe tout ravitaillement de pétrole et d’aliments à la Corée du Nord, qui accepte de suspendre son programme de développement nucléaire, tout en conservant son arsenal.

2- Le populisme, le tribalisme et l’anarchie se répandent un peu partout dans le monde. En Grande-Bretagne, le chef du Parti travailliste Jeremy Corbyn devient le nouveau premier ministre. En Espagne, la Catalogne reste turbulente malgré les mesures de contrôle du gouvernement national. En revanche, les répercussions du Brexit rapprochent les pays de l’Europe continentale et suscitent une meilleure collaboration entre eux. La croissance économique des pays membres s’améliore, malgré les effets négatifs du divorce britannique.

3- Le dollar américain revient à la vie. La croissance réelle dépasse 3% aux États-Unis, ce qui, avec les mesures pro-entreprises de l’administration Trump, ravivent l’intérêt pour les actifs en dollars américains. L’euro retombe à 1,10 tandis que le yen glisse à 120. Le rapatriement des profits des entreprises américaines réalisés à l’étranger soutient aussi le billet vert.

4- L’économie américaine s’accélère et alimente une surchauffe en Bourse qui provoque éventuellement un mouvement de repli de 10%. L’indice phare S&P 500 retombe à 2300 à cause de la hausse des taux d’intérêt, mais termine l’année 2018 à 3000 points parce que les profits continuent de croître et que la cadence de l’économie s’approche de 4%.

5- Le prix du baril de pétrole West Texas passe la barre des 80$US parce que la demande pour le carburant est plus forte que prévu au moment où la production décevante de pétrole de shiste rétrécit les stocks, pendant que l’OPEP reste disciplinée et que la production croît peu en Russie, au Venezuela au Nigeria, en Iran et en Iraq.

6- L’inflation devient un facteur d’incertitude. La croissance économique mondiale fait grimper les cours des matières premières. Les salaires augmentent parce que le marché de l’emploi dans les pays industrialisés se resserre. Aux États-Unis, le salaire horaire moyen enfle de près de 4% et l’indice des prix à la consommation dépasse 3%.

7- Le retour de l’inflation pousse les taux d’intérêt à la hausse. La Fed américaine hausse son taux directeur à quatre reprises en 2018 et le taux obligataire repère de 10 ans s’approche de 4%. En revanche, la Fed continue de revendre les titres à son bilan de façon graduelle afin de minimiser l’impact sur les marchés financiers. L’écart entre le rendement des obligations plus risquées et celui des obligations gouvernementales s’accentue et ébranle la Bourse.

8- L’accord de libre-échange nord-américain (Aléna) et l’entente nucléaire iranienne survivent à l’opposition ouverte de Donald Trump parce que déchirer l’Alena causerait trop de pertes d’emplois aux États-Unis, tandis que les alliés politiques des États-Unis soutiennent l’accord iranien. Le président réalise que c’est une erreur de ne pas avoir signé l’Accord Trans-Pacifique qui gonfle l’influence de la Chine. L’occupant de la Maison-Blanche fait pression pour que les États-Unis multiplient les ententes commerciales bilatérales en Asie.

9- Les Républicains perdent le contrôle de la Chambre des représentants et du Sénat lors des élections de mi-mandat de novembre. Les électeurs sont déçus que Trump n’ait pas tenu plusieurs de ses promesses électorales et deviennent de plus en plus irrités par ses gazouillis. Les élections de mi-mandat deviennent un référendum sur la présidence de Donald Trump.

10- Ayant élargi son autorité sur son parti lors du congrès d’octobre 2016, Xi Jinping tourne son attention sur les problèmes de crédit et décide de freiner l’emprunt des entreprises, au risque de ralentir l’économie et de créer moins d’emplois. La croissance réelle du PIB chinois diminue à 5,5%, mais nuit peu au rythme de l’économie mondiale. Le président chinois proclame que ces mesures assureront une croissance économique plus durable à long terme.

La palette des scénarios de M. Wien est évidemment plus longue et certains ne se hissent pas dans sa liste finale. «Certains m’apparaissent moins pertinents tandis que d’autres sont improbables», explique M. Wien.

Les voici.

11- Les investisseurs réalisent que les profits des entreprises d’Europe, d’Asie et des marchés émergents croissent plus vite que les bénéfices de leurs consoeurs américaines, tandis que l’évaluation des cours dans ces trois régions est aussi plus attrayante. Les placements à l’étranger viennent à occuper plus de place dans les portefeuilles.

12- L’enquête Mueller sur la collusion russe lors des élections de 2016 ne réussit pas à démontrer le rôle des membres de la famille Trump ou de son entourage dans un effort pour influencer le vote.

13- L’intelligence artificielle gagne en force. Les emplois dans les industries des services sont de plus en plus automatisés, notamment pour les employés légaux et financiers ainsi que les salariés dans la restauration rapide et dans le secteur de la santé. Les économistes commencent à mettre en doute le taux de chômage inférieur à 4% parce que tant de salariés perdent leur emploi et réclament de l’aide gouvernementale.

14- Les cyberattaques se multiplient et commencent à miner la confiance des consommateurs. Une importante institution financière suspend les dépôts et les retraits pendant trois jours parce que son système a été compromis. De plus en plus de détaillants révèlent le vol d’informations personnelles. Devant la menace croissante, les entreprises redoublent d’efforts pour mettre à niveau leurs pare-feu.

15- Les autorités d’Europe et des États-Unis se préoccupent de plus en plus de la «destruction créative» que mènent les géants du Web. Sous la pression des détaillants et des médias, les gouvernements intensifient les enquêtes concernant les pratiques anti-concurrentielles d’Amazon, de Facebook et de Google. Le grand public commence à croire que ces titans du Web ont trop de pouvoirs.

16- Les risques entourant le Bitcoin atteignent de telles proportions que les autorités réglementaires limitent la négociation des monnaies virtuelles. Les autorités s’alarment du manque de supervision réglementaire, de l’absence de mesures de sécurité de base, de l’absence de recours après une erreur transactionnelle, de l’absence d’assurance-dépôts et du risque de cyberattaque.