Les fondements de l'indexation fondamentale
rawpixel / 123RF Banque d'images

Les fonds basés sur l’indexation fondamentale tentent de contourner ce problème potentiel en rompant le lien entre la pondération d’une action et son prix.

Les indices pondérés selon la capitalisation boursière sont à la base efficaces et moins chers à construire. La pondération d’une action dans un indice pondéré selon la capitalisation boursière fluctue en fonction de son cours. Les investisseurs économisent des coûts de transaction car les plus grandes participations de l’indice sont naturellement les plus grosses compagnies dont les actions sont les plus liquides.

Contrairement aux indices axés sur la capitalisation boursière, l’indexation fondamentale détermine la taille des avoirs de l’indice en fonction de mesures comme le revenu d’une compagnie, ses bénéfices ou ses dividendes, au lieu de son cours. L’appellation « fondamentale » est relativement impropre dans ce cas, ces mesures n’étant « fondamentales » que dans la mesure où ce sont celles qu’utilisent traditionnellement les sélectionneurs d’actions qui effectuent leurs choix selon les données fondamentales.

Mais puisque l’indexation fondamentale utilise le niveau absolu (comme le revenu total) plutôt qu’un ratio relatif au prix (comme le ratio cours-ventes) pour déterminer la taille des participations, les indices fondamentaux maintiennent un penchant comparable pour les grandes capitalisations que les indices pondérés selon la capitalisation boursière mais rompent le lien avec le cours de l’action. Les plus grandes compagnies sont généralement celles qui engrangent le plus de revenus, de bénéfices ou de dividendes et reçoivent les plus grandes pondérations au sein de l’indice. L’indexation fondamentale est une méthode de pondération intuitive, mais quel est vraiment son avantage?

Taille et valeur présentées différemment

Le principal argument contre l’indexation fondamentale, c’est qu’il s’agit tout simplement d’une stratégie axée sur la valeur présentée comme une nouveauté. La plupart du temps, quand un portefeuille dévie de la pondération selon la capitalisation boursière, le portefeuille pondéré de façon différente augmente sa participation aux petites capitalisations et réduit sa participation aux grandes capitalisations. Le penchant pour la valeur inhérent à l’indexation fondamentale provient de deux sources. Premièrement, en pondérant ses avoirs en fonction d’une mesure fondamentale (comme le revenu), la stratégie surpondère les actions qui se négocient à un plus faible multiple que cette mesure.

Deuxièmement, lorsque la stratégie est rééquilibrée, elle élague les actions dont le cours a augmenté par rapport à cette mesure et augmente sa participation aux avoirs qui se sont sous-classés par rapport au marché relativement à cette mesure fondamentale. Cette approche de pondération privilégie les actions de valeur, mais elle est moins constamment axée sur la valeur que les autres indices axés sur la valeur et pondérés en fonction de la capitalisation boursière car elle ne cible pas explicitement les actions de valeur.

Dans un article intitulé Pourquoi l’indexation fondamentale peut-elle fonctionner- ou non ?, Paul Kaplan de Morningstar souligne que l’indexation fondamentale suppose implicitement que toutes les sociétés devraient se négocier selon les mêmes multiples d’évaluation. Les partisans de l’efficience du marché répliquent que les actions devraient, et d’une manière empirique c’est le cas, se négocier à des multiples différents en fonction de leur profil de risque et de croissance. M. Kaplan affirme aussi que sans connaître la juste valeur d’une action ou les justes multiples d’évaluation au préalable, il est impossible de conclure à l’avance que le cours actuel du marché est trop élevé ou trop faible et si les actions qui font état d’évaluations élevées sont surévaluées.

Taille et valeur partout

Les premiers fonds négociés en bourse pondérés selon l’indexation fondamentale offerts au Canada ont été lancés il y a plus de dix ans par l’ancienne famille de FNB Claymore, qui fait maintenant partie de iShares. Ces FNB se fondent sur les indices RAFI conçus par Research Affiliates, qui conjuguent plusieurs mesures fondamentales comme les flux de trésorerie, le revenu et les dividendes, plutôt qu’une mesure unique pour pondérer les avoirs. Plus récemment, Invesco a lancé plusieurs FNB PowerShares qui emploient également des indices RAFI.

Il existe plusieurs gammes de FNB pondérés selon l’indexation fondamentale cotés aux États-Unis dont l’historique remonte à près de dix ans. WisdomTree offre des gammes de FNB fondées à la fois sur les dividendes et les bénéfices pour les segments du marché des petites, moyennes et grandes capitalisations. Oppenheimer offre des FNB qui pondèrent leurs avoirs en fonction du revenu. Et PowerShares offre des FNB pondérés selon les mesures fondamentales dont les indices sous-jacents emploient la même méthodologie RAFI que leurs homologues inscrits au Canada.

J’ai utilisé Portfolio Visualizer, un outil en ligne gratuit, pour tester l’idée selon laquelle l’indexation fondamentale bénéficie de son penchant pour les sociétés de petite taille et la valeur en effectuant une régression des rendements mensuels des fonds inscrits aux États-Unis par rapport aux rendements mensuels des facteurs de petite teille, de valeur, d’élan et de rentabilité, conformément à la base de données French Data Library. Cette analyse emploie les données des rendements mensuels d’avril 2008 (la plus ancienne date de lancement commun des fonds sélectionnés) à mai 2017.

Presque tous les FNB pondérés selon l’indexation fondamentale ont un coefficient de saturation du facteur de valeur statistiquement élevé, ou qui n’est probablement pas dû au hasard. Cela indique qu’une portion de la performance des FNB pondérés selon les données fondamentales peut être attribuée à la participation au facteur de valeur. Les exceptions en sont WisdomTree US Earnings 500 ETF, WisdomTree US MidCap Earnings ETF et Oppenheimer Mid Cap Revenue ETF. Et tous les FNB pondérés selon l’indexation fondamentale, à l’exception de WisdomTree US LargeCap Dividend ETF, ont des pondérations axées sur l’élan qui, statistiquement, sont très négatives, certainement à cause de leur rééquilibrage anticonformiste. Puisque ces stratégies sont segmentées selon leur capitalisation boursière, le coefficient attribué au facteur de participation aux petites capitalisations n’est pas surprenant. Les FNB à grande capitalisation pondérés selon les données fondamentales montrent une participation négative aux petites capitalisations, alors que seules les participations d’EPS et DNL y ont une participation statistiquement importante. Toutes les stratégies axées sur les petites et moyennes capitalisations pondérées selon l’indexation fondamentale ou selon la capitalisation boursière affichent un coefficient positif important. Les pondérations axées sur la valeur et les sociétés de petite taille contribuent au rendement de cet échantillon de stratégies pondérées selon l’indexation fondamentale.

Research Affiliates, pionnière de la méthodologie d’indexation fondamentale, convient que les stratégies d’indexation fondamentale profitent largement des penchants vers les facteurs de valeur et de petite capitalisation. Rob Arnott, chef de la direction de Research Affiliates, et certains de ses collègues, ont conclu que de nombreuses stratégies qui ne sont pas axées sur la capitalisation boursière, y compris celles qui sont axées sur l’indexation fondamentale, se sont surclassées par rapport à l’indice pondéré selon la capitalisation boursière. Dans un article intitulé The Surprising Alpha from Malkiel’s Monkey and Upside-Down Strategies, ils ont affiché les résultats de rendement lorsqu’ils inversent les pondérations des portefeuilles pondérés selon l’indexation fondamentale de manière à ce que les avoirs au rendement inférieur reçoivent la plus grande pondération. Ces portefeuilles inversés se sont aussi surclassés par rapport à l’indice pondéré en fonction de la capitalisation boursière, et dans de nombreux cas, par rapport à la stratégie initiale. Les auteurs soutiennent que le succès autant des stratégies initiales que de leurs portefeuilles inversés est attribuable à leur penchant implicite vers les petites capitalisations et la valeur.

Research Affiliates soutient aussi que les stratégies d’indexation fondamentale profitent de leur coefficient de saturation à la valeur inconstant. La stratégie étoffe les actions à mesure qu’elles deviennent moins chères par rapport à une mesure fondamentale, plutôt que de dévier du marché en direction d’actions de valeur et de croissance. Research Affiliates affirme ensuite que les stratégies d’indexation fondamentale rehaussent le coefficient de valeur à mesure que la valeur baisse et le réduisent lorsque la valeur devient plus chère. Ainsi, l’indexation fondamentale offre un penchant dynamique vers la valeur qui peut récompenser les investisseurs.

Le penchant dynamique vers la valeur peut justifier que l’on paie des frais plus élevés pour ces fonds comparativement aux fonds de valeur pondérés selon la capitalisation boursière. Mais il est difficile de synchroniser le facteur de valeur, et l’approche dynamique n’offre toujours pas une participation unique. C’est en partie pourquoi les fonds à indexation fondamentale cités dans cet article et cotés par Morningstar reçoivent une cote Bronze des analystes, soit un cran plus bas que les fonds de valeur pondérés selon la capitalisation boursière les moins chers et les mieux gérés, offrant une participation à la valeur plus constante à une fraction du prix des options pondérées selon l’indexation fondamentale.