Les minutes de la Fed ajoutent de l'eau au moulin d'une hausse des taux
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Il y a 9 ans déjà, presque jour pour jour, le courtier américain Lehman Brothers, pris dans la tourmente de la crise des «subprimes», déclarait faillite. C’est à partir de ce moment que la crise financière se généralisa. Entraînées dans son sillon, les Bourses s’écroulèrent comme des châteaux de cartes.

La Fed a réagi en réduisant rapidement les taux d’intérêt à zéro. Elle a ensuite lancé trois programmes successifs d’assouplissement quantitatif (quantitative easing, QE) qui consistaient à acheter des quantités importantes d’obligations et d’autres titres de dettes afin d’assurer que les taux d’intérêt à long terme demeureraient eux aussi très bas.

À n’en pas douter, les actions de la Fed ont été couronnées de succès. L’économie américaine a retrouvé un rythme de croissance respectable et l’indice S&P500 est à un niveau record, en hausse de 270% depuis le creux du 9 mars 2009. Mais en contrepartie, les actifs de la Fed ont plus que doublé pendant ce temps et atteignent aujourd’hui 4,500 milliards de dollars américains (G$US).

Mercredi, Janet Yellen, présidente de la Fed, annonçait que le temps était venu de renverser la vapeur. Dès octobre, la Fed commencera à alléger son bilan en ne remplaçant pas les titres qui viendront à échéance. Elle le fera graduellement. D’abord 10 G$US par mois, mais en augmentant de 10 G$US à chaque trimestre jusqu’à concurrence de 50 G$US par mois.

Si les marchés boursiers ont autant carburé aux liquidités injectées par la Fed, il est certainement raisonnable de croire que le retrait, bien que progressif, de ces liquidités, pourrait maintenant causer un certain refroidissement des marchés, explique Ismaël Chiadmi, directeur de la gestion quantitative chez Montrusco Bolton. Surtout que cela se produit à un moment où le VIX, surnommé l’indicateur de la peur, se situe à 9,7, indiquant ainsi un très grand niveau de complaisance.

L’euphorie sur les places financières est souvent un phénomène persistant qui ne s’arrête pas nécessairement aussitôt qu’un changement de conjoncture apparaît, rappelle M. Chiadmi. «Mais lorsque cela se produit, il s’ensuit généralement une chute précipitée des marchés», dit-il. «Et cela peut arriver à tout moment», ajoute-t-il.

Tout doute quant à la validité de ce bull market semble s’être complètement estompé. En effet, de nombreux investisseurs s’abstenaient de plonger en Bourse au cours des dernières années parce qu’ils croyaient que les actions de la Fed faisaient en sorte que le rallye était artificiel, explique Howard Gold, éditeur de la lettre financière Golden Egg Investing. Mais ils ont maintenant tous revu leur copie, estime l’éditeur. Une enquête menée par Wells Fargo/Gallop indique que 68% des investisseurs américains sont optimistes quant à la performance du marché boursier au cours de la prochaine année. Ce degré d’optimisme égale celui qui régnait en décembre 1999, juste avant l’éclatement de la bulle techno.

Le plus récent sondage hebdomadaire de l’American Association of Individual Investors (AAII), ainsi que le Market Vane Bullish Consensus, deux indicateurs très suivis, démontrent aussi des niveaux de confiance rarement égalés.

Certains experts toutefois ne semblent ne pas trop s’inquiéter du changement de cap de la Fed et invoquent d’autres facteurs pour justifier l’optimisme des investisseurs. C’est le cas de Jeffrey Kleintop, Chef stratège chez Charles Schwab. «Les profits des sociétés et non les banques centrales, sont le principal moteur du rallye boursier mondial», dit-il en entrevue à MarketWatch. «Il ne faut donc pas perdre de sommeil avec cette annonce, par ailleurs très attendue de la Fed, qu’elle va réduire son bilan», ajoute-t-il.