La Chine a fondé, à hauteur de 100 milliards de dollars américains (G$ US), la Banque asiatique d’investissement pour les infrastructures (BAII) à la fin de l’an dernier pour offrir aux autres pays de la région l’accès au financement dont ils ont besoin pour des projets dans des secteurs comme les transports, l’énergie et les télécommunications.

Le gouvernement canadien a fait cette annonce après une rencontre entre M. Trudeau et son homologue chinois Li Keqiang, mercredi à Pékin, mais n’a pas immédiatement révélé quelle somme il investira dans cette banque.

Le gouvernement a expliqué par voie de communiqué que cette décision permettra au Canada de participer encore davantage aux efforts multilatéraux d’infrastructure, en plus d’ouvrir la voie aux entreprises canadiennes qui recherchent des occasions d’affaires.

M. Trudeau avait laissé entendre l’an dernier que la candidature du Canada était en préparation.

« Mon gouvernement croit beaucoup à l’importance des investissements en infrastructures, avait dit M. Trudeau lors d’une rencontre avec des hommes d’affaires. C’est notamment pourquoi nous envisageons très favorablement de nous joindre à la BAII. »

Le ministre des Finances Bill Morneau, qui accompagne le premier ministre en Chine, a rencontré mercredi à Pékin le président de la BAII, Jin Liqun.

La banque a déjà investi plus de 500 G$ US au Bangladesh, en Indonésie, au Pakistan et au Tadjikistan, et des dirigeants chinois ont révélé qu’elle prévoit prêter entre 10 et 15 G$ US au cours des cinq prochaines années.

Le Canada en deviendrait le premier membre nord-américain. Il se joindrait aux 57 autres pays, dont l’Australie, le Royaume-Uni, la France, l’Allemagne et la Corée du Sud, qui ont fait la même chose l’an dernier, en dépit de l’opposition des États-Unis.

Les pays qui se joignent à la BAII acceptent de contribuer des fonds sous forme d’actions. L’Australie a accepté de verser 930 M$ sur cinq ans, soit la sixième contribution la plus importante.

Les dirigeants de la banque pourraient annoncer les nouveaux membres au début de 2017, selon des documents du gouvernement canadien. Le communiqué ajoute que l’ampleur de la participation canadienne sera décidée à ce moment.

Des responsables américains préviennent que la nouvelle banque offrira des prêts aux pays en voie de développement sans exiger de garanties en ce qui concerne l’environnement, les droits des travailleurs ou les efforts anticorruption, comme cela est typiquement le cas lors de prêts consentis par le Fonds monétaire international ou la Banque mondiale.

L’ancien diplomate canadien Charles Burton a expliqué que l’inclusion du Canada au sein de cette banque démontrerait qu’Ottawa est prête à voir la Chine jouer un rôle important sur la scène économique mondiale.

« Nous essayons certainement d’indiquer que nous sommes prêts à voir la Chine jouer un rôle de premier plan dans l’économie mondiale, a dit M. Burton, qui est maintenant politologue à l’Université Brock. Et en appuyant une institution qui est une idée de la Chine, nous indiquons que nous avons confiance que la Chine utilisera cette institution pour le bien commun, d’une manière libérale et internationaliste, et non seulement pour augmenter son pouvoir géopolitique. »

Certains dirigeants canadiens hésitent quand même à appuyer l’influence globale de la Chine, surtout en raison de ses récents agissements en mer de Chine méridionale, a dit Paul Evans, de l’Université de la Colombie-Britannique. La plupart croient toutefois que le Canada a commis une erreur en ne joignant pas la banque l’an dernier.

Les quatre projets approuvés cette année ont calmé plusieurs des inquiétudes de l’Occident face à la nouvelle banque, a-t-il dit, notamment de voir la Chine l’utiliser pour faire avancer ses propres intérêts stratégiques et commerciaux.

M. Evans a ajouté que la décision du gouvernement libéral de rejoindre la banque aurait une importance symbolique pour les relations Canada-Chine.

Et si le coût risque d’être élevé, il estime qu’il pourrait atteindre 1 G$, les compagnies canadiennes profiteront indirectement des milliards de dollars en projets que la banque financera, selon lui.