John Hancock veut réinventer l'industrie de l'assurance vie
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Les détenteurs de cette police d’assurance-vie à terme pourront gagner des points en faisant de l’exercice, en passant leur bilan de santé annuel ou en adoptant de saines habitudes alimentaires, le tout grâce à une montre intelligente. En échange, l’assureur leur offrira jusqu’à 15 % d’escompte sur leur prime en plus de rabais sur des produits offerts par divers partenaires.

Qui utilise ces produits? Ont-ils un impact sur l’augmentation des ventes de polices d’assurance? Finance et Investissement en a discuté avec Brooks Tingle, vice-président principal, marketing et stratégie chez John Hancock, la filiale de Manuvie qui offre ce produit depuis avril 2015 aux États-Unis.

Le produit a-t-il le succès escompté ?

Ce que nous avons constaté est qu’il a changé la conversation autour de l’assurance-vie, qui a toujours été vue comme un produit que l’on considère à la toute fin. Avec Vitalité, au lieu de parler de la mort, on parle de la vie et de bien-vivre ! Ce qui a changé aussi est que les clients ont maintenant une relation avec leur assureur, ce qui n’était pas le cas avant. Traditionnellement, on a des nouvelles de son assureur-vie une fois par année, pour payer sa facture, alors que le reste de l’année, on n’a pas vraiment de contact positif avec lui.

Quel impact le programme Vitalité a-t-il eu jusqu’à maintenant sur le volume de primes brutes ?

Nous ne rapportons pas publiquement nos ventes, mais je peux dire que notre processus d’adoption état par état va bon train. Nous ciblons les endroits où sont nos partenaires et où les consommateurs peuvent profiter le plus des bénéfices. Nos partenaires nous disent que le pourcentage de clients qui utilisent les rabais ne cesse d’augmenter et nous voyons qu’ils utilisent l’application de plus en plus. L’industrie n’est pas reconnue pour être innovatrice, alors nous avançons en terrain inconnu en essayant de la révolutionner.

Comment se compare le produit par rapport aux polices standard pour une personne en bonne santé ? Est-il concurrentiel ?

Les 10 à 15 % d’escompte qui s’appliquent aux clients les plus en santé s’appliquent aussi à ceux qui se classent dans les meilleures catégories de risque pour nos autres produits. Et ça se compare aux autres produits dans l’industrie. C’est pour les clients moins en santé que Vitalité est le plus avantageux. Ceux-ci doivent généralement payer 2 % de plus sous le niveau de risque moyen. Le programme Vitalité leur donne une possibilité de diminuer cette prime. En perdant du poids où en contrôlant mieux leur diabète, ils seront récompensés alors que chez d’autres assureurs, ils sont étiquetés pour toujours.

Pourquoi avez-vous créé ce produit ? Quel était l’incitatif ?

Il y a un phénomène très inquiétant actuellement aux États-Unis. Une proportion croissante de gens n’ont aucune protection. La vente de polices a chuté de manière importante depuis 50 ans aux États-Unis, si bien que nous avons le plus bas taux de souscription depuis les années 1960.

Ça nous attriste de voir que lors de leurs réclamations, les clients constatent qu’ils ne sont pas protégés selon leurs besoins et nous croyons que ceux qui n’ont jamais senti le besoin d’avoir une assurance-vie pourraient le considérer. Nous voulions aussi réinventer l’assurance-vie pour créer un engagement avec le consommateur. Avec Vitalité, nous avons multiplié par 20 nos interactions avec nos clients.

Quelle était votre clientèle cible ? Est-ce que le profil du consommateur a changé avec Vitalité ?

C’est une bonne question. Nous avons eu de longues discussions à ce sujet avant de lancer le produit. Certains pensaient que ça allait attirer les jeunes, ou que les gens en santé n’allaient pas voir les avantages liés au produit. Finalement, nous voyons une adhésion parmi un public de tous les âges. Le premier appel que nous avons reçu était un homme de 72 ans qui disait aimer l’application !

Cela dit, nous avons quand même constaté que plus de jeunes et de femmes s’intéressaient à la solution et ce n’est pas notre clientèle habituelle. Pour les plus en santé, ce sont les escomptes sur la prime qui comptent le plus tandis les plus jeunes, qui ont des familles, sont plus attirés par les rabais sur la nourriture.

Comment assurez-vous la confidentialité des données et la protection de la vie privée ?

C’est une importante question. Dans les groupes de discussion avec notre clientèle, nous avons constaté qu’ils étaient en général peu inquiets par rapport à la confidentialité des données. Ils savent que nous avons déjà des informations très personnelles les concernant et que c’est notre mission depuis toujours d’en assurer la confidentialité. Les gens n’aiment pas toujours l’industrie des assurances, mais s’il y a une chose dont ils peuvent être sûrs, c’est que leurs données sont bien protégées.

Cela dit, les clients peuvent choisir ce qu’ils veulent partager. Ils peuvent décider de partager le nombre de pas qu’ils font chaque jour, mais de ne pas transmettre leurs résultats biométriques. Ils ont l’option de gagner un peu plus de points en le faisant, mais ils ont toujours le choix.

Si les clients devaient eux-mêmes rapporter leur performance dans un formulaire en ligne chaque jour, ils ne le feraient pas. Avec l’intégration d’appareils mobile, ça simplifie l’utilisation.

Quelles sont vos ambitions avec ce produit ?

Ça nous donne la possibilité de mieux servir nos clients. Jusqu’ici, notre industrie n’a pas fait un travail extraordinaire pour grandir avec ses clients. Avec ces données, nous pourrons leur offrir d’autres services ou produits. L’an dernier, nous avons priorisé l’activité physique, ensuite nous avons intégré des points pour l’alimentation santé. Nous l’avons aussi rendu disponible pour les plus âgés. Maintenant, les 80 ans et plus peuvent participer. Au fond, qui d’autre qu’un assureur-vie a le plus intérêt à ce que ces clients vivent le plus longtemps possible et en santé ?