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L’entrepreneuriat dans le sang

En arrivant en poste, Martin Thibodeau savait qu’il avait de «grands souliers à chausser» pour remplacer Micheline Martin à titre de président, direction du Québec, à la Banque Royale du Canada (RBC). Après avoir passé 24 ans au sein de RBC, il était néanmoins prêt à prendre le relais.«J’ai travaillé dans sept provinces, soit le Québec, l’Ontario, la Saskatchewan, le Manitoba, le Nouveau-Brunswick, l’Île-du-Prince-Édouard et la Nouvelle-Écosse, dit-il. J’ai d’abord été directeur adjoint de la succursale principale de la Ville de Québec avant de me diriger vers le service aux entreprises, où j’ai passé la majeure partie de ma carrière.»

Le fait de travailler en contact étroit avec des entrepreneurs a d’ailleurs marqué tout particulièrement Martin Thibodeau. «Ce qui me fascinait, c’était de voir comment ils avaient démarré leur entreprise, et non pas les chiffres comme tels. Les chiffres ne sont après tout que le reflet des décisions prises par l’entrepreneur. J’aimais connaître l’histoire de l’entreprise, et le fait qu’au fil du temps je devenais petit à petit le partenaire de cet entrepreneur. C’était aussi très stimulant d’un point de vue intellectuel, puisqu’à la longue, les cas devenaient plus complexes.»

Martin Thibodeau s’est visiblement laissé inspirer par les nombreux chefs d’entreprise qu’il a rencontrés durant sa carrière, puisqu’il n’hésite pas à prendre les moyens de ses ambitions. Dès son arrivée en poste en juillet dernier, il a créé deux directions régionales, l’une en Estrie et l’autre qui regroupe l’Outaouais et l’Abitibi. Dans un contexte où la croissance économique du Québec se situe au-dessous de la moyenne canadienne, Martin Thibodeau a choisi de faire le pari du long terme.

«Créer deux directions régionales, cela représente un investissement salarial de 1 M$. À court terme, cela pouvait sembler une mauvaise idée, raconte-t-il. Pourtant, je savais que je devais investir puisque j’avais des directeurs et des vice-présidents qui comptaient entre 20 et 25 personnes se rapportant à eux. Avec autant de monde à superviser, il est impossible pour nos directeurs de succursales de faire un suivi, un coaching et une formation de qualité.»

Autre investissement important au Québec, l’ouverture de trois nouvelles succursales sur la Rive-Sud de Montréal depuis le début du mois de septembre : à La Prairie, à Saint-Hubert et dans le quartier Dix30, à Brossard, ce qui a entraîné la création de plus de 50 nouveaux emplois dans la région. Pour RBC, la Rive-Sud de Montréal était un marché prioritaire, notamment en raison de la concentration de population et d’entreprises qu’on y retrouve.

«Toutes nos nouvelles boutiques remportent du succès, mais c’est particulièrement vrai à Saint-Hubert, où l’engouement manifesté est bien au-dessus de nos attentes. Il y a beaucoup de nouveaux clients, mais également des clients en provenance d’autres institutions financières», indique Martin Thibodeau.

Lorsqu’un client entre dans une boutique de services financiers de RBC, il est accueilli par un employé qui l’accompagne en fonction de ses besoins. Les employés n’ont pas de bureau assigné, mais ils peuvent en emprunter un pour une rencontre ou encore utiliser une banquette ou une salle de conférence, selon les préférences du client.

«Ces boutiques offrent les mêmes services qu’une succursale, mais différemment, souligne-t-il. Il y a toujours des employés sur place pour accueillir les clients, puisque s’ils ne sont pas occupés avec un client, ils ne sont pas dans un bureau. Je sais qu’il y a toujours des tâches administratives à faire et on peut toujours se cacher derrière elles, mais l’administration ne doit pas toujours être la priorité. La priorité, c’est le client et ses besoins.»

Cette nouvelle approche est à l’opposé de ce qui se faisait autrefois dans le secteur bancaire, où l’on ne jurait que par le temps d’attente du client lors de son passage en succursale : «Il y a 20 ans, le but était de servir le client le plus rapidement possible. La vitesse d’exécution était la mesure la plus importante alors que le comportement de l’employé n’entrait pas en compte. Aujourd’hui, c’est la qualité de l’expérience client qui est au coeur de nos préoccupations».

Nouveaux axes de croissance

Plusieurs nouvelles boutiques de services financiers devraient ouvrir leurs portes prochainement, d’abord celle du secteur Griffintown, à Montréal, qui verra le jour d’ici la fin de l’année. En 2014, l’ouverture d’une autre boutique est également prévue à Lachenaie, en banlieue nord de Montréal, un secteur que RBC garde également à l’oeil. En tout, une dizaine de succursales auront ouvert leurs portes durant une période de 18 à 24 mois.

«La concurrence est forte sur le marché, mais contrairement à plusieurs de nos compétiteurs, nous ne nous sommes jamais désinvestis du Québec. Nous y avons toujours été présents et c’est quelque chose dont nous sommes très fiers», soutient Martin Thibodeau.

RBC n’est pas seule sur le marché des boutiques de services financiers, un concept qui a déjà été utilisé de toutes les façons possibles par d’autres institutions financières, mais c’est par l’engagement de ses employés que Martin Thibodeau espère se distinguer. Selon les mesures internes de RBC, le taux d’engagement de ses employés se situe autour de 66 %, soit juste au-dessous de son objectif de 70 %.

«Les meilleures entreprises en Amérique du Nord ont des taux d’engagement de 60 à 65 %. Si mes employés sont engagés, ils seront impliqués dans leur collectivité et dans leur boutique. C’est là que ça se passe si nous souhaitons tirer notre épingle du jeu. Qu’on soit à Winnipeg ou à Montréal, c’est le fait de bien connaître la clientèle, la communauté d’affaires et les concurrents qui nous permet d’être bons dans notre travail», note-t-il.

Afin de canaliser l’énergie de ses employés, Martin Thibodeau a créé quatre groupes de ressources sur différents sujets qui lui tiennent à coeur, soit les femmes, les communautés culturelles, les autochtones et la communauté lesbienne, gaie, bisexuelle et transgenre (LGBT). Ce sont quatre bassins où RBC souhaite recruter de nouveaux clients et de nouveaux employés. Par exemple, parmi les actions choisies par le comité de ressources LGBT, une invitation a été lancée à tous les employés de la banque afin qu’ils participent au défilé de la fierté gaie, qui se tenait le 18 août dernier à Montréal.

«Le jour même, je me suis présenté avec ma famille et nous étions près de 150 qui représentaient RBC à la parade. C’était une grande fierté de voir l’enthousiasme de nos employés à y participer. Nous étions le plus grand groupe de la parade ce jour-là. Depuis, ça continue, nos employés s’investissent et montrent l’engagement qui est au coeur de notre chaîne de valeurs.»

«Quant aux communautés culturelles, elles représentent un bassin de recrutement de clients potentiels, mais également de nouveaux employés pour RBC. La croissance de la population du Québec découle à 70 % des nouveaux arrivants, et de cette portion d’immigrants, 64 % sont des diplômés. Lorsque je rencontre les cohortes de nouveaux employés, je suis toujours impressionné par la compétence et les expériences diversifiées qu’ils ont à leur arrivée au Canada. En bref, nous sommes choyés qu’ils nous choisissent comme premier employeur.»

L’entrepreneuriat dans le sang

Ce n’est pas d’hier que Louis Vachon a l’entrepreneuriat à coeur. «Quand j’étais enfant, chez nous, ce n’étaient pas les joueurs de hockey qui étaient admirés, c’étaient les entrepreneurs», soutient-il.Cet homme de 50 ans est le fils d’un Beauceron qui a été l’un des bâtisseurs de la firme de transport Dumont Express, à l’origine de TransForce. Et dans sa famille élargie, il compte les fondateurs de la pâtisserie Vachon, aujourd’hui intégrée au groupe Saputo.

Le président et chef de la direction de la Banque Nationale du Canada (BN), qui se positionne comme la banque des PME, parle avec émotion d’entrepreneuriat : «C’est plus qu’un enjeu économique. C’est un enjeu social. On estime qu’au cours des 10 prochaines années, 40 % de nos clients commerciaux vivront un transfert de propriété d’entreprise. C’est énorme.»

Selon Louis Vachon, tous doivent mettre la main à la pâte pour favoriser ces transitions : «Ça fait 50 ans qu’on travaille au Québec pour avoir une économie de propriétaires. On l’a fait. Est-ce qu’on peut s’assurer de préserver sa pérennité ?»

Deux acquisitions significatives

En 2012, Louis Vachon a eu au moins deux occasions de démontrer son attachement à l’économie financière du Québec : la vente de Gestion de portefeuille Natcan à Fiera Capital et la conclusion de l’acquisition du Groupe TMX par Maple.

«On peut bien parler de créer une place financière à Montréal ; à un moment donné, il faut passer de la parole à l’acte, indique Louis Vachon. C’étaient de belles façons de le faire.»

Selon lui, la cession de Natcan prouve que deux institutions financières québécoises concurrentes, le Mouvement Desjardins et la BN, peuvent coopérer pour permettre à l’entrepreneur Jean-Guy Desjardins, chef de la direction de Fiera Capital, de créer à Montréal l’un des plus importants gestionnaires de placements indépendants au Canada.

Avant la vente, la coopérative détenait une participation minoritaire dans Fiera, celle-ci a été quelque peu réduite au terme de la transaction. «Assez tôt, j’ai indiqué à Jean-Guy Desjardins qu’il pouvait communiquer avec Monique Leroux. Nous étions prêts à travailler avec le Mouvement Desjardins», raconte Louis Vachon.

Aujourd’hui, le dirigeant se dit très satisfait de cette participation : «Vu les nouvelles règles de Bâle III, avoir un intérêt majoritaire serait punitif du point de vue du capital réglementaire». Et il perçoit Fiera à la fois comme un outil de consolidation de l’industrie de la gestion de portefeuille et un vecteur de croissance pour la BN.

L’acquisition du Groupe TMX reste toutefois la plus grande satisfaction de Louis Vachon en 2012. Le dirigeant raconte que le projet de fusion des Bourses de Londres et de Toronto, en février 2011, a catalysé la réflexion sur le modèle canadien.

«Ed Clark, de la Banque TD, m’a appelé et m’a dit : « J’ai entendu dire que tu n’aimes pas bien bien le deal. » J’ai répondu non. « Nous non plus. Alors, on devrait se parler »», relate Louis Vachon. Maple venait de naître. Le groupe acquéreur sera finalement composé de 12 institutions financières et caisses de retraite canadiennes.

Louis Vachon qui, avec Luc Bertrand, a joué un rôle pivot dans cette acquisition, compare la conclusion de celle-ci à un long marathon. Il fallait en rallier du monde : les membres du groupe acquéreur, les régulateurs, les différents paliers de gouvernement et, bien sûr, les dirigeants de TMX, dont la tentative d’union avec la Bourse de Londres venait d’échouer.

Regrouper le Groupe TMX avec le Groupe Alpha et les Services de dépôt et de compensation CDS afin de créer une Bourse de négociation intégrée et des services de compensation pour divers produits financiers était préférable pour le Canada, selon Louis Vachon : «Cette logique était la meilleure, tant pour l’actionnaire et l’efficacité des marchés que du point de vue macroprudentiel».

L’histoire comme guide

Louis Vachon n’est pas seulement un passionné de finance. Il affectionne aussi l’histoire, ce qui lui a été utile. La gestion de la crise du papier commercial (PCAA), en 2007, en est un bon exemple.

Durant cette période de turbulence, Louis Vachon lisait un livre sur une autre crise financière, celle de 1907 aux États-Unis. À l’époque, la Réserve fédérale n’existe pas. La chute d’une société fiduciaire crée une panique boursière et financière. John Pierpont Morgan, le fondateur de la banque new-yorkaise, persuade alors d’autres banquiers d’intervenir.

Les auteurs concluent qu’une crise est plus facile à contrôler lorsque peu d’individus doivent négocier pour la résoudre. «Il y a moins de monde à convaincre, observe Louis Vachon. Durant la crise du PCAA, une des choses qui nous a avantagés, c’est justement que le papier était concentré dans quelques mains. C’était beaucoup plus facile pour le restructurer.»

Malgré cette crise, la BN a continué de prendre des risques calculés pour se développer. Selon Louis Vachon, sa meilleure décision a été de lancer la transformation «Un client, une banque» en 2008, en pleine crise financière mondiale.

«Ça a focalisé l’organisation sur quelque chose de positif, souligne-t-il. Nous avons dit à nos 20 000 employés : « Arrêtez de lire les journaux. Nous avons une transformation. Nous croyons en l’avenir et nous allons passer au travers. » Nous avions un plan de match et nous avons vite rebondi en 2009.»

Son bénéfice double

Depuis, la BN se démarque. Par rapport à l’exercice 2008, le bénéfice net de la banque a doublé en 2012, son dividende trimestriel a grimpé de 34 %, et son action est montée d’environ 50 %.

Pour obtenir ces résultats, les employés de toutes les divisions ont mis l’épaule à la roue. Dans son secteur des services aux particuliers et entreprises, la banque a rénové ou déplacé 175 de ses 450 succursales, a ajouté 300 conseillers à son réseau de succursales et a formé son personnel afin de favoriser des ventes croisées entre services.

C’est dans le secteur des marchés financiers que la stratégie des ventes croisées a connu le plus de succès, explique Louis Vachon : «Depuis 25 ans, nous sommes un des prêteurs importants dans l’Ouest canadien pour les producteurs intermédiaires de gaz et de pétrole. Est-ce que ces sociétés établissaient des contrats de protection sur le prix du gaz naturel et du pétrole avec nous avant ? Non. Maintenant, elles le font.»

Dans le secteur de la gestion de patrimoine, la Financière Banque Nationale (FBN) a atteint l’objectif qu’elle s’était fixé il y a cinq ans : employer 1 000 représentants et que 50 % de ses affaires proviennent de l’extérieur du Québec.

Le tout a été possible notamment grâce à différentes acquisitions, dont Wellington West et la division consacrée au placement de plein exercice de Valeurs mobilières HSBC (Canada), en 2011. «Une des résultantes de la crise financière, c’est une augmentation des exigences de la réglementation. Ça a amené Wellington West à venir travailler avec nous», note Louis Vachon.

Continuité

Dans les prochaines années, Louis Vachon compte maintenir le cap.

En matière de gestion de patrimoine, la BN veut davantage courtiser les clients disposant d’un avoir net élevé, qui contrôleront plus de 80 % de la richesse financière du Canada d’ici 2020, selon certaines prévisions.

Pour ce faire, la banque déploiera progressivement le modèle d’affaires Gestion privée 1859 dans l’Ouest canadien, avec un bureau à Calgary en 2013. Elle terminera l’intégration de Wellington West et de Valeurs mobilières HSBC. «À la FBN, nous sommes plus en mode croissance interne qu’en mode acquisition.»

L’institution financière entend améliorer les outils, technologiques et de formation, utilisés dans ses réseaux de distribution, augmenter les références dans ses canaux de distribution et accroître ses revenus.

Sur le plan des services aux particuliers et aux entreprises, la BN implantera une nouvelle plateforme d’octroi de financement hypothécaire dans toutes ses succursales québécoises en 2013.

L’institution financière préparera aussi le déploiement d’autres outils informatiques prévus pour l’an prochain. «L’année 2013 est une année de transition. Nous présentons ça à l’interne comme la fin prochaine d' »Un client, une banque 1.0″ et l’arrivée d' »Un client, une banque 2.0″», conclut Louis Vachon.

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