Investissements Manuvie : fusions de fonds
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Ainsi, en décembre 2016, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) dévoilaient l’Avis 33-318, «Analyse des pratiques de rémunération des représentants», qui définit 27 pratiques de rémunération, dont 17 sont critiquées, certaines engendrant un conflit d’intérêts potentiel ou réel.

Parmi celles-ci, les ACVM montraient du doigt les incitatifs de type «premier au fil d’arrivée», selon lesquels un représentant touche une rémunération pécuniaire ou non, fixée en fonction du rang du chiffre d’affaires ou du chiffre de ventes qu’il occupe au sein de la société sur une période fixe. Le groupe de régulateurs citait en exemple les voyages ou les conférences offerts en reconnaissance ou les clubs du président.

Selon les ACVM, «cette pratique peut inciter les représentants à multiplier les ventes et à générer un chiffre d’affaires dès que possible, ce qui risque de mettre en conflit les besoins à long terme du client, d’une part, et le chiffre d’affaires à court terme et les cibles de rentabilité de la société, d’autre part.»

«Nous sommes conformes»

Les mesures incitatives mises en place par deux cabinets multidisciplinaires sont conformes, affirment leurs dirigeants. Elles prennent souvent la forme de congrès, soit de congrès de formation ou de rencontre des meilleurs producteurs.

«Nos congrès sont corrects sur le plan de la réglementation», note Stéphane Beaumier, vice-président régional Québec à la Financière Sun Life.

Pour qu’un conseiller se qualifie pour le congrès de Distribution Financière Sun Life, on considère l’ensemble des ventes de l’année, de janvier à décembre, et non durant une courte période. En épargne collective, tous les produits ont la même pondération pour se qualifier pour le congrès, les produits de la Sun Life comme ceux de la concurrence.

«On ne peut pas aller contre les besoins de son client. Il n’y a pas un produit qui donne plus de points que d’autres. C’est bon en assurance comme en épargne collective», dit Stéphane Beaumier.

Les congrès de MICA Services financiers sont également conformes, estime Gino Savard, président du cabinet de la région de Québec, en entrevue : «Je ne vois pas comment un client peut se trouver brimé. Je n’encourage pas de modèle d’affaires.»

Pour se qualifier pour le congrès, MICA observe les volumes d’affaires annuels et non durant une période plus courte, comme l’été ou le début de l’automne. Aucun produit ne donne plus de points qu’un autre et aucun manufacturier de produit financier n’est indirectement avantagé, selon Gino Savard.

Un conseiller de MICA ne pourrait pas offrir des fonds à frais d’acquisition reportés (FAR) plutôt que des fonds sans frais d’acquisition pour améliorer ses chances d’accéder au congrès, dit Gino Savard : «[Les conseillers] n’utilisent pas plus de FAR pour venir là, parce que mes ventes de FAR sont en chute libre. Je n’observe aucun pattern.»

«Je ne pousse pas mes conseillers pour qu’ils rentrent plus de business ou qu’ils poussent [des ventes] auprès des clients, poursuit-il. [Avec cette rémunération supplémentaire sous forme de voyage], je remercie mes conseillers. Ça crée un esprit de corps. Ils échangent de l’information entre eux. Si un jour le régulateur me dit que je n’ai plus le droit de faire ça, je ne le ferai plus. Je vais quand même lui demander pourquoi, parce que je ne brime pas le client», poursuit-il.

Non aux voyages de reconnaissance

Robert Frances, président et chef de la direction du Groupe financier PEAK, s’oppose à ce genre de mesures incitatives et se réjouit que les ACVM les ciblent : «On n’a pas de concours de vente. On n’a pas de congrès. On n’a pas de trophée de vente. Personne ne connaît le niveau de vente d’un autre conseiller. Il n’y a pas de produit qui est poussé. Il n’y a pas d’honneur qu’on donne au conseiller.»

«Nous sommes des professionnels, continue-t-il. Je ne serais pas content de savoir que mon avocat a gagné la médaille de celui qui a poussé le plus les honoraires dans sa firme.»

Chez PEAK, l’accès au club excellence n’est pas basé sur le volume de production brute d’un conseiller. «On regarde le modèle d’affaires et la façon dont la pratique opère. Il y a d’autres critères, comme le respect de la conformité et la multidisciplinarité. Ce qu’on fait, ce sont des lacs-à-l’épaule, des maillages et des échanges d’idées pour que les conseillers soient portés à progresser. On fait ça au Québec dans une auberge quelconque. Ce n’est pas un voyage de reconnaissance.»