En raison de leur inexpérience, les jeunes et les nouveaux immigrants risquent de croire à tort qu’ils peuvent contribuer à leur REER dès qu’ils enregistrent du revenu d’emploi, de travail indépendant, de location net ou de certaines autres natures. Or, ce sont seulement les revenus provenant de ces sources qu’un résident du Canada a gagnés l’année précédente qui génèrent des cotisations déductibles au cours d’une année donnée.

Il est donc sage de consulter l’avis de cotisation que l’Agence du revenu du Canada (ARC) a envoyé à un client avant de lui offrir un REER.

Ce conseil vaut également pour le client qui cotise à un RPA. En effet, sa cotisation maximale, qui s’établit à 18 % du revenu gagné l’année précédente jusqu’à concurrence d’un plafond de 22 970 $ en 2012, doit être soustraite du facteur d’équivalence de l’année précédente.

Le facteur d’équivalence fait en sorte que des contribuables qui ont des revenus semblables peuvent bénéficier d’une aide fiscale similaire, peu importe s’ils participent ou non à un RPA, selon l’ARC.

«C’est pour avoir une certaine équité avec ceux qui n’ont pas de RPA. Par exemple, les cotisants à un RPA à prestations déterminées vont voir leur marge maximale de cotisation au REER réduite du facteur d’équivalence, qui est basé sur un calcul actuariel», explique Normand Morel, conseiller principal en fiscalité chez Raymond Chabot Grant Thornton. Le facteur d’équivalence peut être égal à la limite de cotisation à un REER, si bien que le client n’a aucune cotisation déductible.

Certains clients professionnels, qui cotisent parfois dès janvier pour l’année précédente, risquent quant à eux de mal calculer leur cotisation maximale.

«Le danger, si les gens ne se fient pas à l’avis de cotisation, c’est d’oublier des ajustements qui réduisent le revenu gagné et, donc, les droits de cotisation. Par exemple, c’est le cas des cotisations syndicales et professionnelles, des dépenses d’emploi et des pensions alimentaires déductibles», note Dany Provost, fiscaliste chez Planium et chroniqueur pour Finance et Investissement.

Coussin de 2 000 $

Un client peut verser des cotisations excédentaires totalisant un maximum de 2 000 $ au REER, sans encourir de pénalité. Ce seuil de tolérance de l’ARC permet d’éviter des tracas administratifs à un client qui a commis une erreur de calcul.

«Les 2 000 $, c’est un coussin. Vous avez droit de cotiser davantage que vos déductions permises, mais vous n’avez pas le droit de déduire ce montant de votre revenu, indique Dany Provost. Quand vous êtes agressif, vous cotisez exactement 2 000 $ de plus que ce qui est permis.»

L’année suivante, si un client dans cette situation cotise 2 000 $ de moins que sa cotisation maximale annuelle, il pourra remettre les compteurs à zéro et déduire les 2 000 $ qu’il n’avait pas pu déduire l’année précédente, précise Dany Provost. Il faut retirer du REER toute cotisation qui excède cette marge dès que possible et signaler ces retraits adéquatement à l’ARC.

Un client mal conseillé

Un récent jugement met en lumière l’importance de consulter l’avis de cotisation du client avant de lui offrir un REER. Dans cette cause, la Cour canadienne de l’impôt a annulé les pénalités fiscales imposées à un immigrant auquel un employé d’une grande institution financière avait conseillé d’épargner dans un REER.

Jacob Friedlander, dont la langue maternelle est l’espagnol, lui avait pourtant déclaré qu’il ne travaillait pas et qu’il n’avait pas de revenus. Il restait à la maison avec deux enfants en bas âge.

Puisqu’il n’avait pas de déductions inutilisées au titre de REER, l’immigrant devait payer 4 350 $ en impôt, intérêts et pénalités sur les dépôts de 11 450 $ qu’il avait effectués de 2002 à 2006. Jacob Friedlander a tenté sans succès d’obtenir le consentement du ministre pour qu’on lui rembourse les cotisations excédentaires sans retenir d’impôt.

L’homme aurait dû produire une déclaration, au moyen d’un formulaire T1-OVP et verser l’impôt dans les 90 jours qui suivent la fin de l’année, ce qu’il n’a pas fait, selon le jugement. Comme il a commencé à régulariser sa situation en 2009, il s’est aussi exposé à une pénalité fiscale et des intérêts.

«Le formulaire Tl-OVP est très technique. C’est très facile de se tromper en le remplissant. Les gens ont souvent besoin d’un professionnel pour ce faire et ça se rajoute au coût d’une erreur», mentionne Normand Morel.

De la clarté, S.V.P.

Dans son jugement, le magistrat B. Paris critique le jargon utilisé dans l’avis de cotisation reçu par le nouvel arrivant. Non seulement les notes du document sont «toutes passablement obscures», mais l’avis désigne des cotisations excédentaires comme «des droits inutilisés de cotisations à un REER». Cette expression représente aussi les cotisations que le client a choisi de reporter à une année future.

Des clients ont déjà confondu, de bonne foi, cette expression avec le «maximum déductible inutilisé au titre des REER», qui est le montant maximum des cotisations qu’un client peut déduire dans sa déclaration, selon Normand Morel : «Ce n’est pas assez clair pour Monsieur ou Madame Tout-le-Monde. Plusieurs demandes ont été faites au ministère pour que l’on rende l’avis de cotisation plus clair, mais il ne semble pas que l’on veuille modifier quoi que ce soit.»

Le juge B. Paris conclut que l’homme a commis une erreur raisonnable et l’encourage à demander à l’Agence de revenu du Canada une révision de sa décision. Il est possible que ce jugement fasse pencher la balance en faveur de Jacob Friedlander, mais son cas ne doit pas être généralisé, d’après Normand Morel : «Je n’ai jamais vu de cas de souplesse du ministère, pour aucune raison».