Ashley Redmond : Ici Ashley Redmond pour Morningstar.ca, avec Dan Werner, analyste d’actions. Dan, merci de vous joindre à nous.

Dan Werner : Tout le plaisir est pour moi, Ashley.

AR : En 2012, nous avons filmé une vidéo portant sur une potentielle bulle immobilière au Canada. Vos préoccupations à ce moment-là planaient autour des sombres conditions boursières. Cela vous préoccupe-t-il toujours?

DW : Les conditions ont elles changé depuis 2012? Nous sommes toujours dans une conjoncture de très faibles taux d’intérêt, ce qui a alimenté la bulle immobilière, et la Banque du Canada a conservé son taux directeur à environ 1 %. Ce qui a conduit les banques à garder leurs taux hypothécaires bas. Par conséquent, nous avons toujours une inflation immobilière au Canada. Le prix moyen des logements a augmenté d’environ 20 % depuis 2012 et la raison pour laquelle nous avons toujours de faibles taux d’intérêt est [parce que si] nous regardons l’ensemble de l’économie canadienne, un PIB à 1,7 %, 1,8 % pour les deux dernières années, nous avons vu le chômage à environ 7 %, 7,5 % quelque part dans cette fourchette, la Banque du Canada n’a pas été amenée à augmenter les taux d’intérêt à ce moment-là, en raison de l’économie en général. C’est ce qui a mené à l’inflation du marché immobilier.

Pour répondre à votre question, les conditions sont toujours sombres et avec le prix moyen d’une maison à 390 000 $, il semblerait que le prix va continuer à augmenter.

AR : D’accord. Y-a-t-il une banque qui vous préoccupe plus qu’une autre, une qui est plus impliquée dans le marché hypothécaire?

DW : Je dirais que, dans l’ordre, les banques qui me préoccupent le plus sont la CIBC et la Banque Royale et en troisième place, suivant de près, la Banque Scotia. [Concernant la] participation générale aux hypothèques résidentielles, toutes les banques canadiennes, en fait au moins les cinq premières, ont [en moyenne] 55 % de leurs prêts dans les hypothèques résidentielles.

Si vous jetez un œil à la CIBC et comparez son portefeuille hypothécaire à son niveau d’immobilisations corporelles, il est presque de 900 %. Si vous regardez la portion non assurée, la portion qui n’est pas assurée par la SCHL, elle est toujours de plus de 250 % pour CIBC ainsi que pour la Banque Royale. Ainsi, il y a toujours une participation importante des banques aux hypothèques résidentielles.


AR :
Je pense que nous avons couvert la plupart des problèmes, mais y-a-t-il d’autres problèmes auxquels l’économie canadienne fait face en ce moment qui vous préoccupent?

DW : Je pense que lorsque nous regardons le marché du logement au Canada, nous jetons un œil à d’autres facteurs également. Nous regardons les données démographiques de ce qui se passe au Canada. J’ai examiné le taux net de fertilité et vu qu’il était à 1,5 à l’heure actuelle, normalement dans un pays industrialisé nous avons besoin d’un taux de 2,1 pour maintenir la population. Mais la population du Canada a augmenté au cours des dernières années. D’où vient-elle? Elle vient de l’immigration.

Donc si nous examinons le taux de croissance net de la population et que nous le comparons aux mises en chantier, nous obtenons un taux de 1,3 personne par nouvelle mise en chantier au Canada au cours des dernières années, tandis que le nombre moyen de personnes par foyer au Canada est de 2,4 à l’heure actuelle.

Il semble que le niveau de construction rattrape facilement le taux d’immigration et la croissance nette de la population, et cela est une préoccupation.

Nous avons aussi examiné le pourcentage de la main d’œuvre dans le secteur de la construction par rapport au total de la main d’œuvre au Canada, et il a augmenté depuis la crise financière, de 5,5 % environ à plus de 7 %. Au cours de la même période, les États-Unis ont chuté évidemment en raison du recul de la construction, mais même là les États-Unis atteignaient un sommet d’environ 5,5 % d’emplois dans le secteur de la construction par rapport au total de la main d’œuvre en 2007.

Le secteur de la construction semble donc constituer une bonne portion de l’économie canadienne, et c’est une préoccupation si un choc économique quelconque venait à se produire.

AR : Et lorsque vous jetez un œil au tableau d’ensemble en ce moment, êtes-vous plus inquiet que vous ne l’étiez en 2012 et en 2013?

DW : Bien, est-ce pire maintenant que cela ne l’était alors? Je dirais que ça dépend de votre situation. Si vous étiez propriétaire de votre logement entre 2012 et 2014, vous en êtes certainement très heureux. Le prix de votre maison s’est bien apprécié. Si vous êtes un acheteur en ce moment, vous l’êtes nettement moins. Il devient beaucoup plus difficile d’acheter une maison. En fait, je pense que cela dépend de votre situation.

AR : Très bien. La dernière fois que nous avons parlé de cela, nous avions reçu des commentaires très négatifs. Donc, êtes-vous le seul à vous préoccuper de cela ou pouvez-vous citer d’autres organismes ou personnes qui ont les mêmes préoccupations ?

DW : Vous savez que la presse parle constamment du prix exagéré de l’immobilier au Canada. Le Fonds monétaire international a annoncé ses chiffres et « Oui », leurs économistes ont dit que les prix du marché du logement étaient trop gonflés au Canada. Selon lui, les prix sont 10 % supérieurs à ce qu’ils devraient être. Ensuite, il y a l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE et leurs économistes ont annoncé que les prix étaient 30 % supérieurs à ce qu’ils devraient être.

Je pense que cela dépend à qui vous parlez, de leurs opinions et du modèle d’hypothèses utilisé. Mais la conclusion générale est que les prix sont gonflés.

AR : Très bien. Merci beaucoup, Dan.

DW : Merci de m’avoir reçu.

AR : Pour voir les commentaires, rendez-vous à la page des Actions sur Morningstar.ca.