Il rapporte que l’inflation des biens produits est plus faible que la croissance du prix du travail, ce qui devrait diminuer les profits des entreprises.

Il constate aussi que les prévisions des profits publiées par les entreprises (guidance) du S&P 500 sont particulièrement négatives pour 2014. En fait, le ratio des prévisions négatives par rapport aux prévisions positives pour le quatrième trimestre de 2014 est le ratio le plus élevé observé depuis 2001.

Une diminution des profits des entreprises entraînerait une diminution des investissements, et donc, du produit intérieur brut (PIB).

De plus, nous sommes au 55e mois de l’actuel cycle économique américain, alors que la moyenne, de 1854 à aujourd’hui, est de 36 mois, note Albert Edwards.

Par ailleurs, le taux de croissance de la productivité des industries non agricoles a baissé par rapport à 2012, ce qui serait également le signe que nous sommes dans une fin de cycle.

Finalement, il souligne que l’inflation et la création d’emplois diffèrent en fonction des données utilisées pour les mesurer.

Si on se base sur le Current Population Survey plutôt que sur le Current Employment Survey pour mesurer la création d’emploi et si on utilise le déflateur Personal Consumption Expenditures (CPE) plutôt que le déflateur Consumer Price Index (CPI) pour mesurer l’inflation, on constate une création d’emplois et une inflation plus faibles.

Contrairement au stratège de la Société Générale, trois experts interrogés sont plutôt positifs par rapport à la croissance des États-Unis. Quant à l’économie canadienne, elle serait, elle, dans une position fragile.

résiliente et prometteuse

Aux États-Unis, 2013 a connu une hausse de la taxation et une diminution des dépenses gouvernementales.

«C’est le plus gros freinage fiscal depuis 1980, année où on a commencé à compiler les données», dit Matthieu Arseneau, économiste principal à la Banque Nationale (BN).

Selon lui, «malgré cette situation, on devrait enregistrer une croissance de 1,7 % en 2013 aux États-Unis, ce qui montre que l’économie a vraiment tenu le coup. Sans ce freinage, on aurait eu une croissance très intéressante, probablement supérieure à 3 %».

Il y a manifestement un «bon momentum aux États-Unis», continue-t-il.

«Le prix des maisons monte, les ménages sont désendettés et il y a des choses plus structurelles comme la révolution énergétique, un coût d’énergie bas et d’éventuelles ouvertures d’usines, ce qui laisse croire que l’économie américaine devrait accélérer l’an prochain.»

La BN envisage une croissance dans les 2,6 % pour les États-Unis en 2014, précise-t-il.

Pour Benoit Brillon, chef des placements chez Gestion de portefeuille Landry, ce contexte positif favorise aussi la confiance des ménages «et un cycle de confiance des ménages ne s’arrête pas comme ça, cela dure plusieurs années. Il n’y a pas de raison de penser que la confiance des ménages chutera d’un coup. Et si la confiance s’installe, les consommateurs américains dépenseront».

Benoit Brillon remet aussi en question le fait que Albert Edwards anticipe une diminution des investissements des entreprises.

«On constate une profitabilité record sur le plan de la demande intérieure et on observe une amélioration de la profitabilité des entreprises américaines sur le plan international. Je ne pense pas que les profits seront beaucoup plus faibles en 2014 qu’en 2013. Pourquoi les entreprises réduiraient-elles leur budget d’investissement ?»

fragilisée

Jean-Pierre Couture, stratège et économiste chez Hexavest, explique que l’économie canadienne, elle, présente des risques de récession.

«On arrive à la fin du cycle immobilier, les ménages sont très endettés, le cycle d’investissements miniers est terminé aussi, les taux d’intérêt sont déjà faibles, et le dollar canadien n’est pas concurrentiel.»

Il ajoute que si le dollar devait se maintenir autour de la parité avec le dollar américain «les probabilités de récession au Canada seraient très élevées».

Pour Jean-Pierre Couture, si ce super cycle du crédit notamment a permis au Canada de bien s’en sortir dans les dernières années, c’est aussi à cause de celui-ci «qu’on a un taux d’endettement plus élevé que celui des États-Unis avant la crise financière et un taux de ménages propriétaires plus élevé que celui des États-Unis avant la crise immobilière».

Par conséquent, selon Jean-Pierre Couture, un des effets de ce cycle de crédit est la présence d’une bulle immobilière au Canada.

Il voit toutefois d’un bon oeil le changement de garde à la Banque du Canada.

«On a la chance d’avoir un banquier central qui comprend ce qui se passe dans l’économie réelle» et qui voit donc favorablement une diminution du taux directeur, note-t-il.

Une telle diminution, et on sait qu’elle est envisagée depuis peu par la banque centrale, «aurait un impact positif sur les exportateurs et sur l’emploi», précise-t-il.

Économie mondiale salvatrice ?

Pour Benoit Brillon, le risque de récession est plus élevé au Canada qu’aux États-Unis, mais «ce qui est important pour le Canada, c’est ce qui va se passer sur une base mondiale».

Malgré les différents défis auxquels l’Europe, la Chine et les pays émergents sont confrontés, la croissance sera globalement positive, d’après lui.

En dépit des défis respectifs que doivent relever les différents pays du monde, la variation du taux de croissance sera globalement positive, nous dit-il. Ce sera même le cas pour les pays émergents, qui traversent actuellement une situation économique plus difficile, explique Benoit Brillon.

Cette augmentation du taux de croissance, pour l’ensemble de l’économie mondiale, entre 2013 et 2014, permettrait «d’avoir un semblant de cycle de matières premières et une petite croissance dans ce secteur», explique-t-il.

«Le Canada a besoin d’une croissance économique mondiale en hausse pour se faire tirer» et, pour Benoit Brillon, «on aura une synchronisation à la hausse des économies mondiales quelque part en 2014 ; ce n’est pas arrivé depuis 2006», dit-il en parlant de l’augmentation du taux de croissance dans le monde.